En 1958, Liège reçoit un Palais des Congrès en compensation pour l’exposition Universelle de Bruxelles. Et à côté de ce Palais, la ville construit un hôtel, pour accueillir des congressistes. Aujourd’hui l’hôtel connaît un nouveau départ, sous la houlette de la chaîne hôtelière Van der Valk. Les dix dernières années de l’Hôtel Holiday Inn ont été pénibles. Mais on n’a pas de solution pour la Palais des Congrès. Je n’ai pas l’impression qu’il y a eu beaucoup de congrès. Si l’intérieur du Palais est encore potable, ses abords sont dans un état lamentable. Cet état d’abandon est encore renforcé par le déménagement de la RTBF vers la Médiacité.
Van der Valk acceptera-t-il de vivre dans un
contexte si dégradée ? Quel avenir pour ce Palais des Congrès ?
Des multinationales comme Easyfair se positionnent sur un marché lucratif pour
eux, mais pas nécessairement pour les pouvoirs publics qui ont construits ces
bâtiments mais qui sont à court de projets.
Le palais des Congrès : un beau projet architectural
Couverture 1934, n° 12.© pierrehebbelinck.net |
Le palais des Congrès est une compensation de
l’Etat Belge pour l'Expo 58 de Bruxelles. La Sonuma a dégoté les images d’une émission de 1957 «Miroir de Wallonie » consacrée à la construction du Palais des Congrès, de 1956 à 1958. Il est l'œuvre du grouped'architectes l'Équerre, auteur aussi du palais des sports de Coronmeuse et du
lycée de Waha.
La verrière épousant parfaitement la légère
courbe de la Meuse donne à la grande salle des pas perdus une luminosité
extraordinaire.
Les architectes ont intégré l’art public dans
leur projet, avec intégrée dans l'épaisseur de la façade d’entrée le sigle
abstrait conçu par Freddy Wybaux, et la composition en carreaux de céramique de
son épouse Éva Herbiet. Plusieurs autres artistes ont participé à la
décoration : Robert Crommelynck avec Le Printemps, L'Éte, L'Automne et
L'Hiver.
Pax, une fresque Ode à la paix de 25 mètres
par 5 de Léopold Survage orne la salle des fêtes
La frise en pierre de Chauvigny, taille
directe, a été baptisé La Rencontre: le Palais des Congrès est un lieu derencontre, d’échanges. Le bas-relief incarne cet idéal, avec en bas à droite,
en plus faible
relief, la silhouette d’un homme sans visage : celui qui n’est
pas encore là, l’homme à venir, l’homme de l’avenir… Ce bas-relief est de la main d’Idel Ianchelevici qui a aussi fait en 1939, pour
l'Exposition Internationale de l'Eau, Le Plongeur et son arc (Venet, que a ses
arcs à la pointe de la Boverie n’a pas inventé l’arc). En 1939 l’oeuvre en terre et plâtre est démoli, mais la
Ville en fait réaliser un moulage en ciment, moins fragile que l’original. après
la guerre on envisage de réinstaller l’œuvre au bout du parc de la Boverie,
près de l’Union nautique. Le Plongeur est resté à La Boverie, mais dans les
réserves du Musée des Beaux-Arts. Au début des années 90, le musée était en
piteux état et a été fermé au public. Quand on a voulu installer la réplique en
2000 au port des yachts, on n’a pas retrouvé directement le Plongeur. La réplique est en polyester creux sur une armature métallique, réalisée par le sculpteur Victor Paquot.
Et on ne saurait oublier, à l’extérieur, l’œuvre
de l’artiste franco-hongrois Nicolas Schöffer, le père de l’art
cybernétique : une sculpture abstraite de 52 mètres de haut. La Tour réagit, grâce à des capteurs, à différents stimuli (température, vent,
bruits de la ville, etc.) et déclenche, via des algorithmes cybernétiques,
trois types d’action : mouvements (pales réfléchissantes), sons (diffusion
aléatoire de bruits naturels retravaillés et de sons électroniques) et lumières
(lumière naturelle réfléchie par les pales le jour, lumière artificielle
colorée la nuit). L’artiste a tout prévu : un «moteur d’indifférence» intervient aléatoirement pour briser toute
monotonie.
