mercredi 17 janvier 2018

36ième balade-santé MPLP les terrils jumelés bernalmont et belle vue

ill. zeehond
Chaque deuxième dimanche du mois, MPLP organise une balade-santé. Labalade de février 2018 a contourné deux terrils, Bernalmont et Belle-Vue. Belle-Vue est le nom d’un charbonnage, mais on aura aussi de beaux panoramas. Elle est partie du rue de la Station, au pied de l’ancienne gare.

La rénovation de l’ancienne gare Marexhe est imminente

Un important chantier de rénovation est en cours pourà cette ancienne gare, inaugurée en 1914, par les Allemands. A ce qu’il parait, ils auraient même payé leur ticket de train.
Il a fallu des années pour qu’un arrangement soit trouvé avec la SNCB qui a finalement accepté de donner à la Ville un droit d’emphytéose de 50 ans. Ce projet de réhabilitation est subsidié par le Feder dans sa programmation 2014-2020. Ce qui ralentit la procédure puisque rien ne peut se faire sans l’aval de la tutelle. Tout à l’intérieur sera démoli sauf ce qui est structurel. L’intérieur sera ensuite transformé de manière polyvalente et modulable. La façade sera quant à elle refaite à l’identique.
photo Warnier
L’endroit sera mis à disposition des associations (Croix-Rouge, de la Régie de Quartier ou encore de la Banque alimentaire…). L’idée est bonne, mais il y a en face l’ex Miguel Hernandez à vendre, avec une salle tout équipé. Et à 100 mètres il y a le Motorium. Et un peu plus loin  a vinaigrerie Lourtie où l’on a construit une maison de quartier, avec plusieurs salles. On va être gâté, en Marexhe-Hayeneux. Ne pourrait-on y faire du logement social ?
Quant à la cour des marchandises, l’idée est de faire de ce terre-plein de deux hectares un petit parc d’activités artisanales. La Ville a chargé la SPI de mener à bien ce projet (La Meuse 16 jan. 2018). La La Compagnie du chemin de fer Liégeois-Limbourgeois
La gare de Herstal est (encore) desservie en semaine par trois à quatre trains dans chaque sens par heure ; 160 dessertes journalières. En cinq minutes on est au centre-ville. Le plan de mobilité de la Ville de Herstal attache à juste titre beaucoup d’importance à cette ligne qui suit d’ailleurs le trajet du tram. Ce qui n’a pas empêche de fermer en 2013 le guichet de Herstal. Pour la SNCB c’est devenu  un point d'arrêt non géré (PANG).
La ligne a été mise en service en 1865 par la Compagnie du chemin de fer Liégeois-Limbourgeois.
Cette ligne desservait la FN, les Acec, la sucrerie de Liers, les Charbonnages de Milmort, Bonne Espérance, et la Grande Bacnure.
Au départ, la gare terminus pour la Compagnie privée était la gare de Vivegnis. Plus tard, le faisceau de garage fut réimplanté à Liers, qui devint donc « Tête de ligne » mais qui perdra bientôt ce statut au profit de Kinkempois. L'État-Belge rachètera le réseau en 1896.

