mardi 24 juillet 2018

La rénovation de la place Gilles Gerard à Vottem : grâce à la mobilisation, et malgré le déficit démocratique, la Ville a promis de publier les plans


Une centaine de personnes à la réunion d’information du 11 juillet sur la Place Gilles Gérard à Vottem. La première réunion d’information depuis le lancement du projet en 2015. Deux jours APRES le vote au conseil communal et à quelques jours avant l’envoi du permis d’urbanisme à la Région Wallonne qui pourrait subsidier à 50%. Un baromètre du déficit démocratique !
En plus, les instances censées s’occuper de l’aménagement du territoire ont été laissés complètement hors du coup. Le sujet n’a pas été une fois sur l’ordre du jour du Conseil D’Aménagement du territoire (CCATM). Je compte interpeller là-dessus lors de la réunion du 30 juillet.
Et ça vaudrait la peine d’instaurer une commission d’enquête (si, si !) sur le fonctionnement du ‘bras immobilier’ de la Ville, Urbéo, dans cette affaire. Pourtant, en 2015, Urbéo avait été désigné chef de file du projet !
Et encore : toute l’affaire serait peut-être passée comme une lettre à la poste si je n’étais pas tombé sur le site du bureau d’architectes De Ceuster qui reprend (en très basse résolution) le projet pour la place.
Selon notre maire, beaucoup de choses non liés au permis peuvent encore être modifiées. Autrement dit : l’emplacement des bacs à fleurs et la couleur de l’éclairage. Toute modification importante devra passer par une modification du permis.

Une victoire de la mobilisation

Ceci dit, le fait que la Ville a dû organiser cette réunion est le fruit de la mobilisation. 581 signatures ont été remises au bourgmestre. Et le PTB avait distribué 1500 tracts, sur base d’une marche exploratoire sur et autour de la place.
Une autre retombée positive est que la Ville accepte enfin de rendre public les plans ; on ne sait pas sous quelle forme, mais en tout cas plus lisible que les dessins à très basse résolution publié sur le site d’un des bureaux d’architectes impliqué dans les études préparatoires (200.000€).
La Ville a même promis de publier une traduction ‘certifiée’ du rapport des Dear Hunters, ce couple d’architectes qui a observé pendant un mois la place à partir d’un conteneur. Ce rapport qui avait été mis sur internet par les auteurs avait été retiré à la demande de la Ville.
La Ville a aussi demandé une étude sur les implantations commerciales, avec une attention spéciale pour la Place Gilles Gérard. Là aussi il faut rendre public cette étude, parce que la problématique des magasins de proximité est au cœur du dossier..
Bref, les gens préoccupés par le sort du cœur de leur village pourront enfin discuter en connaissance de cause. Et si la population juge que le projet qui est sur la table doit être modifié, la Ville n’a qu’à introduire des modifications de permis. Cette intervention est comme une opération à cœur ouvert. Vottem a en tête la Place Jean Jaurès au centre de Herstal. Il faut se donner les moyens de combler ce déficit démocratique !
Il doit y avoir peu de gens qui contestent la volonté de changer le caractère de parking de la Place Gilles Gérard à Vottem. Il y a deux aspects là-dedans, qui ne s’excluent d’ailleurs pas : convaincre les utilisateurs de la place d’organiser autrement leurs déplacements ; et chercher d’autres places pour ces bagnoles. Selon les chercheurs des Dear Hunters, la solution est déjà trouvée : lors du sympathique marché de mardi, quand toute la place est occupée par les étals, les gens trouvent où se garer. Il y a plein de possibilités de se garer dans les environs de la place.
Ce que nos Dear Hunters n’ont pas vu, c’est que les jours du marché le pittoresque Clos du Val et les rues environnantes sont envahies par les voitures.

A Herstal 40% des gens n’ont PAS de voiture.