La tour est tombée assez vite en panne. Mais,
contraste flagrant avec le délabrement du palais, pendant toutes ces années des
gens ont œuvré pour la restaurer. En 1997, ils obtiennent le classement de ‘la tour cybernétique et les composantes matérielles
ayant permis la réalisation du programme aléatoire et le spectacle
luminodynamique « Formes et Lumières »,
l’ensemble des éléments techniques permettant le fonctionnement de la
tour et l’animation de la façade du Palais des Congrès’. Je suppose que le
classement a facilité la restauration.
Le bureau d’architectes Philippe Greisch a
supervisé la restauration, avec des nouveaux panneaux mobiles en inox, nouvel
éclairage LED, etc. Il a failli de peu pour qu’une Tour similaire de 360 mètres voit le jour
au quartier de la Défense à Paris; ce projet fut abandonné après la mort de son
sponsor Pompidou.
Beaucoup de Congrès ?
le congrès wallon de 1945 |
Le Palais a été construit à l’emplacement
exact de la salle du jardin d’acclimatation où eut lieu le premier Congrèsnational wallon, en 1945, avec plus de mille cinq cents participants. Lors d’un
premier tour de vote il y a une majorité relative (46 %) pour la réunion à la France. Fernand Dehousse rattrape la sauce en plaidant
pour une autonomie dans un cadre confédéral.
Le neuvième Congrès national wallon est
organisé en 1959 dans le nouveau palais des Congrès. Cette session sera la
dernière. Il y a encore en 1961 une
journée d’étude au Palais entre fédéralistes wallons et flamands sous la
présidence de Jean Pirotte (Wallonie libre) et de Paul Daels (Vlaamse
Volksbeweging), En 1976 il y a l’Assemblée commune de Rénovation wallonne, de
Wallonie libre et du Mouvement populaire wallon, sous la présidence du patron
des Métallos FGTB de Liège, Robert Gillon, dirigeant du MPW. Ils s’accordent
sur le fédéralisme et les réformes de structures.
Si le rattachisme est aujourd’hui réduit à sa
plus simple expression, les «Amitiés Françaises de Liège» fêtent chaque
année, depuis 75 ans, le plus grand feu d’artifice en dehors du pentagone le 14
juillet, devant le Palais des Congrès.
Une intercommunale, à deux, pour le Palais
Le Palais des Congrès, façade vers le parc de la Boverie photo le chainon manquant |
Je n’ai pas fait une recherche sur le nombre
de Congrès qui y ont été organisés, mais je n’ai pas l’impression qu’il y en a
eu beaucoup. En tout cas pas assez pour l’entretenir sérieusement.
Je n’ai pas non plus réussi à savoir comment
Liège a réussi à faire payer une autre commune pour contribuer au financement
de ce Palais et son hôtel. Toujours
est-il qu’en 1997 Liège et Chaudfontaine créent l'Intercommunale de gestion
immobilière liégeoise (Igil). Il faut être deux pour danser un tango et il faut
minimum deux communes pour créer une intercommunale (selon ‘Droit administratif Tome 2: Les entreprises publiques locales en Région Wallonne’ )
L’IGIL s’implique dans la promotion du
tourisme d’affaires via l’asbl Liège Congrès, « non pris en charge par les pouvoirs publics ». La Province est
impliquée aussi, mais je n’ai pas réussi à savoir comment. A côté de la contribution de Chaudfontaine on
arrive encore à débusquer en 1999 6 millions d'euros et en 2004 4 millions
d'euros d’argent européen pour une rénovation du palais.
Une intercommunale n’est pas un modèle de
transparence, et je suppose que les comptes du Palais des Congrès n’étaient pas
très beaux à voir et qu’une certaine opacité arrangeait les décideurs.
Et pour brouiller un peu plus les pistes l’exploitation
du Palais et des halles des Foires de Coronmeuse est confiée en 2012 à la Fil (Foire
Internationale de Liège) qui devient "Liège Expo" (dans le cadre du projet avorté d’une
exposition universelle). L'Igil s’occupe de l'immobilier.
