Cité Bernimolin- photo Eddy Van Loo |
La balade-santé du mars 2018 est partie de la Rue N. Bernimolin à Grivegnée.
La Chartreuse a pour
moi une longue histoire. Lors de la fête laïque de Raoul nous avons fait une
balade guidée avec un guide nature. Il a réussi à passionner la famille en ne
sortant pas de la dalle en béton à côté du fort. Less is more ! C’est
Goethe qui le disait: in der Beschränkung zeigt sich der Meister, « c'est dans la concision qu'on reconnaît le maître».
Ce qui m’a remis sur
cette piste, c’est la mobilisation du collectif « Un Air de Chartreuse »
contre un projet du promoteur MATEXI
pour « un ensemble de 74 logements
au Thier de la Chartreuse ». 5.000 signatures: la palme de la
mobilisation citoyenne!
J’ai écrit une série
de blogs sur le patrimoine très riche de ce site ; patrimoine menacé par
des projets immobiliers. Avec ma balade j’espère vous faire partager mon
enthousiasme et mes préoccupations pour la sauvegarde de ce patrimoine unique.
http://hachhachhh.blogspot.be/2017/12/chartreuse-une-nebuleuse-autour-de.html
http://hachhachhh.blogspot.be/2017/12/le-patrimoine-religieux-immateriel-et.html
La cité Bernimolin
La Rue (ou la Place) Nicolas Bernimolin d’où l’on part est en fait une
cité, avec beaucoup de charmes. Elle est reprise, à juste titre, dans
l’inventaire du patrimoine immobilier : «Un ensemble
de maisons de style cottage, construites au début du 20e siècle. Alignements de
façades en brique rouge et calcaire, animées par des bandeaux de brique blanche.
Les allèges des baies du rez-de-chaussée sont en grès. Les toitures,
régulièrement agrémentées de pignons en faux pans-de-bois, accentuent l'aspect
pittoresque de l'ensemble ». Je n’ai pas réussi à en savoir plus sur
cette cité qui a bien vieillie et qui est vieillit bien, gérée par une
copropriété. Nicolas
Bernimolin fut le premier échevin socialiste de Grivegnée en 1896.
L'Enclos du Bastion et les tombes des fusillés
La Chartreuse est une
friche militaire. Le Fort que nous
traverserons date de 1817, après la défaite de Napoléon à Waterloo. Son
vainqueur, le Duc de Wellington, voulait une ligne défensive le long de la
frontière française. Il met Guillaume d'Orange à la tête du Royaume-Uni des
Pays-Bas Guillaume qui construit ou reconstruit 18 places fortifiées, dont un
nouveau fort sur le hameau de Péville. Ce fort est, avec le canal de l’Ourthe,
une des rares traces du bref Royaume Uni des Pays-Bas en Belgique.
La guerre franco-allemande
de 1870 sonne le glas des forts bastionnés. Brialmont construit une ceinture
des forts. Suite à ça la Chartreuse est déclassée comme fort en 1891 et servit
de caserne. Sa superficie est réduite de
41 à 31 ha. La prestigieuse avenue de Péville et ses villas sont partiellement
construites à l’emplacement des anciens espaces militaires. À l’est du fort,
une cité de logements sociaux prend place le long de la bien nommée rue des
Fortifications.
Cette friche reste un patrimoine militaire unique. C’est d’ailleurs ce patrimoine-là qui est le plus
menacé aujourd’hui, et où l’intervention des promoteurs immobiliers est la plus
sournoise.
l'Enclos du Bastion et les tombes des fusillés
En rentrant dans le
site, sur notre gauche, le bastion n° 1 a été aménagé en lieu de souvenir :
l'Enclos du Bastion et les tombes des fusillés. En 14-18 les allemands
transféraient les condamnés à mort de Saint Léonard à la Chartreuse pour y être
fusillés.
Dans les années 30, le 11 novembre, toutes les écoles de la ville s'y rendaient en cortège.
tourelle d'angle de la prison Saint-Léonard |
Le Monument du Fusillé
se trouvait au départ sur une tourelle d'angle de la prison Saint-Léonard (photo Philippe
HAMOIR) en hommage à la cinquantaine de résistants du
réseau « La Dame Blanche » fusillés entre 1915 et 1918.
