dimanche 30 décembre 2018

Plan Urbain de Mobilité première partie : les BUTS ET CONTEXTE D'ACTUALISATION DU PUM


L’enquête publique sur le Plan Urbain de Mobilité s'est terminée 7 janvier 2019. Voici mes commentaires sur le PRÉAMBULE : les BUTS ET CONTEXTE D'ACTUALISATION DU PUM, et sur les zonings et le logement.
Au Conseil Consultatif d’Aménagement du territoire et de la Mobilité (CCATM) de Herstal ce plan n’a même pas été mis à l’ordre du jour ! Je n’ai d’ailleurs pas trouvé trace d’un débat dans les autres CCATM de l’arrondissement. Si les CCATM n’en discutent pas, que veux-tu que les citoyens se lancent dans l’enquête publique ? Ceci dit, j’ai essayé de formuler dans ce blog mon questionnement par rapport à ce plan. Mes questions sont en gras. Si ça vous dit, vous pourriez relayer les questions que vous partagez dans l’enquête publique. On peut le faire par mail.
Certes, le PUM sera à l’ordre du jour des Conseils Communaux après la clôture de l’enquête publique. Tu me diras que les conseils communaux ne doivent pas passer par l‘enquête publique pour faire connaître leur avis, mais cela me semble quand même un peu étrange.
Pourtant, en p.6 on préconise de concrétiser le PUM avec l'appui des usagers et de la population : « La gestion de la mobilité est l’affaire de tous, et ne peut plus être réservée à un petit nombre de personnes appartenant à des instances institutionnelles. Il est désormais indispensable de déclencher une prise de conscience massive et en fomentant un engouement populaire. Dès sa validation, les phases de mise en œuvre du PUM devront ainsi rechercher une forme de caution sociétale ».
Voici ma première question : comment je dois interpréter ça, « après sa validation » ? Quand les carottes sont cuites ?

Un premier Plan Urbain de Mobilité initié en 2008

C’est d’autant plus alarmant que c’est le deuxième PUM. Le premier Plan Urbain de Mobilité (PUM) de l’Arrondissement de Liège a été initié en 2008. « Le projet de PUM 2008 même s’il n’a pas été formellement adopté, a permis l’émergence d’une vision partagée, ambitieuse et durable de l’agglomération liégeoise ».
L’émergence d’une vision partagée : vraiment ? Dans quel film ?
Il est vrai que les intentions sont bonnes, et les objectifs ambitieux! Le PUM se réfère au Plan FAST 2030 (Fluidité – Accessibilité – Sécurité / Santé – Transfert modal) du Gouvernement wallon de 2017
qui vise une diminution significative de la demande totale de mobilité de 5 % et une modification majeure des parts modales.
A l’échelle wallonne, on veut passer :
De 3 % à 5 % pour la marche (+67 %) ;
De 1 % à 5 % pour le vélo (+ 400 % !!!) ;
De 4 % à 11 % pour le bus (+ 175% !!!) ;
De 9 % à 16 % pour le train (+ 78%) ;
De 83 %à 63 % pour la voiture (- 23 %).
N’aurait-on pas pu vérifier dans quelle mesure le PUM de 2008 a permis d’ébaucher ces objectifs ?
Il est vrai que l’Etude d’Incidence qui accompagne le PUM aborde cettte question. Un seul exemple plutôt alarmant: « Les politiques de stationnement préconisées dans le PCM de Liège de 1999 ou dans le PUM de 2008 n’ont pas encore été appliquées, que ce soit en termes de maîtrise du stationnement sur la voirie, de réduction de l’offre à destination des navetteurs en cœur d’agglomération ou de mise en place de P+R (parkings relais) alternatifs, à l’articulation entre la 2ème couronne et les axes de transports publics structurants. Seuls les projets de P+R de Vottem et d’Ougrée devraient voir prochainement le jour alors que le projet de PUM 2018  rehausse de + 100% l’effort à produire en la matière, avec près de 10.000 places à créer ».