A la tête de l’Igil nous retrouvons Stéphane Moreau. La directrice est Yolande
Lambrix, l'épouse du président du CPAS de Liège Claude Emonts.
Moreau essaie encore d’inscrire 50 millions
d'euros d'investissements dans la nouvelle programmation européenne Feder. Il y
a évidemment la rénovation de plusieurs parties du palais, mais aussi celle du
parking attenant (pour deux millions d'euros) ainsi que des anciens locaux de
la RTBF. Ca vaudrait la peine d’analyser les raisons de ce refus.
Les anciens locaux de la RTBF : un chancre
Les locaux de la RTBF, vides de tout occupant,
sont un chancre créé de toutes pièces. On a encore payé – pour la forme ?-
une étude pour la rénovation. Il y aurait trop de murs aveugles à percer pour
faire des bureaux, trop d'espaces à créer etc. Et puis, il y a les caves qui
abritaient les studios TV. Toutes ces objections me semblent un peu légères
pour une architecture fonctionnaliste conçue à partir de plateaux.
Finalement la RTBF s’installe en 2011 dans la
‘Médiacité’, un soutien public pour le promoteur immobilier Wilhelm&Co.
C’est dans une même logique d’ailleurs qu’on y a transféré la Patinoire du
Palais des Fêtes de l’expo de 1939. En 2012 un autre locataire, la Chambre de
commerce et d'industrie (CCI), part vers Liège Airport.
On fait miroiter l’installation du siège de
l'ASBL Liège Europe Métropole, selon le patron de l'Igil. Mais pour des raisons
tout aussi opaques cette asbl s’est installé dans les locaux du Royal Sport
Nautique de la Meuse (RSNM), le plus vieux club d’aviron en Belgique (fondé en 1860 ; le bâtiment en style
moderniste date de 1930). La Ville avait
«oublié de reconduire le bail
emphytéotique ». Selon le président du RSNM, le club avait «386 membres. La Ville nous a proposé d’aller
à l’Ile Monsin dans l’ancien centre ADEPS mais il nous demande une location de
1500€ pour les six mois de travaux (sécurité, incendie, nouvelles douches, ...)
dans nos locaux à la Boverie». (Sud
Presse 16 oct. 2019).
En 2017 la « Maison des Consulats
» s’installe dans ce bel ensemble Art Déco et s’engage à réaliser des travaux
de rénovation pour 2 millions d’euros (La Meuse 24 nov. 2017).
Bref, cette partie du bâtiment est à
l’abandon. Il est vital de lui trouver une nouvelle destination. Je n’ose m’imaginer
le Palais de Congrès avec cette partie murée… Vous me répondrez peut-être que
ça ne dénoterait pas avec les quechuas installés parfois devant le Palais et de
manière plus ou moins permanente en dessous de la rotonde piétonnière en bas du
pont.
Question de nourrir un peu la recherche
d’alternatives, voici une petite idée "publique" que me suggère un
ami. Ce n'est qu'une piste...
Il existe en Belgique deux centres consacrés
au modernisme et au design, le Design Museum de Gand mettant en valeur les
"savoir-faire" historiques et actuels et le Mac's au Grand Hornu
centré sur la création contemporaine. Pourquoi pas créer, dans le berceau de
l'expo de 1905, au sein d'un bâtiment emblématique de la création d'après
guerre, un "musée des arts décoratifs" comme on disait autrefois? De
Serrurier-Bovy aux réalisations architecturales liégeoises remarquables
(L'Equerre, EGAU) en passant par l'art verrier et céramiste, il s'agirait d'un
lieu de mémoire et de prospective, lieu d'expo et d'animation, notamment en direction
des élèves de nos écoles. Il serait couplé avec, sur l'autre rive rue Paradis,
la Design Station consacrée aux artistes/artisans actuels. Sans oublier un lien
possible avec nos voisins maastrichtois qui ont connu l'art de la céramique
(grâce à des Liégeois) et une production remarquable de meubles design:
Artifort.