Le Parc Pieper

Un parc a été aménagé sur le site des  "Anciens Etablissements Pieper"
Nicolas Pieper est né à Liège le 31 octobre 1870. Il est le second fils de l’armurier et capitaine d’industrie Henri Pieper qui avait une usine rue des Bayards et à Nessonvaux (Imperia : une voiture hybride ! On n’a rien inventé). Henri est un des fondateurs de la FN. Principal actionnaire, il revend ses parts et quitte le Conseil d'administration de FN en 1895. Ludwig Loewe & Cie reprend les parts et devient alors l’actionnaire majoritaire de la FN, jusqu’en 1918.
Nicolas Pieper monte sa propre affaire, la Fabrique d’armes automatiques Nicolas Pieper, à Saint Léonard (la SPI a aménagé le site Pieper, rue d’entreprises, entre le quai Coronmeuse et la rue Saint-Léonard,  sur une surface de 1,2 ha).
En 1907 Nicolas Pieper construit une nouvelle usine à Herstal. En 1912 il lance une carabine et un pistolet de tir. La firme installe une cartoucherie. L'entreprise aurait employé à son apogée 1000 personnes.
En août 1914, les AEP sont contraints de travailler pour l’occupant allemand à qui ils fourniront de grandes quantités des baïonnettes pour Mauser et des pièces détachées pour pistolets Parabellum P08. Son revolver Bayard 1908 est produit en 100.000 exemplaires pour l’armée allemande. Le dernier numéro de série est 265890.  Le 22 mai 1918 une escadrille de 6 avions bombardait les établissements Pieper. Ils ratent leur cible mais tuent Cathérine Bulton dont le mari était en Angleterre. Elle fut enterrée à Foxhalle. Après l’armistice son mari apprend cette mort tragique ; il perd la raison et accuse les autorités d’avoir fait exécuter cette attaque. Il fut interné à saint Trond où il meurt en 1925. En 1929 Herstal donnait le nom de Cathérine Bulton à une nouvelle rue dans son quartier, entre la rue des Vignes et la rue de Vottem  (Collart-Sacré, La Libre seigneurie de Herstal, éd. Thone, 1927 p.100).
Les Pieper ont-ils été mis sous séquestre après la guerre, le père étant d’origine allemande ? Je n’ai pas réussi à éclaircir cela. Toujours est-il qu’après 1918 Nicolas Pieper s’installe au 292 de la rue Vivegnis où il produit sous brevet Thonon un pistolet de poche semi-automatique Légia, selon certains une copie du FN Browning 1906. Il aurait ouvert aussi un atelier à Paris en 1922. Après 1923 on ne trouve plus trace de ses activités armurières. Il décèdera à Liège dix ans plus tard en 1933 dans la maison familiale de la rue des Bayards.
L’usine de Herstal continuera ses activités sous la direction de Joseph Declaye.  Celui-ci fait breveter et fabriquer un nouveau pistolet (modèle 1923), deux carabines à verrou (modèles 1921 et 1927), des revolvers type Smith & Wesson et une carabine à répétition automatique à chargeur tubulaire. 1934 voit l’adoption d’une version améliorée de la mitraillette Schmeisser-Bergmann par l’armée belge. Les AEP en obtiennent la commande (Mitraillette 34), de même que celle de la transformation d’une partie des vieux Mauser 1889 en Mauser modèle 89/36. Jean-François Declaye succède à son père à la tête de l’entreprise.
En 1940 l’usine est à nouveau réquisitionnée par les troupes d’occupation. Une direction allemande est désignée pour organiser la production de mitrailleuses lourdes pour la Luftwaffe.
Libérés par les Américains en septembre 1944, les AEP reprennent difficilement leurs activités : fusils de chasse, carabines à verrou et à air comprimé, nouveau pistolet automatique 6.35 Browning, mitraillettes Sten. La société liégeoise ARMO leur confie la fabrication du fusil de chasse Actionless à détentes cachées : ce sera un fiasco. La firme est placée en concordat de faillite en 1953, et cesse pratiquement ses activités en 1954. La plupart des bâtiments seront vendus en 1956 et détruits en 1957.

Le GR 412 E (sentier des terrils Est)

Nous montons par le parc Pieper vers la rue des Renards.  Nous sommes ici sur le GR 412 E (sentier des terrils Est). Nous suivons la rue de la Crête dans l’axe de la rue des Vignes. Cette « rue » est bordée d'une série de pavillons, construits par le charbonnage en 1947 pour y loger ses travailleurs étrangers.  Les 20 pavillons de la rue de la Crête étaient réservés aux familles.  Tandis que les pavillons de la rue des Petites Roches étaient aménagés en phalanstère pour les "célibataires".  En réalité, ces "célibataires" étaient pour la plupart mariés mais venus en Belgique sans leurs familles.
Un peu plus loin le château de Bernalmont. La travée centrale est couronnée par un fronton triangulaire aux armoiries de Bernalmont, une famille déjà citée au 13e siècle. Les Bernalmont ont été des grands maîtres de houillères. Le château a été détruit lors de la Révolution française. L'aile principale est reconstruit fin du 18e siècle. De la ferme du château, il ne reste que la grange, devenu club-house du golf. Les bâtiments s'élèvent dans un vaste parc planté d'essences variées. La Grande Bacnure devient propriétaire du château en 1919.
Après la fermeture du charbonnage le château est abandonné et fut le cadre de deux incendies importants.

En 2012 Estate Merchant Investments rénove la ruine pour un hôtel de luxe, situé à l'intérieur du parcours de golf. Les week-ends, grâce au golf, l'hôtel arrivait à faire le plein de clientèle. En semaine par contre, ses couloirs et ses lits restaient quasiment vides. La faillite a été prononcée en automne 2014.

Une faillite un peu étrange, puisque les murs sont restés la propriété des actionnaires Estate Merchant, et seulement les éléments mobiliers ont servi à rembourser les créanciers. Quelques appartements sont proposés à la vente, mais on continue à louer des chambres : 280€ pour 2 nuits chez booking.com (380 prix normal).
Cet édifice appartient à cinq copropriétaires. La famille de Bruno Marcy dispose de sept entités locatives (NDLR : cinq studios et deux chambres).  « Nous les avons réaménagées et donné une dénomination précise comme, par exemple, Calatrava. Une clientèle d’affaires. Des personnes qui apprécient le golf . Il ne s’agit pas d’un hôtel. Nous n’avons pas engagé de personnel. C’est mon papa qui amène le petit-déjeuner » (La Meuse 7 déc. 2016).
 En 2016 Merchant a obtenu une demande d’urbanisme pour la rénovation complète du Château et le Golf Village I (un lotissement de 10 terrains à bâtir et un bâtiment de 24 appartements, et le Golf Village II (un lotissement de 10 terrains à bâtir et un certain nombre de terrains aptes pour des appartements).

Les nouvelles constructions qui se font au pied du terril de Bernalmont, rue des Petites Roches, sont sur le bourrelet marginal du terril. Si je mets un poids sur la pâte à pain contenue dans une bassine, le poids va en partie s’enfoncer dans la pâte et la pâte se surélever autour du poids ; cette élévation est le bourrelet marginal. Si après j’enlève le poids la pâte va retrouver sa position initiale.
Ce bourrelet est stable tant que le terril est là, mais en cas d’enlèvement du terril ce bourrelet en disparaissant engendrerait des mouvements de terrain nuisibles à la stabilité de la construction. Le building de l’Esplanade de la Paix aussi est construit sur le bourrelet marginal. 
Bien que considéré comme stable ce terril se tasse au fil des années si bien que sa base s’élargit, au moins de quelques centimètres d’année en année.  Cela est causé par les rejets latéraux de schiste dus à la poussée exercée par le poids du terril sur sa base et par l’érosion naturelle des flancs du terril.  En l’absence de périmètre de sécurité, cette croissance de la base du terril atteindra après quelques temps ces nouvelles constructions, ce qui ne peut être que source de conflit entre le propriétaire du terril et ses riverains.  Elles rendront inévitablement plus difficile la gestion d’un terril dont nous souhaitons qu’il devienne, à terme, propriété publique.
Le terril de Bernalmont avait été cerné en 1961 d’une butte de terre délimitant un premier périmètre de sécurité.  Par après les déversements avait été poursuivi jusqu’en 1971 jusqu’à hauteur de cette butte, d’où la nécessité de délimiter un nouveau périmètre de sécurité ce qui n’a pas été fait.  Pour réaliser la construction actuelle l’entrepreneur à enlevé une partie de cette butte en terre.

Le terril de Bernalmont

Le  Plan Communal de Développement de la Nature (P.C.D.N.) de la Ville de Liège a classé le terril de Bernalmont en Zone centrale : c’est un élément essentiel pour le maintien de la biodiversité sur le territoire liégeois. Les terrils de Belle-Vue et de Bernalmont  sont aussi d’un grand intérêt scientifique et paysager et représentant en outre un précieux témoin du passé industriel de la basse Meuse.
Nous contournerons le terril de Bernalmont à sa base, via la Rue des Petites Roches.
La société charbonnière de la Grande Bacnure fut fondée en 1824.  Sa paire supérieure est située à Bernalmont et sa paire inférieure rue Derrière Coronmeuse.  En 1862, la concession de la Grande Bacnure est portée à 290 hectares, elle s'étend sous Liège, Herstal, Vottem et Bressoux. En 1920 elle fusionne avec la Petite Bacnure. On réunit alors les différents sièges par un tunnel qui partait d'un étage inférieur du puits de la Petite Bacnure, à - 30 mètres, pour arriver à - 47 mètres au puits de Gérard Cloes et de là aboutir à Coronmeuse dans la rue J. Truffaut entre les maisons nos 49 et 53.  A la paire inférieure une partie de la production est lavée. Les pierres résidus du lavoir retournaient par un tunnel pour la mise à terril. 
Le terril de Bernalmont a un volume de trois millions de mètres cubes, une hauteur de 84 m, une masse de 4,9 millions de tonnes et il occupe une surface de 11,50 hectares.  Il fut chargé de 1920 à 1971. Le siège de Gérard Cloes fut en exploitation jusqu'en 1960, mais subsista en tant que siège annexe à la Petite Bacnure jusqu'à la fermeture de ce dernier en 1971.
On se rend compte que les deux terrils De Belle Vue et de Bernalmont ont été chargés principalement pendant et après la guerre, quand on compare leur taille actuelle avec les mamelles de 1939, lors de l’Exposition de l’eau.
En plus, ils se chevauchent. Ce ‘jumelage’ ne s’est pas fait sans disputes : les deux charbonnages se sont chamaillés comme des chiffonniers et un géomètre a été appelé assez souvent pour déterminer lequel débordait sur l’autre. Au vu du résultat, il a perdu son temps…
Nous contournons Bernalmont à sa base. Nous débouchons sur le Ravel Rail, un projet intéressant en compensation de la suppression de deux passages à niveau.

Le Charbonnage de Belle-Vue et Bien-Venue

Juste après le treillis anti-éboulement une veine de charbon apparente, ou plutôt une veinette qui a quand même un nom: « Beguine » (parce que stérile, non exploitable). Une deuxième,  «Halballerie», est cachée sous le treillis. Cette veine a été exploitée par la Bacnure où elle se retrouvait à moins 227 m. ! Ces veines en affleurement, donc visible en surface, ont été repérées lors de la construction de la tranchée du chemin de fer. Nous avons sur notre gauche plusieurs départs de sentiers, qui menaient vers des jardins.
De l’autre côté du chemin de fer, où se situe maintenant « La Marée », se trouvait la paire de Belle-Vue et Bienvenue, qui avait un passage comblée sous voie qui servait à transférer les inertes de Belle Vue vers le terril. Le Charbonnage de Belle-Vue et Bien-Venue à Herstal est acquis en 1930 par les Charbonnages du Hasard, dont la concession se situait sur Cheratte, Housse, Barchon, Cerexhe-Heuseux, Soumagne et Fléron. La Société cessera ses activités avec la fermeture de Cheratte en 1977. Ses deux puits se trouvent à 4 mètres du piétonnier de l’autre côté du chemin de fer. C’est dommage que ces 2 emplacements ne sont plus accessibles.  Sur la borne récemment rénovée les chiffres 202002 – 202, le n° attribué par la Région Wallonne à la Concession de Belle-Vue et Bien-Venue. Ces concessions existent toujours au niveau juridique. L’abrégé BV-BV + 002 indique le n° du puits, le n°2.  Dans tous les charbonnages modernes il y avait un N° 1 ou puits principal et un n° 2 puits secondaire.  Les 2 puits étaient utilisés tant pour la translation du personnel que pour la remonte du charbon ; le puits n°1 servait de puits d’entrée d’air et le puits n°2 de retour d’air.  L’air, servant à l’aérage des galeries et des tailles du fonds de la mine était aspiré et refoulé par des ventilateurs et
acheminé dans tous les recoins de la mine par un circuit de porte ouvertes et fermées.  L’aération avait pour but d’amener de l’air frais là où travaillent les ouvriers mineurs, mais aussi d’éliminer l’air vicié par le CO2 et  par le grisou qui se dégageait des couches de charbon, en plus ou moins grande quantité suivant le charbonnage.
Nous tournons à gauche, dans la Ruelle des Renards. La maisonnette marquée au fronton ‘1923’ abritait le treuil de la mise à terril. Nous montons maintenant sur le terril de Belle-Vue. Il a un volume de 1.300.000 m3 et une hauteur de 80 m.  Il a été chargé jusqu'en 1968.  Le terril était chargé par skip, avec au sommet un culbuteur et des glissières.  Un skip est un wagonnet roulant sur la voie inclinée du terril, les roues arrière étaient doublées de façon à produire le culbutage automatique du skips lorsque celui-ci arrivait au sommet du terril. Nous contournons aussi, à mi-hauteur cette fois-ci, le terril de Bernalmont. Nous sommes de retour à l’ancienne gare vers midi.

Autres balades dans le coin

http://hachhachhh.blogspot.be/2016/08/24ieme-balade-sante-autour-du.html                          

Documents

Philippe Frankard, " Flore, végétation et écologie des terrils charbonniers de la région liégeoise" mémoire de licence 1984 au Département de botanique de l’Université de Liège. http://popups.ulg.ac.be/0037-9565/index.php?id=1729



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