Le Schéma de Développement de l'Arrondissement de Liège –SDALg

Le premier chapitre reprend les enseignements du Schéma de Développement de l'Arrondissement de Liège –SDALg – déjà approuvé par les conseils communaux des communes de l'arrondissement. Le SDALg constitue le volet développement territorial du PUM 2018.
Le PUM ne dit pas dans quelles conditions ce SDALG a été approuvé.  Cela ne vaudrait il pas la peine d’analyser ces débats, et de partir des remarques et observations des Conseils Communaux ?
Je souscris à fond l’enjeu de la mobilité repris en p.5 « La mobilité est importante dans nos vies. Il semble tout naturel de pouvoir se déplacer aisément. Les embouteillages, le bruit, les pollutions devraient être évitées. Une bonne accessibilité du territoire est vitale pour le développement d’activités économiques ou sociales. Quelques exemples pour situer ça : avec plus de 110.000 véhicules par jour, le tronçon Alleur – Rocourt du ring nord est le plus fréquenté (et saturé) de Wallonie. Et les montées des bus du TEC "Liège agglomération" représentent 40% du total wallon pour seulement 13% de la population! »
Le PUM commence à juste titre (p.9 ) avec le plan de secteur dont « la particularité du au niveau de l’arrondissement de Liège réside dans  la nette prépondérance de zones urbanisables, qu’il s’agisse de zone d’habitat, d’habitat rural ou économique ».
Mais ça s’arête là. Dommage. En effet, le plan de mobilité s’emboite dans les plans de secteur qui s’emboîtent dans le Schéma de Développement Territorial dont l’enquête publique vient de se terminer, dans une indolence comparable au PUM. Le SDT emboîte à son tour les sdp, sdc, sol, gru et gcu. Mais le plan de secteur est quand même spécial, dans la mesure où c’est le seul document légal (le schéma ci-joint l’exprime bien visuellement). Ces plans de secteurs complètement dépassés bloquent tout, parce que ça coûterait : il faudrait indemniser les propriétaires des zones urbanisables qui ne le seraient plus. Quant aux zones économiques, j’y reviens un peu plus loin.

UN GRAND POTENTIEL DE DÉVELOPPEMENT  FONCIER

Depuis le projet de PUM de 2008, la surface bâtie en zone d’habitat a augmenté de 10% pour une croissance de la population de 5 % (p.16 ). Ca m’interpelle et le texte n’approfondit pas les raisons de cet étalement urbain.
Idem pour les Zones d’activité économique mixte et industrielle au plan de secteur (ZAEm et  ZAEi): 3.908 ha. En 2014 il y avait 2.347 ha de surfaces bâties (485 ha mixte -1.862 ha ind.) ; en 2005 : 2.089 (431 ha mixte - 1.658 ha ind.). Pourtant, l'arrondissement de Liège représente 18,7 % de l'emploi wallon en 2015, alors qu’il représentait 19,6 % en 2001. Et la croissance de l'emploi durant cette dernière décennie est inférieure à celle affichée par la Wallonie. Et malgré cela les hectares de surfaces bâties ont augmenté. Pourquoi on ne calcule pas l’évolution du nombre d’emplois par hectare ? Combien d’emplois en plus sur ces 258 hectares supplémentaires ?
Le PUM ne se pose pas plus de questions non plus sur les 1.560 ha de surfaces non bâties (il est vrai, en diminution des surfaces non bâties en 2005 : 1.775). L’étude ne fait aucune analyse de la densité d’emploi à l’ha.