Le problème soulevé le plus souvent est la mobilité. Et quand on dit mobilité on pense spontanément aux bagnoles. On oublie trop souvent qu’à Herstal 40% des gens n’ont PAS de voiture. Pour qui la première question est comment trouver au centre du village tout ce qu’il leur faut ? La nécessité de commerces et de services de proximité, c’est d’abord eux. A-t-on intégré les commerces de proximité dans l’étude payée par la Ville sur les implantations commerciales ?
Et ensuite, il y a la cohabitation entre chauffeurs et piétons (en anglais : car people et foot people ; attention : ce sont souvent les mêmes personnes, même si on dirait que certaines changent de personnalité en prenant le volant).
Or, selon notre maire, à part le double sens sur le tronçon entre l’église et le cercle paroissial les autres problèmes de mobilité soulevés sont hors projet. Sous-entendu : le plan qui est sur la table ne préjuge en rien des modifications éventuelles à la mise en sens unique de la rue Vandervelde, par exemple. Ou d’autres arrangements pour le dépose-enfants devant les écoles.
Ce qui est un peu court : si on y élargit les trottoirs dans la rue Vandervelde on est obligé d’instaurer un sens unique. Là aussi le réaménagement de la place détermine largement la mobilité dans les rues environnantes.
Mais surtout, il n’y  a pas que ce double sens entre l’église et le cercle. C’est ma cama Chantal Grailet qui l’a soulevé : il y a tout l’aménagement de ce que j’appelle le parvis devant l’église. Il a déjà disparu dans l’aménagement actuel, mais, selon les Chers Chasseurs (le couple d’urbanistes de Dear Hunters) le parvis (inexistant) est aujourd’hui un lieu de rencontre, même si cela se passe au milieu de la rue. Et c’est logique : où veux-tu que les gens se retrouvent avant et après la messe, à moins de les faire sortir par la sacristie. Et quand il y a une fête au Cercle les gens se retrouvent devant les marches de l’entrée, sur un trottoir pas très large. Des fêtes au Cercle (ou L’Equipe) « associées la plupart du temps avec la consommation de sérieuses quantités d’alcool, tout en reprenant sa voiture ». Cette remarque est sur le compte des Dear Hunters sans doute moins habitués à voir des gens qui reprennent la voiture après avoir consommé des sérieuses quantités d’alcool…
Aujourd’hui les fêtard (et paroissiens) doivent faire attention aux bus et aux quelques rares voitures qui viennent de la gauche. Demain les bagnoles viendront de toutes les directions. Avec le plan De Ceuster, il y a des bagnoles qui devront se croiser sur ce parvis et la situation deviendra beaucoup plus compliquée. Faut-il prévoir un rond point, ou l’aménagement d’un parvis qui mérite le nom ? Je n’ai pas la solution, si ce n’est qu’elle est dans la tête des usagers de cet espace, et ces solutions remonteront en surface dans une démarche participative….
Les Dear Hunters constatent que presque tous les usagers de la place et ses fonctions tout autour arrivent et partent en voiture. Selon eux, si les rues autour de la place ne sont pas prises en compte dans la rénovation de la place, cette situation ne changera pas : l’utilisateur dominant restera la voiture, même si elle sera garée hors vue ; elle restera un utilisateur lourdement présent de la place. C’est ainsi qu’un habitant de la rue de la Plope craint à juste titre un transfert de parking dans cette rue. Et un autre constate qu’avec le projet il n’aura plus de sortie pour l’espace entre sa maison et celui du voisin…

La mobilité douce.

Une autre piste est que les gens s’organisent autrement, en  combinant des modes de transport.
Mais on peut se demander où est la mobilité douce dans le plan qui est actuellement sur la table, à part quelques anneaux pour attacher les vélos (et ajoutés après coup)?
Les deux chercheurs des Dear Hunters ont pourtant développé des pistes plus qu’intéressantes. Ils ont constaté que les sentiers à Vottem offrent des possibilités intéressantes pour cyclistes et piétons. Ils suggèrent d’intégrer le Clos du Val, cette liaison entre la place et le Ravel, dans les plans de rénovation. Ils avertissent, à mon avis à juste titre, contre le danger de faire du Clos du Val un annexe du parking prévu derrière l’ancienne maison communale. On peut craindre que le premier choix de  l’automobiliste à la recherche d’une place où se garer deviendra le Clos du Val. Ils suggèrent un aménagement qui fait comprendre clairement à l’automobiliste qu’il rentre dans une zone de rencontre, où piétons, riverains et enfants de l’école sont les rois.
clos du val
On pourrait même envisager de renforcer les liens avec les terrils de la Batterie qui sont d’ailleurs déjà utilisés par des cyclistes et joggeurs. Il y a un paquet d’autres sentiers, des passages étroits entre maisons, jardins ou prairies. Parfois un peu embroussaillés, parfois bien entretenus. Malheureusement cela reste aléatoire puisqu’ils ne sont pas reliés entre eux. On pourrait les connecter, parfois en prenant des rues existantes qui aujourd’hui semblent faits pour la voiture. Si ces rues seraient conçues de manière à être agréable au piéton et cyclistes, on aurait tout un maillage de routes, parfois courtes, parfois longues, qui créeraient une ouverture sur les larges zones naturelles autour de Vottem avec la place au centre.