Les déboires de l’hôtel Holiday Inn
En 1971, l’hôtel fut construit sur un terrain
de la ville de Liège et la société gérant l’Holiday Inn pouvait, moyennant un
certain loyer, gérer de manière exclusive le site. Cette location est gérée d’abord
par une Régie communale et ensuite par l’Igil. En 1998 cette ASBL mène une
action judiciaire – avec un soutien timide de la Ville – contre la société
Alliance .Je ne sais pas comment et quand l’hôtel est venu dans les mains du
groupe Alliance, ni pourquoi les relations se sont envenimés au point où en
2002, la Ville de Liège refuse de renouveler le bail emphytéotique.
Alliance continue à assurer la gestion quotidienne de l'hôtel, sans bail
commercial, pour une durée non définie contractuellement. «La Ville refuse de toucher au loyer qui est versé sur un compte en
attente”, explique Yves Demeuse de la FGTB. "Si la ville acceptait le
loyer, c'est comme si elle acceptait le processus de bail.” C’est un peu comme
Cuba qui refuse de toucher au loyer de Guantanamo. Sauf que le loyer américain
est ridicule.
L'Echo, 30 Mai 2012
Tandis que l’ardoise d’Alliance Hospitality
vis-à-vis de l'IGIL est estimé part le même Igil à 5 millions d'euros,
représentant des arriérés de loyers (depuis 2005) et d'indemnités pour
l'occupation d'immeuble sans titre, ni droit sur plusieurs années. Alliance
reconnaît le litige, mais juge trop élevé le montant exigé par l'IGIL. Et
"on veut aussi investir dans la rénovation de l'hôtel, mais avec les
propriétaires ", déclare le directeur de l’époque Maras Ligil. Je
comprends qu’il veut négocier avec la Ville, mais pas avec l’Igil qui n’est pas
propriétaire du bâtiment.
Une procédure de mise en concurrence négociée
Une moquette défraîchie, un air conditionné
mal en point voire inexistant en certains endroits de l’hôtel et un étage
inaccessible, en 2011 les travailleurs dénoncent ces conditions de travail.
L'hôtel s'est dégradé au fil des ans, mais il faudra
attendre la fin d'un interminable feuilleton devant la justice avant que l’IGIL
puisse partir à la recherche d'un investisseur via une procédure de mise en
concurrence négociée. Début 2013 il reste trois candidats : le groupe
Vandervalk, la multinationale Accor (un demi million de chambres), et, enfin, assez
étrangement, le groupe Alliance, qui a repris entre-temps l'hôtel Mercure (dans
l’ancienne Linière de John Cockerill, à Saint Léonard). Alliance continue d’ailleurs à proposer des
chambres en 2020. Regardez les évaluations pour cet hôtel qui n’existe plus : on ne sait pas
s’il faut rire ou pleurer !
Finalement, cette procédure
européenne d’appel d’offres prendra deux ans. Préalablement, il a fallu passer
devant le Conseil communal de la Ville où la procédure judiciaire en cours
empêchait un accord. Il a fallu attendre l’arrêt de la cour d’appel (favorable
à la Ville). Entre-temps Accor s’était désisté. Le groupe Alliance assure que la décision récente de la cour d’appel ne
remet aucunement en question la participation à l’appel d’offres. Mais Alliance
part évidemment avec un handicap insurmontable (LLB 15/1/2014).
Van der Valk : une entreprise très familiale.
A mon grand étonnement, le groupe Van der Valk est une entreprise familiale. On
en est à la quatrième génération. Le fondateur Martinus van der Valk a voulu
donner un hôtel a chacun de ses onze enfants. Il y a réussi. En 1994 suite à une enquête poussée du fisc le groupe se
réorganise en neuf holdings, que la famille appelle ses ‘staken’; elle a
anticipé le mot à la mode ‘stake-holders’! Une fois par an la famille réunit
ses franchisés, présidé par le conseil détenteur de la licence. Pour utiliser
le totem du toucan, le franchisé doit être un descendant direct du fondateur,
ou avoir marié un.e van der Valk. Marco Wohrmann qui est à la manœuvre à Liège est par exemple un des quatre fils d’un Van
der Valk qui avait lancé l’hôtel Nivelles-Sud.