Un ZAEm sur trois pour les commerces

27% de ZAEm (presque 1 sur 3, majoritairement situées en périphérie) sont utilisées par des commerces (p.18). Est-ce normal ? D’autant plus que «ces zones commerciales situées en ZAEm qui accueillaient à la base des commerces dit alimentaires, type grande surface, acceuillent de plus en plus des commerces type habillement, décoration,... au détriment  des centres des villes et petites villes ».
Les objectifs du PUM sont louables: ne plus autoriser le développement de grands centres commerciaux en dehors des polarités existantes ; soutenir le développement de commerces et services de proximité dans les noyaux; maîtriser le développement commercial le long des axes ; rénover de manière intelligente l’offre existante. Le diagnostic est implacable : sur les 10 dernières années, plus de 200 projets commerciaux ont été accordés pour une moyenne de 31.323 m²/an sur l’arrondissement. En 2035, si même moyenne appliquée, il y aura un développement de plus de 600.000 m² de surfaces commerciales, soit l’équivalent de 7 Cora Rocourt.
Actuellement, la superficie de commerces supplémentaire par année est de 1.812m²/hab.
En 2035, si on veut maintenir l’offre à son niveau actuel : 4.373 m² supplémentaires par an sur
l’arrondissement sont suffisants. Soit, d’ici 20 ans, un développement de 87.000 m² de surfaces commerciales. Selon le Segefa (ULiège),  à moyen terme, l’agglomération de Liège n’a pas besoin de nouveaux nodules non-spécialisés (p.59).
Les AMBITIONS du Plan Urbain de Mobilité : un développement commercial limité a l’horizon 2035 : autoriser un maximum de 85.000 nouveaux m² :  « Si l’objectif est de maintenir l’offre à son niveau actuel, environ 4.300m² supplémentaires par an sont suffisants Soit, d’ici 20 ans, un développement d’environ 85.000 m² de surfaces commerciales. La recommandation est de ne plus autoriser de nouveau complexe de plus de 10.000 m² ».
Or, rien que le Cristal Park de Seraing, c’est 60.000 m² de surfaces commerciales! Le Central Piazza à Soumagne c’est 20.000 m² de commerces. Quand au dernier conseil communal de Seraing de 2018, le PTB a introduit plusieurs questions concernant le projet Cristal Park, la majorité a essayé de mettre le point à huis clos (interdiction du public et des journalistes d'assister au débat). Ne devrait-on pas appliquer cette recommandation de ne plus autoriser de nouveau complexe à ces projets pharaoniques ?
Et le PUM ne fait pas l’analyse des friches commerciales existantes ou potentielles (exemple Belle-Ile, la Marée à Herstal, … ).
Pour Herstal (et je suppose pour d’autres entités) le Segefa a fait une analyse spécifique. Il faut rendre public ces études. Au niveau urbanisme il faut faire l’inventaire des cellules commerciales vides et si possible les réaffecter au logement.
Et pourquoi le PUM met sur le même pied ces ZAEm commerciaux et les commerces de proximité, dans un langage châtré ( p.19) ? « L’arrondissement de Liège dispose d’un maillage central, autour de l’hyper-centre liégeois, qui s’étend de Herstal à Boncelles et de Fléron à Ans, dans lequel on retrouve les pôles de Liège, Herstal, Ans, Fléron et Jemeppe, et les nodules de soutien de Basse-Campagne, Rocourt ou encore Boncelles. Y sont également présents des nodules spécialisés dans l’alimentaire, ou encore ceux spécialisés dans le semi-courant lourd tel que Alleur et Hognoul. »
Basse-Campagne, Rocourt ou encore Boncelles, des nodules de soutien ? Alleur et Rocourt, des nodules spécialisés ? Peut-on mettre sur le même pied ces zonings et les soi-disant nodules de soutien comme Visé et Aywaille ? Des nodules de soutien ? Soutien à quoi ? Ne s’agit-il plutôt pas d’exemples à suivre (même si Visé connaît ces jours-ci des désistements alarmants) ?
N’est-ce pas en contradiction complète avec le constat à la page suivante, que les centres se vident de leurs commerces, au profit de la périphérie ? Je cite : «Ils déstructurent le territoire, et l’affaiblissent non seulement économiquement mais également socialement ».