Complété en 1923 par
un relief dû à Oscar BERCHMANS, la stèle fut transférée au bastion de la
Chartreuse à la suite de la démolition de la prison en 1982.
Malheureusement, en 2011,
une imposante plaque de bronze est volée. Il n’y a pas que des promoteurs
immobiliers sans scrupules…
Avant cela, le
Monument du Fusillé avait aussi été la cible d’adeptes de paintball soft-ball. Olivier
Hamal, le président de la société royale Le Bastion des Fusillés de la
Chartreuse, pense tout naturellement « à
des récupérateurs de métaux peu scrupuleux à moins qu’il ne s’agisse de
personnes qui y ont organisé de jeux
paramilitaires et qui ont emporté la plaque en guise de trophée ». Depuis,
un arrêté de police interdit ces jeux paramilitaires sur le site.
Zilliox, un passeur d’hommes
Les tombes aussi ont
d’ailleurs déjà été vandalisées et renversées. Dans les tombes du bastion celle
de Zilliox mériterait un blog à elle toute seule. Avant l'épopée de l'Atlas V
il y a eu l'aventure d'un autre remorqueur, l'Anna, parti du port de Visé. A l’occasion du centième anniversaire du détournement de l’Anna, Visé a donné le nom ‘Joseph Zilliox’ à son port de plaisance. Il y a eu deux films sur le
sujet, un en 1920 qui a disparu et " Passeurs
d’hommes " en 1937 qui existe en DVD.
ill. Médecins de la Grande Guerre |
Le 4 décembre 1916, 42
personnes rejoignent à Visé le
remorqueur Anna en vue de passer en Hollande. Le pilote est Joseph Zilliox, un
batelier alsacien enrôlé contre son gré dans l'armée allemande. Il réussit à
passer, revint en Belgique, entra dans la résistance et finit capturé par
l'ennemi qui le fusille à la Chartreuse. Un mois plus tard le remorqueur Atlas
V suivra la même voie. Corentin Le Borgne, économe des Oblats français prétend avoir
‘acheté’ le pilote boche de l'Atlas V. Ces Oblats, dont nous arpenterons plus loin
le parc, avaient été expulsés de France en 1903, comme les autres congrégations
prédicantes. Voir http://hachhachhh.blogspot.be/2017/12/la-chartreuse-et-son-patrimoine.html
Comme tous les jeunes
Alsaciens et Mosellans, sujets allemands depuis l’annexion de l’Alsace en1870,
Zilliox fut mobilisé dans l’armée du Kaiser et blessé en Argonne. Il fut reclassé
à Liège en 1916 au « Hafenamt »,
le bureau allemand du port. C’est là qu’il s’engage dans un trafic d’hommes et
de marchandises à travers la ligne électrifiée entre la Belgique occupée et la
Hollande neutre.
L’histoire de l'Anna
de Zilliox est raconté dans « Un héros
alsacien, Joseph Zilliox », par Emile Fauquenot, dans les Annales
Patriotiques. Fauquenot travaillait pour le réseau de La Dame Blanche de Dewé, le
Corps d’Observation Anglais et le 2ième bureau français. C’est en
prison qu’il connut
Zilliox. Il réussit à rester en communication avec Dewé, avec le concours de soeur Mélanie des Filles de la
Croix et d’un gardien. Grâce à l'aide de Dewé et de Juliette Delruelle, fille
du directeur de la prison, Fauquenot s’ évade de la prison le 28 mars
1918.
Après la guerre, il épousera Marie Birckel, une autre recrue du 2e bureau emprisonnée à Saint Léonard. En 1940,
ils sont au Liban, où Fauquenot est ambassadeur de Charles de Gaulle.
A mon avis, le gros
des récits sur les prisonniers de Saint-Léonard proviennent de cette source. Faquenot
avait l’imagination fertile, et a sûrement publié aussi dans un esprit de
propagande pour la cause alliée. ‘Poor
Litle Belgium’ voulait prouver qu’il y avait aussi de la résistance dans
le pays occupé, et pas seulement derrière l’Yser; et la France voulait prouver
que les alsaciens ont été incorporés dans l’armée allemande contre leur gré. Ce qui explique que les histoires très
‘embellies’ bourrées d’invraisemblances de Fauquenot ont connu un succès
considérable
Dewé survivra à la
première guerre. Il reconstruit un réseau en 1940, rentre dans la clandestinité
en 1941, et sera abattu en 1944 lors d’une rafle par un officier allemand de la
Luftwaffe qui tire sur ce qu’il pense être un civil aux abois qui refusait
d'obtempérer à son ordre de s'arrêter. L'officier est pris à partie par les
Gestapistes qui lui reprochent de les avoir privés de pouvoir interroger celui
dont ils ignorent l'identité. Dewé et son réseau Clarence aura sa stèle en
2000.