La quatrième
génération cible des hôtels dans les centres-villes européens, ainsi que des casinos. Il y a les 200
arrière-petits enfants. Avec 100 hôtels on peut dire que la moitié de
la quatrième génération a son hôtel. Pour la cinquième génération, enfant
aujourd‘hui, il en faudrait 400.
C’est ce groupe un peu
atypique qui remporte la mise, en 2016. Stéphane
Moreau annonce fièrement qu’après «10
ans de conflit juridique avec le groupe Alliance, nous allons enfin retrouver
des recettes locatives, cet hôtel qui est un outil essentiel au développement
du Palais des Congrès voisin. »
Moreau n’est plus aux commandes. On ne saurait
donc pas lui demander où iront ces recettes locatives, puisque c’est
l'intercommunale Ecetia Finances qui finance via un leasing immobilier. Van der
Valk annonce 17 millions pour la rénovation (en fait le bâtiment sera
complètement désossé et la facture finale monte à 22 millions). Le nouvel hôtel
4 étoiles de 219 chambres sera le plus grand de la province de Liège, voire
même de Wallonie. « Au rez-de-chaussée,
il n’y aura plus de piscine. Cet étage sera dédié à l’accueil, avec une
brasserie et un restaurant. Au premier étage, on trouvera une grande salle des
fêtes et trois plus petites salles de banquets. Au deuxième étage, la moitié du
niveau sera consacrée à un espace Kinéo, avec sauna, hammam, piscine… L’autre
moitié de l’étage sera consacrée au logement. Enfin, au 10ième étage, nous
installerons un skybar face à la Meuse ».
Fin 2019 Van der Valk reprend aussi l'hôtel
des Comtes de Méan, alias Sélys. C'est encore Ecetia qui mettra à disposition
le bâtiment via un leasing immobilier. Marco Wohrmann, le directeur général de
la chaîne au toucan pour les implantations liégeoises, explique qu’Ecetia
Finances a acquis le bâtiment et un droit de superficie de 20 ans sur le
terrain, avant de le confier en leasing immobilier à la SRL Hôtel Sélys Liège
pour 16 ans au moins, avec possibilité de rachat anticipé ou à terme. Le
Tribunal de l’Entreprise de Liège a demandé que le montant de la transaction ne
soit pas divulgué. « Il y a deux branches dans l’intercommunale », rappelle
Bertrand Demonceau (MR), le directeur général d’Ecetia. « Il y a Ecetia qui
assure le financement immobilier des pouvoirs locaux, et Ecetia Finances qui
assure le financement d’opérations privées. Aucun argent public n’est utilisé
dans ce partenariat avec Van der Valk.
Rénovation du parking
Si la rénovation de l’hôtel est impeccable, il
y a le parking devant l’hôtel qui est dans un triste état. En 2018, alors qu’on
sait depuis quatre ans que Van der Valk va reprendre hôtel, l’Igil dépose à
peine le permis de bâtir pour rénover son parking. Gilles Foret et Pierre
Gilissen (MR) jugent que c’est insuffisant : « le parking de 200 places est dans un état déplorable. Le rénover, c’est
bien, mais il faut plus de places de stationnement. Ce parking est
nécessaire pour le Palais des Congrès, mais il pourra également être utilisé pour
le pôle culture de Bavière, quand il y a la foire, pour les riverains, et même
pour les navetteurs, en tant que parking de persuasion à une entrée de ville.
» L’idée n’est pas d’encourager le
recours à la voiture, se défendent les élus MR, mais bien d’encadrer au mieux
ces véhicules : « Si tout est
réorganisé correctement, on peut espérer que de nombreuses voitures ne
rentreront justement plus dans la ville. Et un parking souterrain permettrait
en outre de libérer l’esplanade actuelle, qui pourrait ainsi être rendue aux
Liégeois, en devenant un espace vert. Avec des bancs, des parkings vélos, un
accès vers le RAVeL… »
Un projet qui risque toutefois d’être beaucoup
plus onéreux que la seule rénovation du parking existant. Mais surtout un beau
prétexte pour un partenariat avec le privé : « Il faut accepter que le parking soit payant. Dans tous les palais des
congrès, les parkings sont payants. Maintenant, on peut envisager d’autres
formules, notamment pour les riverains. Il faut trouver un exploitant qui soit
d’accord de creuser tout en laissant l’esplanade dégagée. La décision, il faut
la prendre demain, au lendemain des élections communales », termine Gilles
Foret.
Début 2020, toujours rien. Et il n’y a pas que le parking qui doit être
rénové. Les façades et les abords donnent également une image de quasi abandon.
Ce qui n’empêche pas Roland Léonard, l’échevin des travaux, de rajouter encore
une couche : « D’ici la fin de
l’année, nous allons aménager une piste cyclo-pédestre le long de la rue du
Parc, reliant le pont Albert à l’entrée de la Boverie afin de réaliser une
nouvelle boucle de Ravel ».
Un nouveau Ravel, un espace vert au-dessus
d’un parking rénové : des arguments creux qui servent à masquer une
privatisation de ce parking probablement montée de connivence avec Van der
Valk ?
Les centres de congrès trop nombreux ?
Il y a plusieurs
hôtels Van der Valk accolés à un palais de congrès. Pour eux, c’est une opportunité,
dans leur modèle économique basé sur l’organisation d’évènements. Mais ça ne
garantit nullement un avenir pour les Palais mêmes. D’ailleurs, Van der
Valk n’investit pas directement dans les palais de Congrès. Le groupe travaille
avec Artexis Easyfairs, une multinationale organisatrice d’évènements.
Le modèle économique
d’Easyfairs est basé sur couplage hôtel-centre de congrès, mais sans
nécessairement en être le propriétaire ou concessionnaire. À Mons par exemple,
l’ancien Mons Incentive Congress Xperience, le MICX devenu WCCM (Wallonia
Congress center Mons), conçu par l’architecte américain Daniel Libeskind et
inauguré en janvier 2015, avait d’abord été repris par Artexis Easyfairs. Mais
il a connu une baisse de fréquentation importante en 2017 et généré près de
200.000 euros de pertes dans les deux premières années de son exploitation. L’hôtel
Van der Valk est juste à côté. Easyfairs
a mis fin à sa concession, ainsi qu’au palais des congrès de Namur (l’ancienne
bourse du Commerce), dont la Ville a récupéré la gestion en 2018. Easyfairs
reste concessionnaire de Namur Expo, une infrastructure polyvalente de 11.000
mètres carrés. Mais pour combien de temps, et sous quelles conditions ?
Liège, Namur, Mons,
Louvain-la-Neuve, Libramont… et bientôt Charleroi, les centres de congrès sont
trop nombreux alors que le marché des meetings est à la traîne. L’Aula Magna de
Louvain-la-Neuve est une grosse machine avec 14.000 mètres carrés de
superficie, 8 salles d’une capacité de 36 à 1.200 places et deux espaces
d’exposition. Cette aula a été complétée récemment par l’inauguration de la
Sucrerie de Wavre. La chambre de commerce et d’industrie de Wallonie picarde pilote
l’EWP, avec son petit auditorium et ses salles modulables. Tournai Expo offre
10.000 mètres carrés aux foires et salons, et à La Louvière, le Louvexpo un peu
moins de la moitié, divisible en cinq espaces. Il y a encore Wallonie Expo
(WEX) de Marche-en-Famenne avec ses six palais dont les superficies varient de
3.100 à 3.500 mètres carrés et let Libramont Exhibition & Congress avec ses
quatre halls d’exposition, son auditoire de 400 places et ses salles de
conférences. Charleroi construit un nouveau palais des congrès à côté du palais
des expos entièrement rénové et le palais des beaux-arts
La Ministre wallonne
en charge du Tourisme, Valérie De Bue (MR) parle d’une offre suffisante. Ne devrait-elle
pas plutôt parler de surcapacité, une aubaine pour les organisateurs
d’évènement d’entreprises (BtoB) ? En plus, selon la direction générale
statistique et information économique (DGSIE), la progression des nuitées liées
aux activités de meeting et de congrès sera lente. Entre 2013 et 2018, l’augmentation
n’est que de 10 %, de 546.000 à 601.000 unités. Pendant que les nuitées
d’affaires connaissaient une hausse de 35 % dans les autres segments.
Dans une étude du
secteur Mice (Meetings, Incentives, Conferencing, Exhibitions) réalisée en 2014
par le cabinet Second Axe pour le compte du Commissariat général au tourisme
wallon, le marché des congrès est peu porteur à cause «d’une offre surabondante d’infrastructures publiques et un manque
d’attractivité du territoire pour l’accueil de grandes manifestations
internationales et salons B to B, combinée à une jauge hôtelière trop basse
».
Qui est Easyfairs ?
L’organisateur de salons et gestionnaire de halls d’exposition Easyfairs a étédésigné Entreprise de l’Année 2018 par
EY, L'Echo et BNP Paribas Fortis. Cette multinationale des foires et salons a
cinq clusters: Benelux, Nordic
(Zweden, Noorwegen, Finland en Denemarken), DACH (Duitsland, Oostenrijk en
Zwitserland), UK & Global (USA, Midden-Oosten en Azië) et Spain. Créée en 1997 sous la bannière Artexis, elle a racheté de nombreux
salons B2C et B2B en Belgique et acquis ou géré des halls d’exposition. C’est ainsi qu’elle avait repris Antwerp Expo en 2002 et Namur Expo en 2003. En 2004 elle lance le concept Easyfairs, le "Ryanair des salons", une formule low cost avec une centaine de
salons B2B aux quatre coins de l’Europe. Easyfairs vise a susciter une
expérience WOW, et ainsi augmenter
le ‘dwelling’ des visiteurs avec un
bon réseau wifi, un sanitaire impeccable, des parkings confortables et un bon catering.
En 2006 elle reprend Flanders Expo à Gand.
Artexis et Easyfairs fusionnent en 2013 sous
le nom Easyfairs, un changement de nom qui traduit un positionnement davantage centré
sur l’organisation de salons (80% de son chiffre d’affaires) que dans la
gestion de halls d’exposition (20%). "
Le hall est devenu un moyen de développer des salons, pas un objectif",
explique son CEO Eric Everard.
En 2014
est crée une joint venture Artexis-SMG. SMG est le leader mondial dans la gestion de centres d’évènements et a
un portfolio de 74 halles d’exposition et centres de congrès.
Easyfairs a réalisé 159 millions d'euros de
chiffre d'affaires en 2018, tout près de son record de 2017. Son excédent brut
d'exploitation pointe à 28 millions d'euros. Sur les dix dernières années, le
groupe qui lance entre 20 et 30 nouveaux salons par an et emploie 700 personnes
dont 200 en Belgique, a multiplié son volume d'affaires par deux et demi et sa
rentabilité opérationnelle par dix.
En 2018 Eric Everard, qui détient 90% des
parts (le solde est aux mains du management) ne se disait pas opposé à ouvrir
son capital au cas où une possibilité d’acquisition stratégique dépassant sa
capacité d’endettement devait se présenter.
Un autre projet pour la Palais des
Congrès ?
Voilà un peu la situation actuelle du palais
des Congrès. Un beau projet architectural, un peu démesuré par rapport aux
besoins de l’époque en salles de congrès, avec son auditoire de mille places et
ses vingt salles modulables dans un complexe de 15.000 mètres carré. Par
contre, Liège est sous-équipé en infrastructures abordables pour lemonde
associatif, mais un gestionnaire absent et opaque n’a jamais pu développer
cette autre piste. Pour l’hôtel on peut espérer qu’un nouveau départ est plus
ou moins assuré. Pour le palais des congrès par contre, le défi reste entier. Et le danger est grand qu’on reste braqué sur
un modèle basé sur des partenariats avec le privé, dans un contexte de
surcapacités de Palais de Congrès, et une concurrence entre villes pour
rentabiliser un tant soit peu ces infrastructures chères.
sources
La Libre Belgique 30 jan. 2015 ; La Dernière Heure 26 sep. 2013 et 20 septembre 2011 ; Sud
Presse 5 mar. 2016 ; 15 sep. 2018 ; 11 oct. 2018 ; Le Soir 28 sep. 2019 et 10 fév. 2020 ; l’Echo
16 octobre 2018 ; 8 juin et 28 septembre 2019
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