PERSPECTIVES POUR LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE

Ces dernières années, la moyenne annuelle de surfaces à vocation économique vendue par la SPI est, pour la province de Liège, inférieure à 30 ha. D’ici 20 ans, si une moyenne de 20/ha par an est appliquée, il y aura un développement de 400 ha d’activités économiques sur l’arrondissement.
De 2016 à 2025, les opérateurs économiques devraient disposer de 553 hectares dédicacés à l'accueil d'entreprises (p.58).
Le PUM note le décalage important entre l’offre à moyen terme et l’offre actuelle. Il reste peu de disponibilité immédiate dans les parcs généralistes mais pour 2035 719 ha sont déjà prévus!
À cela, il faut encore ajouter :
−La réoccupation des bâtiments vides ;
−La réhabilitation des friches industrielles dont les sites de la Foncière liégeoise (Chertal : 194 ha, Cockerie 38 ha et HFB : 35 ha.). 
Le préambule signale à juste titre que «presque 15 % de la surface totale des ZAE au plan de secteur sont des sites en cours de reconversion, à des stades d’avancement divers, et qui seront dévolus à diverses activités (pas nécessairement de l’économique!). Ce sont des sites "en changement". L'étude de la Foncière Liégeoise "Réaffectation économique des sites sidérurgiques désaffectés du bassin liégeois" identifie 8 sites Arcelor, pour un total de 322 ha ».
Cela ne me rassure pas sur la Foncière Liégeoise (un partenariat avec ArcelorMittal).
Je me pose aussi des questions sur le modèle économique de notre Société Provinciale d’Industrialisation basé sur l’expropriation de terres agricoles beaucoup mois chères que la reconversion de ‘brown fields’…
En plus, le PUM laisse complètement de côté la question de l’implantation de zonings dédié à la logistique (ou leur extension) le long d’axes routiers qui frisent déjà la saturation. Idem pour la dégradation du taux d’emploi dans les anciens zonings, où les pouvoirs publics n’ont plus la maîtrise une fois le premier occupant a fermé (l’exemple le plus flagrant est Monsin, ou encoreles zones 1 et 2 des Hauts Sarts).
Et, pour finir, il n’y a pas la moindre remise en question du principe du zonage : les entreprises utilisant la matière grise auraient parfaitement leur place au sein ou en bordure des zones d’habitat. Idem du principe de ‘parc industriel’ avec leurs pelouses démesurées (cfr les surfaces non bâties.

PERSPECTIVES POUR L’HABITAT

Le PUM constate que les nouveaux logements se répartissent principalement en deuxième couronne où la disponibilité foncière est encore de + de 3.600 ha, soit une capacité d’accueil d’environ 51.000 habitants avec les densités actuelles, soit une capacité de 23.000 logements. Ce scénario « fil de l’eau » peut continuer naturellement et s’accentuera d’autant plus que la disponibilité foncière en 1ère couronne et sur Liège est réduite.
Le PUM préconise un SCÉNARIO "RE-EQUILIBRAGE" où les 45.000 nouveaux logements estimés sont répartis de manière égale (1/3) entre Liège, la première et la deuxième couronne.
Ce qui veut dire que la ville de Liège doit doubler son nombre de nouveaux logements par an, soit 885 pour arriver à un scénario volontariste (p. 57).
Une politique des noyaux  existants (p.49) vise à
- Diminuer l’étalement urbain (restreindre fortement l’emprise des nouveaux projets sur les terres agricoles);
- Intensifier le territoire (urbanisation et diversification fonctionnelle) à proximité des services et transports en commun en y encourageant les projets (par ex. politiques d’incitation aux investissements privés);
- Réhabiliter les friches avec la mise en place d’outils efficaces adaptés;
- Réhabiliter le bâti ancien à travers une réflexion sur les outils et les incitants existants ou à créer;
Il est judicieux d’intégrer ces enjeux dans une réflexion de mobilité. Mais malheureusement on retombe dans les procédés éculés de PPP : politiques d’incitation aux investissements privés ; incitants existants ou à créer.
Le PUM préconise une stratégie de logement (p.50) basé sur des Partenariats Public-Privé (PPP) : « Favoriser une mixité sociale dans les noyaux (soit via des charges d’urbanisme, soit via des processus de partenariat public-privé optimalisant les fonciers publics) ; développer, de façon équilibrée, les logements publics dans les noyaux (via une rationalisation du foncier des SLSP) ».
Optimaliser les fonciers publics, rationaliser le foncier des SLSP : pour moi, ça annonce un bradage
du foncier public, au profit de promoteurs privés. Dans des villes comme Herstal on utilise déjà massivement les maigres ressources de sa société de logement en soutien aux promoteurs privés : En février 2018 la SRL annonce qu’elle va prendre en gestion locative 11 appartements en cours de construction place des Demoiselles ; 4 logements rue Docteur Schweitzer, sur un terrain aliéné par la SRL La SRL s’était engagé à acquérir 50 logements locatifs au Pré Madame (ancien site de la FN). mais le promoteur est tombé en faillite (La Meuse – 17 fév. 2018).  Et je termine avec la Rue des Perdrix, 12 nouveaux logements destinées à la vente. « Sur base d'une formule nouvelle en Wallonie, nous allons démembrer la propriété », précise François Vergniole, directeur-gérant de la S.R.L. « On va donc vendre la brique tout en restant propriétaire du terrain ».

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