Actualiser le nouvel Atlas de la voirie communale

La rénovation de la place aurait pu être une bonne occasion d’actualiser le nouvel Atlas de la voirie communale, avec l’abrogation la loi de 1841 sur les chemins vicinaux, dans une démarche participative.
La Déclaration de politique régionale 2009-2014 prévoyait «  un nouvel Atlas de la voirie communale, adapté aux exigences de la mobilité intra- et intercommunale et, en particulier, à la mobilité lente. Il abrogera la loi de 1841 sur les chemins vicinaux et ses arrêtés d’exécution ».
Un nouveau décret organisant la voirie est entré en vigueur le 6/2/2014.
En 2016 17 communes-pilotes sont censées définir la méthodologie d’inventaire et d’actualisation applicable à l’ensemble des communes wallonnes. Herstal n’est pas pilote, et je n’ai pas l’impression que ces 17 autres communes avancent beaucoup depuis 2016. Mais cela est pour moi une raison supplémentaire pour relancer la dynamique! Voici le maillage des sentiers en 1841. Evidemment, la situation a changé. Les sentiers étaient vitaux à l’époque où les gens se déplaçaient à pied. Mais d’abord cet Atlas reste la référence de base juridique. Cette actualisation n’est pas une lubie pour des fanas des sentiers. C’est une nécessité.  On aurait pu – et on peut toujours- intégrer cette actualisation dans les projets de rénovation de la place. 

La multimodalité

Dans l’évolution vers une autre utilisation de la voiture, il y a la multimodalité (combiner voiture, transport public, vélo, à pied). Aujourd’hui la place est utilisée dans ce sens. Les gens arrivent en voiture, pour quelques achats, pour le Ravel, une fête au Cercle ou L’Equipe, mais aussi pour prendre le bus pour Liège. La fréquence des bus vers Liège est plus qu’intéressante. Un Park + Ride avant la lettre.
Or, il y aura très bientôt un P+R au bout de l’autoroute. Apparemment on a un arrangement avec le TEC pour prolonger des lignes 24 et 71 jusqu’au P+R. En compensation on diminue les fréquences de 8 à 6 bus à l’heure. Rien ne changerait pour la ligne 124.
A première vue, pourquoi ne pas inciter les gens à se mettre sur un vrai P+R, celui qu'on aménage actuellement au bout de l'autoroute, en y installant le terminus? Ce terminus sur la place n’a presque que des inconvénients : pollution sonore, gaz d’échappement etc. Mais les Dear Hunters mentionnent un effet secondaire et positif : le contrôle social. Il y a toujours au moins une personne sur la place : le chauffeur de bus qui attend son heure de départ. Entre 5h50 à 23h50 il y a fondamentalement toujours au moins une paire d’yeux sur la rue, ce qui inconsciemment ajoute un certain sentiment de sécurité. Le bourgmestre va renseigner auprès de sa police sur le nombre d’appels provenant des chauffeurs de bus. A mon avis, la réponse sera négative : le chauffeur contactera sa centrale qui éventuellement transfèrera l’alerte.
p+r E313 ill. Le Soir
Mais estimer l’effet du contrôle social à partir du nombre d’appels vers la police (voire la centrale TEC) est à mon avis un peu court. C’est sous-estimer le contrôle social à partir d’une simple présence humaine. Bien sûr, il y aura toujours quelques asociaux qui déposeront leurs crasses à côté des bulles à verre, voire dans le conteneur d’Oxfam, même si on leur fait la remarque. Mais le contrôle social est une réalité, et la preuve par la négative est les espaces à problèmes là où il n’y a pas de passage. Un problème qui pourrait d’ailleurs se poser pour le nouveau parking derrière la mairie. Un problème qui se pose d’ailleurs pour la place Jaurès au centre, où les mêmes dear hunters ont eu des problèmes avec la faune spéciale qui occupe la place et qui n’aimait pas qu’on espionne leur trafic…
Un autre aspect qui n’a pas été soulevé lors de la réunion publique, est que l’intermodalité amène de la vie sur la place. La Place Saint Lambert a gardé sa vitalité malgré le trou qui est resté béant pendant trente ans. Pourquoi ? Avec le caroussel des bus ! Déplacer le terminus au P+R, c’est certes x voitures ventouses en moins sur la place. Les gens qui vont travailler à Liège peuvent très bien laisser leur engin au P+R. Mais c’est enlever aussi une partie du flux qui fait vivre la place.