Les casernes et urbex
Jusqu'aux années 60,
Liège a été une ville de garnison, avec des milliers de ploucs qui ont dévalé
Pierreuse et le Thier de la Chartreuse pour se rendre, chaque soir durant
quelques heures, dans la Cité ardente. Les casernes sur notre gauche datent de
1939 et de1955, une architecture fonctionnelle avec leur structure en béton
armé, toits plats, parements en brique orange, larges baies horizontales. Selon
Les Cahiers de l’Urbanisme de décembre 2007 des perspectives existaient pour
leur reconversion. L’espoir fait vivre.
En attendant ces bâtiments sont devenues un haut lieu de l’urbex, remplies de
grafs et de tags jusqu’au dernier étage.
D’autres grafs plus
anciens retracent la vie quotidienne du "plouc" comme on appelait ces
soldats d'infanterie. Un soldat au 123ttr en 69, barman au mess sous of et
coiffeur, signale que son nom est inscrit sur le mur du cachot a côté de Roger Claessen et Nico Dewalque. En 2015 cette légende du Standard se retrouve de nouveau sous les verrous, à 70 ans, pour faillite
frauduleuse, faux et usage de faux et fraude à la TVA. Les cachots se
trouvaient a l'entrée près du corps de garde.
L’enceinte pentagonale bastionnée de Wellington
Dans l’ enceinte
pentagonale dont les étages sont du début du XXième siècle nous trouvons "Rauchen verboten!" sur les murs, des graffitis et des fresques peintes dans les casemates par
les militaires au début du siècle.
Il y a aussi quelque
part l’enseigne du " 28th General
Hospital US Army" qui remonte à l’offensive Von Rundstedt.
Voici une description du cœur historique en jargon militaire : « une enceinte pentagonale bastionnée
protégeait le bastion de gorge formant réduit, lequel contenait le cavalier et
sa caserne, formé de trois ailes en arc s’appuyant sur ses faces. C’est lui qui
constitue les deux premiers niveaux du casernement que nous connaissons. Sur la
terrasse prenaient place des pièces d’artillerie ».
En 1817, après la
défaite de Napoléon à Waterloo, le Duc de Wellington, son vainqueur, préconise une
ligne défensive le long de la frontière française. C’est les français qui
paieront. Wellington trouve même un roi pour s’en occuper : Guillaume
d'Orange est mis à la tête du Royaume-Uni des Pays-Bas créé au congrès de
Vienne. En 1815, Guillaume avait été à la tête de l'armée néerlandaise aux
Quatre-Bras et à Waterloo.
De 1816 à 1825, des
ingénieurs hollandais ont construit ou reconstruit 18 places fortifiées, dont un
nouveau fort sur le hameau de Péville. Le fort a son talon d’Achilles: en
1821 un rapport dit que l’on « n'a
pu fermer le fort à cause de la grand route qui traverse le fort, au lieu de
cela on a porté tous les murs du rempart capital à la hauteur de 30 pieds".
L’enceinte extérieure que nous verrons en
fin de balade est parcourue par une galerie voûtée d’une épaisseur de 2 m
permettant l'accès aux saillants.
Ce pentagone est le
plus intéressant point de vue patrimonial. C’est une des rares traces du
Royaume Uni des Pays-Bas visibles en Belgique encore aujourd’hui. Guillaume a
évidemment l’excuse que son Royaume Uni n’a tenu que quinze ans…
La Chartreuse est déclassée comme fort en 1891
dessin David Ross |
C’est cette partie du
fort que le Rapport Urbanistique de 2008 proposait de sauvegarder. Malheureusement
ce document qui oriente l’urbanisation de la ZACC de la Chartreuse ne donne que
des orientations dont il est trop facile de s’écarter. C’est pourquoi Un Air de
Chartreuse demande un RUE nouveau, ou plutôt un SOL (Schéma d’Orientation
Locale), pour reprendre la nouvelle terminologie du Code du Développement
Territorial qui devrait être contraignant.
L’année avant la RUE, les
Cahiers de l’Urbanisme avaient déjà
averti que la réhabilitation du fort hollandais n’était pas rentable et qu’il
fallait donc assurer cette réhabilitation en imposant des contraintes aux
promoteurs. « la réhabilitation du fort hollandais est compliquée par son
architecture, en particulier par la juxtaposition de longues pièces voûtées de
24 m de profondeur. Comment respecter le bâtiment tout en permettant un
éclairage suffisant des locaux ? Quelle affectation leur donner ? La
réhabilitation du fort hollandais n’est pas rentable. Le classement comme site
impose des contraintes mais n’offre pas de subsides. L’état de friche du site
impose une opération d’ensemble coordonnée. Il est en effet impossible de
vendre un immeuble réhabilité à côté d’un immeuble en ruine. Cela signifie
développer simultanément de l’ordre de 300 logements, ce qui n’est pas
possible sans envisager une diversité de
l’offre de logements, voire sans
introduire d’autres fonctions sur le site. La rénovation du fort hollandais est
l’objectif premier pour les pouvoirs publics. Mais comment éviter que cette
phase non rentable ne soit reléguée après toutes les autres, avec le risque de
ne jamais être réalisée? La division en lots compliquait singulièrement la
possibilité d’amortir la réhabilitation du fort, déficitaire, sur une opération
d’ensemble plus vaste ».
Plus de détails sur
l’évolution architecturale du fort http://chartreuse-liege.be/wp-content/uploads/2017/10/Cahier-urbanisme.pdf
p .82
Entrée du fort et les monuments au Génie et aux 1er et 12ième de Ligne
Les deux niveaux du fort hollandais ont été exhaussés pour loger plus de militaires. Sur les étages au dessus il est marqué LIEGE, ANVERS, DIXMUDE, YSER, MERCKEM, STADENBERG et LA LYS, les champs de bataille du 12ème de Ligne qui a logé ici.
Sur le patrimoine
militaire plus dans mon blog http://hachhachhh.blogspot.be/2017/12/la-chartreuse-et-son-patrimoine_23.html
Au dessus de la
poterne d’entrée ‘Nihil intentatum
relinquit virtus’ (le courage ne laisse rien qu’il n’ait tenté. C’est une
phrase de Sénèque, ‘de la Bienfaisance
‘. Le monument aux 1er et 21e de Ligne (classé) est installé en 1932 par des amicales d’anciens. De Soete, Pierre en est le sculpteur, Van Nieuwenhuyse l'architecte, avec Rouselle. Ces deux régiments de ligne remontent à l’indépendance
belge, en 1831. En 1913, lors de la mobilisation, comme tous les régiments de
ligne d'active, ils se dédoublent ; un peu comme l’amalgame pratiqué lors
de la révolution française. Ils prennent
part à la bataille de l'Yser. Lors de l’offensive finale en septembre 1918, le 12e de Ligne s’emparera duSTADENBERG. Les citations sont reprises sur son drapeau et sur leur caserne en
temps de paix, la Chartreuse. Les régiments sont remobilisés
en août 1939. En 1940 après la campagne des 18 jours et la capitulation, les
régiments sont de facto dissous.
Le parc des Oblats
Nous entrons dans le
Parc des Oblats par le monument au Génie (non classé).
La grotte, une 'fabrique' au parc du Casino |
Le parc fut aménagé au 19ième siècle en parc d’agrément à un casino racheté, après-guerre, par les Oblats pour en faire une maison de formation internationale. L’actuelle église St-Lambert, fermée au public en 2010 pour des raisons de sécurité, faisait partie du couvent. En 2017, faute de moyens, la congrégation des missionnaires oblats a vendu à une communauté protestante qui envisage une restauration.
En 1988 l'ASBL Parc
des Oblats propose de créer un
établissement d'utilité publique «Fondation
Chartreuse-Oblats», qui aurait acquis le site. Faute d’atteindre cet
objectif élevé, elle a acquis l'arvô et a fait des travaux de sauvegarde avec
l'aide de la Fondation Roi Baudouin et de la Région wallonne. L'arvô donne sur
une réserve éducative. En wallon
liégeois, un arvô est un passage voûté.
En 2010 le fort et le parc sont reconnus comme Site de Grand Intérêt Biologique
(SGIB). Un projet européen “Value Added”
a permis l’aménagement de trois sentiers balisés en 2013. Les 350.000 euros ont
été focalisés sur les entrées, la restauration de la grotte et l’aménagement de
la dalle jouxtant la lande aux aubépines, avec notamment des équipements
sportifs et des gradins permettant l’organisation de petits événements.
Le couvent de la Chartreuse
A côté de l’occupation militaire le site a eu aussi une
occupation religieuse très riche, avec – pour commencer - les Chartreux qui ont
donné leur nom au site. Nous descendons la rue de la Charité pour admirer
les beaux restes.
Les Chartreux n’étaient
pas les premiers: avant eux il y a eu les Prémontrés.
En 1357, le prince
évêque Engelbert III de La Marck offre le site aux Chartreux. Le monastère est
souvent occupé militairement. Dans les périodes de calme, les moines
reviennent. Vers 1700, après la guerre de succession, le couvent connaît un
nouvel essor. La gravure de 1738 de REMACLE LE LOUP a comme titre : ‘plan et élévation de la. chartreuse comme
elle sera achevée’.
En 1797, la République
vend les biens du couvent au citoyen Lecoulteux-Canteleu qui fait démolir
l’église pour vendre les matériaux. La famille est
une des plus grandes fortunes de l'époque.
Sur le patrimoine
religieux plus dans mon blog http://hachhachhh.blogspot.be/2017/12/la-chartreuse-et-son-patrimoine.html.
Barthélémy-Alphonse Lecoulteux se lance aussi dans
une exploitation charbonnière. Le préfet de l’Ourthe lui octroie en 1801 la
concession de toutes les mines de la Chartreuse pour 50 ans, une surface de 12
km2. C’est une superficie énorme pour l’époque. Et c’est aussi la toute
première concession charbonnière en Belgique.
Plus dans
mon blog sur le patrimoine minier
de la Chartreuse. http://hachhachhh.blogspot.be/2017/12/le-patrimoine-minier-de-la-chartreuse.html
Pour le Couvent de la
Chartreuse, les affaires s’arrêtent pour Lecoulteux avec
la vente des matériaux. En 1820, les
frères Begasse y installent leur fabrique
de couvertures, qui déménageront à Sclessin (les couvertures Sole Moi qui
deviennent en 2001 Nordifa.
Les Petites sœurs des pauvres et le Front Commun SDF
En 1829 s’y installe une maison de santé, jusqu’en 1853, quand la communauté de Petites sœurs des pauvres y accueille de 1853 à 2003 jusqu’à 250 vieillards (Lily Portugaels,Les Petites sœurs des pauvres à Liège 19/10/2009 La Libre Belgique).
En septembre 2003,
avec le départ des Petites Sœurs, on commence à se tracasser pour le site avec
sa ferme classée (toiture et façades)
des XVIe et XVIIe et le bâtiment principal avec 160 chambres, avec un très beau
couloir du XVIIe siècle (non classé), qui comporte une trentaine de travées et
neuf encadrements de portes - jadis des cellules des moines chartreux.
En novembre 2003 l'ancienne chartreuse est vendue pour 1,5 million d'euros au groupe immobilier Coenen spécialisé dans le
"temporary housing". Quatre ans plus tard, lorsque les autorités veulent
procéder à des travaux de sécurisation, on découvre que la société anversoise
Copabe en est devenu propriétaire, et est en faillite. Le 10 mai 2007 le
bourgmestre signe un arrêté d'inhabitabilité pour raison de sécurité. Les 60 locataires
des petits appartements qui se louent entre 250 et 350 euros sont sommés de
quitter les lieux. Le Front commun SDF prend leur défense. On envisage même de
‘reloger’ les habitants mis à la rue au hall du parc Astrid (La Libre Belgique 26 juil.
2007).
Je n’ai pas réussi à reconstituer
la suite de ces expulsions. Toujours est-il que c’est un argument massue pour
inclure du logement social sur le site, ne fût-ce pour compenser la perte de la
bonne centaine de logements à loyer réduit de cette maison de repos des Petites
Sœurs. Liège manque cruellement de logements publics et sociaux.
Le maison de repos et de soins et son immense parking de béton.
Fulvia - photo Rafik Rassaa |
Ca prend 6 ans au
Monument Real Estate NV & Vulpia Real Estate pour transformer ce site
délabré en un centre de soins ultra moderne. Le nouveau complexe est relié au
couvent par un couloir voûté
avec les médaillons des abbés successifs.
Ils n’y vont pas de
main morte par rapport au permis d’urbanisme. Benoît Mahaux, un riverain, est
allé trouver les 89 riverains qui ont un mur mitoyen avec l’ancien couvent avec
une pétition : « Quand nous avons
acheté cette ancienne ferme au Thier de la Chartreuse, le cadre était
champêtre. Aujourd’hui, à la place d’un beau pré, nous avons un immense parking
de béton. Il devait y avoir de simples
voiries dans le champ en face de chez nous et les servitudes des voisins
devaient être respectées. Au lieu de cela, nous avons un vaste parking qui ne
sert à rien et qui est éclairé en permanence durant la nuit. Et la voirie
devant chez nous est descendue de 48 cm pour moi et d’un mètre chez mon voisin
! » Suite à leurs plaintes, le promoteur flamand doit demander un permis de
régularisation qui est soumis à l’enquête publique. Du côté de la Ville, on
reconnaît que l’infraction au permis d’urbanisme initial est bien réelle. Selon Jean-Pierre Hupkens, l’échevin de
l’Urbanisme, « le promoteur devra
remettre en état son parking selon le premier permis. » Et s’il ne le fait pas
? « Nous introduirons le dossier au parquet et il y sera obligé par la force.
» (Sud Presse 5
janvier 2016 ). En mai 2016 cette régularisation n’est toujours pas là et on peut même se
demander si une dérogation est possible. Cela ne freine pas l'Integrale à racheter pour 22 millions d’euro le domaine et l’ancien monastère. Je rappelle le prix
payé en 2003 par Coenen : 1.5 millions ! Vulpia Belgique continue la gestion. La firme gérait fin 2016
4000 lits.
Pourtant, Vulpia a un
certain palmarès de restauration, avec d’ailleurs encore une Chartreuse, le
Kartuizersite à Sint-Martens-Lierde. Mais là aussi il y a eu une forte contestation
pour des raisons urbanistiques.
On ira voir la ferme
restaurée, et l’entrée de l’areine du photographe Benoit Mahaux.
Le Carmel
En dessous du couvent,
les clarisses du monastère de «Hannut-Bujumbura». Ou plutôt Hannut- Bujumbura et retour. En 1962, les sœurs Marie-Françoise, Marie-Agnès
et la sœur d’origine burundaise Claire-Marie de la communauté de Hannut fondent
une filiale au Burundi. Une histoire très mouvementée. En 2002 plusieurs
clarisses reviennent au monastère fondateur de Hannut.
Les Clarisses
remplacent le Carmel qui s’était installée en 1860 dans le sanctuaire de sainte
Julienne de Cornillon en 1860. Pour
Sainte Julienne je vous envoie à mon blog http://hachhachhh.blogspot.be/2017/12/le-patrimoine-religieux-immateriel-et.html
Après 157 années de
présence contemplative, place donc aux Clarisses: trop de différences d’âges et
de soucis de santé, combinés à un manque de vocations.
Le sanctuaire compte
développer un nouveau béguinage contemporain, un projet immobilier qui « va contribuer à la revitalisation des
quartiers d’Amercoeur et de la Chartreuse ». Le futur sanctuaire aura
trois pôles : monastère, sanctuaire ouvert et pèlerinage qui réfèrent aux
fondamentaux de l’époque de sainte Julienne : 1’Eglise, la léproserie, accueil
des pauvres, et agriculture et boverie.
Une petite hôtellerie de 4 chambres accueillera les pèlerins du chemin de saint
Jacques de Compostelle. Le pôle « béguinage
contemporain » accueillera 18 laïcs répartis dans huit unités autonomes de
logement.
Il est vrai que Liège
est un berceau des béguinages, avec leur curé Lambert le Bègue. Les Clarisses
savent-elles que
ce curé des béguinages a été condamné en 1177 comme
hérétique par le concile de Venise parce qu’il préconisait la pauvreté dans
l’Eglise ?
L’araine des Petites Sœurs des Pauvres
photo F. Muller |
Un mot sur l’araine
dite des Petites Sœurs des Pauvres qui sert encore à la ferme de l’ancien
couvent, restaurée par Benoît Mahaux à la base de la pétition de 2016. Elle est
longue de 200m. et haute d’un mètre et demi. Voir mon blog sur le patrimoine
minier http://hachhachhh.blogspot.be/2017/12/le-patrimoine-minier-de-la-chartreuse.html
Une topographie de
l’araine a été dressée en décembre 2003 par P Demoulin et P. Xhaard (GRSC)
Les Bastions
Nous repassons devant
l’entrée pour contourner le fort côté bastions. Le site de Cornillon a été
fortifié depuis que la ville existe. C’est géopolitique. Le vénérable Thier de
la Chartreuse http://laruesoubre.skynetblogs.be/archive/2006/05/07/l-arvo-et-le-site-de-la-chartreuse.html fut longtemps le "Grand chemin" ou "Chemin
royal" qui a passé au milieu du
fort jusqu’à le détournement en 1817.
Il faudrait que je
replonge dans Clausewitz pour comprendre le pourquoi de ces bastions, qui n’ont
jamais connus l’épreuve du feu. En attendant, c’est un bel espace vert. Ce
texte de 1701, "un projet des
ouvrages à faire à La Chartreuse", d’un certain De la Combe inspirera
peut-être un architecte-
paysagiste ou un jardinier: "Je ne voy rien de mieux que de rétablir de terre cette enceinte comme
elle étoit auparavant, gazonner extérieurement tout le corps de place bastionné
comme il est. Il faut que le gazonnage
commence du fond du fossé attendu qu'il n'y avoit qu'une très petite berne
auparavant qui ne paroit presque plus, que ce gazonnage soit élevé jusqu'à la
fraize de la hauteur de 17 pieds et audessus de la fraize de trois pieds. Il
est nécessaire que les parapets soient gazonnez intérieurement, bien fraizer
tout ce corps de place a planter un epalissage panchée dans le fossé a 3 pieds
près du gazonnage ». Je ne saisis pas très bien ce qu’il veut dire
avec ‘fraizer tout ce corps de place’,
mais pour ce qui concerne ‘gazonner’,
on pourrait s’inspirer de nos amis bataves qui ont mis en valeur de manière
très verte un patrimoine militaire de la même époque, en Zélande.
redoute gazonnée en Zéelande |
Sources
R. Dumoulin Si Grivegnée
m’était conté Noir Dessin productions
L’histoire de l'Anna de Zilliox est raconté dans « Un héros alsacien, Joseph Zilliox », par E. Fauquenot, collection des Annales Patriotiques n° 2, Paris, Desclée De Brouwer & Cie, 30, rue St- Sulpice ».
Emile Fauquenot était
un agent travaillant pour le Corps d’Observation Anglais et c’est en prison
qu’il connut Zilliox. Il réussit à faire passer des messages au dehors et ainsi
à éviter d’autres arrestations. Il finit par s’évader.
http://www.1914-1918.be/civil_walthere_dewe.php
Dewé restera en communication avec le Français Emile Fauquenot
http://www.lunion.fr/21258/article/2017-03-18/chemin-des-dames-ces-femmes-qui-ont-fait-la-guerre
Marie Birckel a rencontré son époux Emile Fauquenot lors de son séjour en
prison à Liège. Elle travaillait pour le 2e bureau français. Et pour un réseau
La Dame blanche. Elle est arrêtée et emprisonnée à Liège. C’est là qu’elle
rencontrera Émile Fauquenot, le responsable de son réseau de renseignements. Le
26 juillet, 1918, elle passe devant le conseil de guerre allemand de Liège.
Proposée pour la peine de mort, elle est condamnée finalement aux travaux
forcés, à Siegburg puis à Delizsck (Saxe), elle sera libérée le 10 novembre
1918. Après la guerre, elle épousera son responsable de réseau Émile Fauquenot.
Les époux Fauquenot-Birckel partent s’installer au Moyen Orient. En 1940, ils
sont au Liban. Émile Fauquenot est ambassadeur de Charles de Gaulle.
Mes blogs
http://hachhachhh.blogspot.be/2017/12/chartreuse-une-nebuleuse-autour-de.html
http://hachhachhh.blogspot.be/2017/12/le-patrimoine-religieux-immateriel-et.html
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