La Maison Médicale l’Herma organise, en collaboration avec plusieurs maisons médicales,des balades mensuelles pour ses patients. Ils étaient très contents de ma balade du printemps 2019. Je réitère l'expérience le jeudi 19 mars, de 13h30 à 17h. Départ de la maison médicale rue Natalis 73
Je ne pars pas de
zéro : j’en suis à ma 56ième balade pour MPLP Herstal.
Marcher c’est bon pour
la santé ! Cliquez ici pour voir dix raisons prouvant que marcher
et faire de la randonnée sont bons pour vous !
Je leur ai fait un
costume sur mesure: des Vennes, on traverse la Boverie, le parc D’Avroy, le quartier
des Guillemins pour revenir via l’esplanade des Guillemins et la Belle
Liégeoise aux Vennes. Voici la première partie : des Vennes jusqu’au Parc
d’Avroy
Une première rencontre avec l'architecte
Paul Jaspar
Rue des Vennes 24-30 (photo Ipic) |
Rue des Vennes 24-30 (pairs) une série de
maisons de l'architecte Paul Jaspar que nous retrouverons dans le quartier des
Guillemins. Voici le commentaire de l’Inventaire du Patrimoine Immobilier Culturel (IPIC) : Intéressant alignement de maisons
d'allure homogène, de style éclectique simple, construites par l'architecte
Paul Jaspar. Il a construit cet ensemble
de 4 maisons pour la Société immobilière Jaspar de son père en 1887.
A l’autre bout de la
rue – mais ce n’est pas sur notre parcours aujourd’hui) il y a encore une série
de maisons intéressantes aux nos 157, 204, et la Séquence Thuillier du 127 à
137. Les nos 151, 191, 230, 384-386 (pairs) et 394 sont repris aussi dans
l’IPIC
Dans les années 1960, le quai Mativa était une autoroute urbaine
Nous débouchons sur le quai Mativa qui était à la fin des années 1960 une voie
rapide à 4 bandes. Cette voie rapide a été déclassée, et des travaux de
transformation ont permis en 2005 d'amorcer un aménagement du quai qui permette
à ses riverains d'accéder plus aisément aux berges de la dérivation. Je dis
bien ‘amorcer’…
L’art Nouveau du Quai Mativa
Nous avons le long du Quai Mativa des belles
façades Art Nouveau. C’est un peu logique : tout le quartier des Vennes a été urbanisé après l’expo de 1905, époque où l’Art Nouveau était à son apogée.
Plusieurs immeubles sont repris dans l’Inventaire du Patrimoine Immobilier
(IPIC ) : les n° 1-5 (pairs et impairs) et 11-23 (pairs et impairs) ; 34, 47-48 et 70 -74 (pairs et impairs)
Ils ne sont pas tous Art
Nouveau. Un peu plus tard on en était à l’Art Deco. Le n°
4 est signée Micha; le no 5 est de E. Bartholomé; au no 11, L. Bécasseau; au no
17, J. Crahay; au no 18, P. Tombeur; au no 20, H. Halkin et au no 22, Duesberg
(1911). Signalons aussi un sgraffite Art nouveau au n° 19 et au n°31.
Cet Art Nouveau est un
come back. Dans les années 30 les modernistes
de l’ Art déco l’appelaient style ‘nouille’. Le n° 70 (de
architecte Jean Plumier, 1939) et les n° 72 et n° 74 de l’architecte Louis
Rahier sont Déco.
Un top d’Art Nouveau : la Maison
Pieper
Le n°34 est un top d’art nouveau de
l'architecte Victor Rogister. Sur la façade treize figures d’Oscar Berchmans. Ce
sculpteur avait aussi un atelier où l’on fabriquait des têtes ‘art nouveau’ en série. Mais ici c’est du
sur mesure. La symbolique maçonnique est très présente. À la base de l'oriel,
une tête d'Isis au centre de huit carrés de fleurs domine deux figures
féminines aux yeux clos, placées sur des consoles travaillées jusqu'à leur
base. Au-dessus de la porte d'entrée, une chouette au plumage exagérément
déployé. Enfin, de chaque côté de la porte, une allégorie agenouillée et
soumise accompagne une chouette du côté gauche (représentation de la nuit) et
un coq du côté droit (le jour). Au sommet des pilastres (partie droite), on
peut voir deux têtes de barbus extasiés. Aux coins supérieurs de l'oriel,
quatre petites têtes semblent sortir des colonnes. Cfr http://art.nouveau.world/liege
plusieurs photos de détail.
Nicolas Pieper et sa voiture hybride
La maison a été
construite en 1908 pour le fabricant d'armes Nicolas Pieper. Les deux angelots au milieu tiennent un disque
représentant la lettre P, initiale patronymique du propriétaire.
C’est une personnalité
intéressante aussi.
Nicolas Pieper est né à Liège le 31 octobre
1870. Il est le second fils de l’armurier et capitaine d’industrie Henri Pieper,
un des fondateurs et principal actionnaire de la FN. Henri revend ses parts à la firme allemande Ludwig Loewe & Cie qui
devient alors l’actionnaire majoritaire de la FN, jusqu’en 1918.
Nicolas Pieper monte
sa propre affaire, la Fabrique d’armes automatiques Nicolas Pieper, à Saint
Léonard (la SPI a aménagé le site Pieper, 1.2
hectares entre le quai Coronmeuse et la rue Saint-Léonard). Imperia à
Nessonvaux, c’était lui aussi (une
voiture hybride ! On n’a rien inventé).
En 1907 Nicolas Pieper construit une nouvelle usine d’armes
à Herstal, cartoucherie comprise. L'entreprise aurait employé à son apogée 1000
personnes. En14-18 cette usine fournit à l’occupant allemand des baïonnettes
pour Mauser et des pièces pour pistolets Parabellum P08. Son revolver Bayard 1908
est produit en 100.000 exemplaires pour l’armée allemande.
Après la guerre Nicolas
Pieper produit à Saint Léonard un pistolet de poche semi-automatique Légia, selon
certains une copie du FN Browning 1906. Après 1923 on ne trouve plus trace de
ses activités armurières. Il décède en 1933 dans la maison familiale de la rue
des Bayards.
Le pont Mativa et l’expo de 1905
En face du n°6 se trouve la sculpture Le
Rameur, œuvre de l'artiste liégeoise Mady Andrien. Nous allons y arriver, à ces
rameurs de l’Union Nautique, un peu plus loin. Mais d’abord il faut traverser
une passerelle sur la Dérivation. L’ouvrage
d’art est aussi connu comme « Passerelle
Hennebique », du nom de son concepteur. Le concept est révolutionnaire dans
l’utilisation de béton armé : la hauteur de section
en clef n’est que de 350 mm pour une portée de 57 mètres. En 1945 les américains ont installé un atelier
de réparation de chars sur la Boverie. Le pont a survécu au passage des chars
Sherman, heureusement pas trop lourds…
François Benjamin Hennebique a déposé son premier brevet sur l'utilisation du
béton armé en 1892, intitulé « Combinaison
particulière du métal et du ciment en vue de la création de poutraisons très
légères et de haute résistance ».
Sur cette base Hennebicque constitue une véritable multinationale avec
127 concessionnaires, seuls autorisés à exploiter ses brevets, répartis dans 38
pays. 5.000 constructions ont été
exécutées d'après ses plans. Sa revue Le Béton armé, pour les concessionnaires
du Système Hennebique, tirait entre 3 000 et 10 000 exemplaires
En 2016, cette
passerelle est le troisième pont liégeois construit pour l’exposition
universelle de 1905 à être classé. Les ponts de Fragnée et de Fétinne, tous
deux à structure en métal, l’étaient déjà. La passerelle fait aujourd’hui
partie du réseau RAVeL.
Ce pont permettait aux visiteurs de l’expo de transiter du quartier des Palais,
installé dans le parc de la Boverie, à la plaine des Vennes transformée en
quartier des Halls et des Jardins. Le comité organisateur voulait un pont
définitif en vue du développement futur du quartier des Vennes.
L'Union Nautique, le Royal Sport Nautique de la Meuse et le RCAE Aviron de l’ULiège.
L'Union Nautique était là avant l’expo :
fondé en 1873 c’est aujourd’hui le plus
important club d'aviron francophone. Les régates avec les voisins du «Sport nautique de la Meuse» furent comparé aux célèbres «Oxford-Cambridge».
Le bâtiment qui date de cette époque mérite
une rénovation. «Le toit perçait d’un peu
partout. C’est un peu devenu les grottes de Han. On a mis un toit provisoire
mais qui n’est pas isolé donc ça fait deux hivers qu’on a des notes de
chauffage astronomiques. La salle de musculation qui est complètement dégradée.
La salle avec des machines à ramer a un plancher qui vibre énormément",
expliquait il y a 30 ans Michel Orban,
le président de l'Union Nautique de Liège.
Une rénovation de plusieurs millions d'euros
est prévue. Propriétaire du bâtiment, la
ville veut qu'on en préserve le cachet. La façade sera donc juste repeinte. On
accédera à la brasserie via une passerelle adaptée aux personnes à mobilité
réduite. Ceci dit, l’accès direct en voiture de la brasserie n’est plus
possible, et il y a une certaine ambiguïté sur l’accès de ce club house aux
non-membres.
Mais ces problèmes sont incomparables à ceux
sbis par leurs voisins qui doivent déménager.
Le Royal Sport Nautique de la Meuse (RSNM) à
Liège est le plus vieux club d’aviron en Belgique. Il a été fondé en 1860 !
Leur bâtiment date de 1930, dans le style moderniste de l’époque. Mais le bail
emphytéotique avec la Ville a oublié d’être reconduit. La ville y a installé la
Maison consulaire, et trois bateaux ont même été abîmés durant les travaux. On
avait prévu de leur attibuer le local voisin des pensionnés, qui n’était plus
occupé que par huit pensionnés, mais l’échevine Julie Fernandez Fernandez a
voulu y implanter la Maison des sports des seniors, alors que les pensionnés
sont partis d’eux-mêmes à Cointe.
« Avec
la Ville de Liège nous avons toujours été mis devant le fait accompli »,
regrette le président du RSNM, Franck Bouvet. « Nous avons 386 membres. La Ville nous a proposé d’aller à l’Ile Monsin
dans l’ancien centre ADEPS mais il nous demande une location de 1500€ pour les
six mois de travaux (sécurité, incendie, nouvelles douches, ...) dans nos
locaux à la Boverie ». Entretemps on aurait trouvé une solution pour cette
location (Sud Presse 16 oct.
2019).
La villa consulaire
Et pour en finir avec les rameurs, il y a encore
le RCAE Aviron de l’ULiège. Le clubhouse se trouve au pied de a nouvelle
passerelle (Sud Presse 11 avril 2019). En 2017
les consuls honoraires de France et d’Italie proposent de quittent la Maison de
la Presse et d’installer une « Maison des
Consulats » dans ce bel ensemble de style Art Déco, pour les grands
événements du Corps consulaire qui regroupe 46 pays. Les consulats d’Italie
(60.000 personnes concernées) et de France (30.000 personnes),. Si tout va bien
rameurs et pensionnés cohabiteront avec le Centre consulaire des Relations
internationales qui aura un droit d’emphytéose. Le sous-sol sera pour l’aviron.
Dans l’immédiat, le club des pensionnés pourra rester sur le site, explique
l’échevin Michel Firket (CDH). Ce Centre
consulaire s’est engagé à réaliser des travaux de rénovation pour 2 millions
d’euros (La Meuse 24 nov. 2017). Des
bureaux seront mis à disposition d’autres consulats et un foyer culturel sera
créé. La Ville oblige d’y accueillir une brasserie.Dominique Van Avermaet,
patron depuis 2014 de La Capitainerie voisine (le restaurant du port des
yachts) a relevé le défi. La
brasserie-restaurant « Villa Consulaire » comptera 70 places à l’intérieur et
70 également sur la terrasse en bord de Meuse.
Les Ducks Days et une piscine en plein air dans la Dérivation ?
Si la rénovation de l’Union Nautique se fait attendre, on n’est pas en manque
d’idées. En mai 2019 la société liégeoise Dock Marine, déjà derrière la piscine
en plein air de Paris, a testé une version miniature une piscine en plein airdans la Dérivation. Un système de fond plat qui imite une piscine, l’eau
chlorée en moins. D’autres optent plutôt pour l’exemple berlinois d’une piscine
flottante sur la Meuse.
Et en 2019 a eu lieu la 4ème édition du «
Ducks Day » :12.500 canards lâchés depuis l’Union nautique, pour une
course de 400 mètres. Une tombola un peu particulière : 12.500 tickets,
vendus au prix de cinq euros, chaque ticket valant… un canard. Cet évènement est organisé par les Machiroux
ASBL et Courant d’air ASBL qui s’occupent de jeunes souffrant de troubles du
comportement et de jeunes exclus socialement.
Les arcs de Bernard Venet
Depuis 2006 se dressent sur la jetée quatre arcs, sculptures monumentales de Bernar Venet. Implantés en zone inondable, situés au milieu d’une large zone sombre,
on y a ajouté un chaleureux halo de lumière. Le jet d’eau aussi s’illumine. Les arcs sont bercés par leur reflet aquatique,
dans une ambiance de mystère et de magie afférente à la situation
exceptionnelle du lieu...
Ces arcs se sont retrouvé d’abord là-bas après
une expo organisé par Nicolas Delcourt, de l’association Art et acier, qui aide
aussi l'enfance malheureuse.
Le plasticien français Bernar Venet,, pionnier
de l'art conceptuel, avait déjà un pied à terre au Parc du Château Cockerill à
Seraing. L’entreprise sérésienne CMI est devenue partenaire du sculpteur. Sans
son concours l’Arc Majeur dont l’idée remonte à 1984 serait encore un vieux
rêve. L’arc de 205,5° est un cadeau de 6000 heures de travail de CMI et de sa
fondation John Cockerill à la Wallonie. Un vieux rêve qui remonte à l'appel
lancé par Mitterand pour ajouter des touches artistiques sur les autoroutes. L’arc
en acier Corten, développé en collaboration avec le bureau d’étude Greisch que
nous croiserons encore sur notre balade, est aujourd’hui sur l’autoroute E411 à
la borne kilométrique 99 près de Rochefort, un emplacement choisi par
l’artiste.
On retrouve des arcs de Bernar Venet un peu partout dans le monde. Pourtant, il
a d’autres cordes à son arc ! Il a commencé à se faire un nom en 1961, avec
des Performances dans les ordures. Puis, en le
noir, c’est le rejet de la communication facile ». Il sort encore en 1999 la
troisième et définitive version du film Tarmacadam de 1963. La même année il
produit ‘Tas de charbon, une sculpture
sans forme spécifique versé à même le sol’.
Marcel Duchamp disait de lui : « Venet, vous êtes un artiste qui vend du
vent. »
1963, il montre des toiles
recouvertes de goudron parce que «
Les arcs, ça commence en 1978 : à la
Biennale de Venise il présente ses toiles Chords Subtending Arcs. Suivi de la
série des reliefs des Arcs, Angles et Diagonales en bois. En 1983, il met en
place la structure de base de ses Lignes indéterminées, en acier Corten. Il les
installe à Nice, Paris, Berlin, Tokyo, Strasbourg, Pékin, Austin, San
Francisco, Grenoble, etc. En 1997 il
commence les séries d’Arcs x 4 et d’Arcs x 5
Comme preuve que ses arcs sont adoptés par les liégeois, il y a le “Commando Rouche” qui a emballé un des arcs de
la Boverie, après le Torè et la statue de Tchantchès.
Les gens
qui suivent mes blogs se rendront probablement compte que ce qui suit est
extrait d’un autre de mes blogs « Ma« Manière de montrer les délices de
Liège »
http://hachhachhh.blogspot.com/2017/07/ma-maniere-de-montrer-les-delices-de.html
Une statue du ‘sulfureux’ Jef Lambeaux
Devant le musée, côté roseraie, une statue de
Jef Lambeaux
Le faune mordu avait été exposée en 1903 au Salon triennal de Bruxelles et, un
an après, à l'Exposition internationale des Beaux-Arts de Düsseldorf et à
l'Exposition universelle de Saint-Louis,
où elle remporte une médaille. En
1905, l'Exposition universelle de Liège voulait l’installer à la Boverie. Elle
reçoit les éloges notamment d'Auguste
Rodin, mais s'attire les foudres du journal catholique "La gazette de
Liège" et du vicaire Schoolmeesters. On renvoya l’œuvre qui se cassa en
chemin. L’Etat en fit faire néanmoins un autre exemplaire. Le conseiller
communal Charles Magnette, soutenu par l'échevin des Beaux-Arts Alfred Micha,
préconise l'achat de l'oeuvre pour réparer l'outrage fait au sculpteur
anversois. "Le faune mordu" est acquis par la Ville de Liège et
intègre ainsi les collections du Musée des Beaux-Arts. Il faudra attendre les
années 50 pour que la statue soit installée dans la roseraie du parc de la
Boverie.
On doit au ‘sulfureux’ Jef Lambeaux la
statue de Brabo à Anvers, et le pavillon des passions humaines au
Cinquantenaire dans un bâtiment d’Horta. Les "passions humaines »
étaient une commande publique et l’Etat, fier du résultat, en fit un double en
plâtre exposé dans nombre d’expos universelles. A Bruxelles aussi Lambeaux
s’attire les foudres des "culs serrés". Jean Delville eut "un haut-le-cœur devant un groupe aussi
colossal que nauséatif de grasses hétaïres de ruelles de ce Michel-Ange du
ruisseau". Le pavillon fut fermé jusqu’il y a peu. Le plus piquant fut
quand le roi Baudouin offrit un bout du parc du Cinquantenaire pour y bâtir une
mosquée et que les religieux y découvrirent avec horreur la saine sensualité de
ces bacchantes.
"La Nymphe du Bocq" aussi, qui trône
aujourd’hui devant l’Hôtel de Ville de Saint-Gilles, resta dans ses caves
jusqu’en 1976 à cause de "bons esprits" du XIXe siècle qui la
jugeaient trop indécente (llb 29
novembre 2008).
La Boverie : what’s in a name ?
L’architecte
Rudy Ricciotti nous a fait un nouveau musée, la Boverie, en collaboration avec le cabinet liégeois p.HD. Enfin, pas tout à fait nouveau. Ricciotti a créé une extension d’un bâtiment qui
date de l’expo universelle de 1905. Il l’a fait avec beaucoup de respect pour
ce patrimoine. Au point même qu’il a proposé, avec le lyrisme qu’on lui
connaît, de classer ses fondations, “premier bâtiment avec des pieux Franki”.
Notre architecte a à son
palmarès le Mucem à Marseille. Il a créé une grande aile vitrée face à la
Meuse, de 1 200 m², avec des vitrages hauts de 7,5 mètres, posée sur des
pilotis et intégrant des colonnes en forme de troncs d’arbres comme ceux qui
longent le fleuve. Il rêve « de la laisser allumée toute la nuit pour que
cette aile soit comme un sourire adressé à Liège”.
La tour cybernétique de Schöffer
Dans les années 50 la
cybernétique était un mot à la mode. Aujourd’hui on parlerait de digital. Un
certain nombre d’artistes ont surfé sur cette vague. En 1961, Liège achète une œuvre de l’artiste franco-hongrois Nicolas Schöffer,le père de l’art cybernétique : une sculpture abstraite de 52 mètres de
haut.
La Tour réagit, grâce à des capteurs, à différents stimuli (température, vent,
bruits de la ville, etc.) et déclenche, via des algorithmes cybernétiques,
trois types d’action : mouvements (pales réfléchissantes), sons (diffusion
aléatoire de bruits naturels retravaillés et de sons électroniques) et lumières
(lumière naturelle réfléchie par les pales le jour, lumière artificielle
colorée la nuit). L’artiste a tout prévu : un «moteur d’indifférence» intervient aléatoirement pour briser toute
monotonie.
Tout ça est tombé assez vite en panne. Mais
pendant toutes ces années des gens ont œuvré pour la restaurer. Etonnant, parce
que l’artiste n’a pas des liens bien particuliers avec la ville…
En 1997, ils obtiennent le classement de ‘la tour cybernétique et les composantes
matérielles ayant permis la réalisation du programme aléatoire et le spectacle
luminodynamique « Formes et Lumières »,
l’ensemble des éléments techniques permettant le fonctionnement de la
tour et l’animation de la façade du Palais des Congrès’. Je suppose que le
classement a facilité la restauration.
Ce projet liégeois a encouragé Nicolas
Schöffer à concevoir une autre Tour cybernétique de 360 mètres pour le quartier
de la Défense à Paris; ce projet fut abandonné après la mort du président
Pompidou, alors que le chantier avait été entamé. Paris Match avait publié en
1970 une simulation de la Tour dans un dossier présentant « Paris dans 20 ans».
En 1956 il avait
installé sa première sculpture cybernétique autonome (CYST 1) sur le toit de la
cité radieuse de Le Corbusier.
En fait Schöffer s’est inspiré d’El Lissitzky qui avait produit entre
1919 et 1927 des Proun (une abréviation en russe de "projet pour une affirmation du nouveau"). Ses expérimentations
avec l’espace et les matériaux sont une métaphore pour la visualisation des
transformations fondamentales d’une société qu’il espérait voir surgir de la
Révolution russe.
Schöffer a développé
Lumino pour Philips, en 1968.
L’œuvre la plus marrante de notre «artiste ingénieur» est une sculpture à
taper dessus pour transformer la violence en beauté » (Percussonor).
La Terre et L'Eau
Nous longeons le Ravel, le long du palais des
Congrès, jusqu’au pont Albert I.
La Terre et L'Eau, à l’entrée du pont, sont deux sculptures de Georg Grard. En
1931, sa maison de Saint-Idesbald était un
rendez-vous prisé, entre autres, pour Pierre Caille, que nous retrouverons de
l’autre côté du pont. A partir des années '50 Grard est souvent sollicité par
des commandes publiques. Parmi les plus célèbres, la Figure assise de la Banque
Nationale (1950), La Mer, à Ostende (1955). La Naïade de Tournai, (1950) dont la nudité avait fait scandale au
point où elle a été recouverte d'un
tissu et même déboulonnée pour se retrouver durant trois décennies au pied du
Pont-à-Pont. Ce n'est qu’en 1983 que la statue sera réinstallée à son
emplacement d'origine.
Une longue grossesse pour le monument de Pierre Caille
De l’autre côté du
pont une sculpture de Pierre Caille, "Liège à ses enfants morts pour elle".
Cinq grandes stèles en marbre noir, un ensemble de croix en bronze doré, avec
chaque fois une date. C’est pour les érudits, mais les dates ont été choisies
après mûre réflexion, celles de neuf des nombreuses
batailles qui ont jalonné l'histoire de Liège.Voici mon top 3, sujet d’un blog. Pour commencer la bataille de Vottem
du 19 juillet 1346, nos Eperons d’or. Chassé de Liège par le peuple, le
prince-évêque Englebert de la Marck avait levé une armée considérable grâce à l’Empire
Germanique. Les milices liégeoises se sont opposés avec succès à la cavalerie
ennemie.
En 1408, c'est la terrible défaite des Hédroits à Othée. Le 23
septembre, trois armées, celle du Princes-Evêque Jean de Bavière, du duc Jean
de Bourgogne dit Jean sans Peur, et du comte Guillaume de Hainaut, attaquent les
révoltés qui sont écrasés.
Et puis la révolution liégeoise de 1789
Le projet "Liège à ses enfants morts pour elle"
remonte 40 ans en arrière, à l’époque où Albert I lance le projet d’un ‘Monument interallié’, que nous voyons
sur notre gauche, au-dessus de la colline de Cointe. Pour Albert ce monument
était un porte-manteau pour sa stratégie internationale d’après-guerre ; c’était
aussi une alliance très subtile avec l’Eglise, qui a construit une ‘basilique’ juste à côté.
Trop subtil pour la
Ville de Liège qui lance en 1918 SON projet: un beffroi en ‘hommage aux Liégeois combattant depuis dix
siècles pour la liberté’. Le projet de la ville n’aboutit pas et en juillet 1936 le Conseil communal vote le transfert des fonds
budgétisés vers celui du monument au roi Albert, alors en projet. Il faudra
encore attendre presque 30 ans, en 1964, lors du 40e anniversaire de la
bataille de Liège, pour sa réalisation.
Ce monument n’est donc
pas seulement un pied de nez au Mémorial interallié, mais aussi à Albert qu’on
retrouve en bas du pont, sur un cheval non sellé. L’absence de selle n’est pas
un ‘statement’ politique de la part du sculpteur.
Un parc de sculptures
L'architecte Dedoyard
a conçu le projet de l'ensemble, comprenant aussi l'esplanade en contrebas du
pont et la statue du roi Albert par Charles Leplae et le grand escalier
d'honneur, doté de sculptures de M. Gillard et Paul Renotte qui a été après
guerre échevin communiste de la culture.
Et puis il y a encore
le ‘Relief au Lieutenant Graff ',un bas-relief d’Edmond Falise qui date de 1923. Après la guerre les troupes
alliées, «la Garde du Rhin», occupent
le Ruhr. Le 23 mars 1922, le jeune
lieutenant d'infanterie de l'armée belge, José Graff, regagne son casernement. A
Ruhrort, quelqu’un tire à bout portant sur le sous-officier. En Belgique, la
presse est déchaînée : «Le sang
belge coule en Allemagne! Un soldat tombe au poste d'honneur en montant la
garde du Rhin !». Heusy, où habite son père, général
retraité, inaugure un modeste monument. A Liège un bas-relief en bronze est
inauguré au pied de la passerelle, Place Cockerill. En 1940, les Allemands
rangent cette plaque dans les réserves de la Ville. Elle réapparaît sur
l'Esplanade après la deuxième guerre, en 1964.
Et enfin il y a L'Arbre et son ombre de Daniel
Dutrieux (1991) : 3 arbres de 7 essences différentes, choisies pour la couleur ou la forme du
feuillage, sont plantés selon une disposition qui, en braille, écrit le mot
«arbre». Il faut donc être aveugle pour le voir… Les 14 zones pavées affectent
la forme d’ombres d’arbres; en braille, elles se lisent “ombre”. L’utilisation du langage des aveugles dans l’oeuvre
plastique est une des démarches caractéristiques de Dutrieux, prompt à
débusquer ‘notre profonde cécité
collective face au devenir de notre environnement’. La maxi-carte, c’est la
remise à Daniel Dutrieux de 13 poèmes de François Jacqmin, sous le titre
‘L’arbre et son Ombre’, en 1991.
Le seul monument national à la
Résistance
On n’a pas encore fait
le tour de notre Memoryparc. Devant nous les Terrasses
d’Avroy. En 1881, les Terrasses sont
ornées de quatre sculptures en bronze dont la plus célèbre est le « Dompteur de taureau ». En 1880, ce
groupe statuaire de Léon Mignon, artiste
sculpteur né à Liège, avait remporté la médaille d’or au salon de Paris, et
Liège avait acquis l’œuvre, transposée en bronze.
La caricature ci-dessus représente l’évêque Doutreloux masquant les parties
génitales humaines avec la « Gazette
de Liége », journal bien-pensant dont le rédacteur en chef s’appelle
alors Joseph Demarteau, lequel dénonce, dans ses éditoriaux, l’outrage infligé
aux bonnes mœurs. En réaction ironique à cette campagne puritaine, le prénom du
journaliste est utilisé pour désigner le dompteur. On parle désormais, en
wallon, de « Djôsef » (Joseph) et son « torè » (le
taureau).
Les groupes statuaires des Terrasses associent
tous un homme et un animal, le premier dominant l’autre pour l’utiliser à son
service : le « Bœuf au repos « ,
aussi de Léon Mignon, le « Cheval
dompté » (1884) d’Alphonse de Tombay et le « Cheval de halage » (1885) de Jules Halkin
Devant nous le seul monument national érigé en hommage aux Résistants de 1940-1945, de l’architecte Paul Étienne et du
sculpteur Louis Dupont. Dupont savait de quoi il parlait : en 1941, lui et
son frère Georges avaient été enfermés à la Citadelle de Huy. Le groupe des
statues à gauche évoque la résistance armée, celui de droite la résistante
intellectuelle.
En 1958, le sculpteur réalise bas-reliefs du
lycée Léonie de Waha, les reliefs « la Philosophie », « Les Lettres » et «
L’Histoire », sur la façade du bâtiment de la Faculté de Philosophie et Lettres
de l’Université et les reliefs pour
l’hôtel des Télégraphes et des Téléphones, que nous croiserons un peu plus
loin, et les reliefs « La Nativité» et « Le Cheval Bayard », au pont des
Arches.
Dans le parc, le Madmusée, en réfection pour
le moment, abrite une collection unique de 2 500 œuvres qui s’inscrivent dans
le champ de l’art brut contemporain.
La suite (le quartier et la gare des Guillemins et la Belle Liégeoise très bientôt)!
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