Parking ou pas parking : c’est ça la question et la réponse ne saurait être que oui ou non.

A la Place Gilles Gérard il n’y a pas de places marquées, c’est de l’auto-organisation de l’espace et ça marche étonnamment bien. Un des organisateurs de la pétition a compté, lors de la réunion publique du 11 juillet, 85 voitures sur la place.
Attention : sur la Place Jean Jaurès on a limité fortement le nombre de places de parking. Mais comme on n’a pas réussi (voire même essayé) de dévier le flot de bagnoles qui passent par là, on y abandonne la bagnole un peu partout, aussi longtemps qu’elle ne gène pas trop le trafic. S’il y a une leçon à tirer de Herstal-centre, c’est que ou bien le parcage devrait être strictement organisé et surveillé, ou au contraire laissé complètement inorganisé et informel. Une situation entre-deux ne mène qu’à une situation peu claire et frustrante, aussi bien de la part des motorisés que des piétons et cyclistes.
Le plan De Ceuster prévoit une organisation stricte, avec relativement peu de places sur Gilles Gerard même: 27 places (+44 places parking derrière la maison communale et 16 places de parking devant la salle de l’équipe). C’est peu. Est-ce suffisant pour le commerce local, la crèche, la banque et d’autres activités qui ont besoin de stationnement de courte durée ?
Une partie de solution serait de trouver des solutions structurelles pour les gens qui travaillent sur et autour de la place : enseignants, commerçants etc. Comme l’école catholique qui a un parking derrière l’école.
Et puis, Vottem reste un village et les problèmes de parking ne sont pas les mêmes qu’en ville. On a oublié que Herstal reste un faubourg : amener Besix dans le jeu a tué le centre ville. D’ailleurs, ça tracasse aussi les Votemmois. Quelles places (P+R, stationnement temporaire, parking derrière l’hôtel de Ville) seront payantes ?
Voilà ce que m'a inspiré cette réunion très vive sur l'avenir de cette place, coeur du village. S'il faut croire notre bourgmestre, rien n'est figé. On peut toujours modifier: ilnyaka introduire une modification  au permis... Sans sous-estimer la difficulté de créer un large consensus autour d'un projet alternatif, dans un contexte de déficit démocratique, je continue à inciter à lutter pour un projet qui tient mieux compte des besoins des riverains et utilisateurs de la Place. Evitons les erreurs de la Place Jean Jaurès au centre!

Post Scriptum sur le Comte  Joseph-Johann-Franz  de Ferraris

Le Powerpoint qui nous a été présenté à la réunion d’information du 11 juillet sur la Place Gilles Gérard à Vottem commence avec la carte Ferraris de Vottem. Personne n’a demandé quelles conclusions le bureau De Ceuster a tiré de cette carte, et moi non plus. Mais c’est toujours intéressant de plonger un peu dans l’histoire. En 1769 le Comte Joseph-Johann-Franz  de Ferraris, général de l’artillerie du gouvernement autrichien dresse une carte très détaillée de l’ensemble des Pays-Bas autrichiens. 275 feuilles de 91 cm sur 141 cm, avec des informations et explications historiques, géographiques, économiques, sociales et militaires.
C’est ainsi que l’on voit qu’à l’époque l’axe de Voteme est la Chaussée de Tongres. Li grande paveye date de 1740. A moins qu’il s’agit de la Vieille Voie de Tongres (aujourd’hui rue de l’Arbre Sainte Barbe). L’autoroute date de 1964.
L’histoire serait-elle un éternel recommencement ? Le P+R au bout de l’autoroute n’est pas sur les plans de rénovation de la place Gilles Gérard, mais le déplacement des terminus de bus vers ce P+R est évidemment une donnée essentielle dans ce dossier. Et le Aldi fraîchement rénové à côté de ce P+R changera évidemment la donne pour l’avenir du commerce local à Vottem !


Voir aussi http://hachhachhh.blogspot.com/2018/07/marche-exploratoire-vottem.html
et sur l'histoire de Vottem 

http://hachhachhh.blogspot.be/2014/02/la-bataille-de-vottem-de-1346-notre.html

http://hachhachhh.blogspot.be/2011/12/suzanne-gregoire-une-grande-dame.html
Balade-santé à Vottem. Un Ravel, la chaussée Brunehault, le terril de la Batterie et le Bouxhtay >> 

 

 



Aucun commentaire: