lundi 18 décembre 2017

35ième balade-santé MPLP – le nouveau et le vieux Herstal


Notre 35ième balade santé mplp de  janvier 2018 est partie de notre maison médicale MPLP Avenue Ferrer. 

La rue des Sept Bonniers et la rue Brixhe

L’entrée actuelle de notre salle se trouve dans la rue des Sept Bonniers. Notre maison médicale se retrouve sur des terrains acquis par le citoyen Behr en l’an VI, VIII et IX , lors des ventes des biens nationaux. Ces terrains appartenaient au Prince-évêque, au chapitre de Saint Pierre et aux Etats de Liège.  On qualifiait des gens qui achetaient ces biens comme la bande noire. Notre bourgeoisie actuelle a construit sa fortune sur ces expropriations. Ces ‘accapareurs’ ne sont sûrement pas des saints, mais cette opération a quand même enlevé la base économique de la noblesse et du clergé qui formaient la base de l’Ancien régime. Ca ne saurait donc qu’apporter des ondes positives à notre maison médicale.
A la formation du cadastre en 1830 nous trouvons ces terres en possession de M. Olivier Brixhe, docteur en médecine. La famille Brixhe céda gratuitement le terrain nécessaire pour l’assiette de l’avenue Ferrer et de cette nouvelle rue à condition que celle-ci s’appelait rue Brixhe. Le Collège a donné ce nom le 14/12/1910. La rue Brixhe suit le tracé de l’ancien sentier 85 dans l’Atlas des Chemins Vicinaux.Cette rue aurait très bien pu ne pas exister puisqu’en 1886 les Brixhe avaient sollicité la suppression de ce sentier. Les ‘sept bonniers’ de l’Evêque ont été rachetés en 1880 aux Brixhe par le charbonnage de Bonne Espérance  pour un raccordement au chemin de fer et une autre partie et 1889 par la FN (Collart-Sacré, La Libre seigneurie de Herstal, éd. Thone, 1927, T II p88).
Comme il n’y a pas de plaque à l’entrée de cette rue (si si, ce n’est officiellement pas une ruelle ou sentier)  on pourrait peut être mettre une petite plaque avec, pourquoi pas, un peu d’explications.
Le bonnier est une unité de mesure de surface, anciennement utilisée dans les Flandres et les régions avoisinantes comme la Principauté de Liège, qui vaut 140 ares ou 14 000 m2. Mais le Bonnier liégeois faisait 8 716 m2. Il y a une rue Bonnier du Chêne à Vottem. eu les Charbonnages du Bonnier, à Grâce-Hollgne, et le Charbonnage des Six Bonniers dépendant de la S.A Ougrée-Marihaye.
Nous ferons un petit crochet dans les sept Bonniers qui relie la rue C. Demblon et la place des Volontaires de 1830, pour une baraque Albert. A la sortie de la première guerre mondiale, 200.000 maisons sont détruites. Des milliers de logements préfabriqués  sont construits par le Fonds Albert. Nos baraques Albert ne datent néanmoins pas de cette époque-là : l’administration communale de Herstal achète dix ans plus tard 322 baraques pour ‘résoudre’ la crise du logement créée par les démolitions pour agrandir ses ateliers de la FN (nous passons devant le Pré Madame) et pour la rectification de la Meuse et le canal Albert: une perte de 325 maisons.
 A Herstal, on comptait en 1982 encore une centaine de ces baraques et depuis leur nombre a à peine diminué. La plupart sont toujours habitées. L’existence de ces baraques presqu’un siècle plus tard est un indice d’une crise de logement permanente et centenaire. Une crise qui ne risque pas de s’arrêter. Dans la situation actuelle ces baraques ne vont pas disparaitre bientôt !
Cette crise du logement existe depuis le 19ième siècle. En 1830, Herstal comptait 6140 âmes ; 15.000 en 1880 ; 30.000 en 1911. En 1910 la majorité des habitations ouvrières avait une superficie de base de 35m2. Les ménages ouvriers consacraient en moyenne 2,32 journées de leur revenu mensuel au loyer. Aujourd’hui l’ouvrier peut être content s’il ne paye que 30% de son revenu pour son logement…
La rue J-L Sauveur et Rue de la Croix Jurlet
Sur notre droite, rue Croix Jurlet et la rue J-L Sauveur (anciennement rue des Médecins),  les premiers logements sociaux de Herstal. En 1919 on avait créé la Société Nationale des Habitations et Logements à Bon Marché. Une filiale est créée à Herstal en 1922. Elle édifia ses premières maisons rue Croix Jurlet et rue J-L Sauveur en 1923. Ces blocs de maisons sont toujours là et la construction a un certain charme : un bloc central avec une façade en fronton triangulaire et deux ailes flanqués de bâtiments aux toits «à la Mansart». Au départ la coopérative y construit 46 logements dont deux magasins. Après on y ajoute entre 1927 et 1938 79 logements rue Célestin Demblon et rue du 3 juin.
Jean-Lambert Sauveur est bourgmestre de Herstal de 1830 à 1848. Il fit élever des barricades sur la route vers Maestricht. Et le 4 octobre il bloque à la tête des Volontaires de Herstal une sortie des troupes hollandaises de la citadelle de Liège.Il a été enterré au cimetière de Foxhalle mais il a déménagé suite à la réfection du mur.
La croix sur la façade du café ‘Au Vi Bon Dju’ réfère à cette croix Jurlet.

Rue J-B Cools ‘entre les deux usines’
C’est ici que les travailleurs de la FN commémorent chaque année le 8 mai, fin de la deuxième guerre mondiale et de la libération des camps de la mort.
Ce n’est pas parce qu’on fabrique des armes qu’on n’est pas sensibilisé par le pacifisme. L’usine que nous contournons pas la rue André Deprez a d’ailleurs été construite dans l’optique d’une divsersification vers la production civile.
Sur la diversification vers du ‘non-gun- voir http://pascaldeloge.eu/wp-content/uploads/ART/ArtFN-Lille.pdf surtout page 6. Mais les voitures produites dans cette  nouvelle usine demeurent produites «à l’ancienne», sans recherche de nouvelles méthodes d’organisation du travail.  La FN ne produit qu’un modèle unique, vendu à un prix plutôt élevé face aux gammes nouvelles venues des États-Unis,  mais aussi de France. Lors de la grande crise des années 1930, les voitures disparaissent des productions de la FN. Sur ce point, cette diversification arrive donc à un échec.
Pourtant, les motocyclettes continuent à être produites. Mais ces fabrications ne garantissent pas la rentabilité.  Il faut à l’entreprise un nouveau produit capable de faire vivre sa toute
nouvelle usine. Il faudra attendre la fin de la deuxième guerre pour que l’État belge propose  à la FN de fabriquer désormais des moteurs d’avions (militaires). en 1989 la cession de la division aéronautique FN Moteurs (l'actuelle Techspace Aero) au motoriste français SNECMA. la société prend le nom Techspace Aero en 1992. Elle est ensuite intégrée au groupe Safran en 2005, lors de la fusion de Snecma et de Sagem. En 2016, toutes les sociétés du groupe prennent le nom Safran, et Techspace Aero est renommé Safran Aero Boosters.
En 1939 le directeur de la FN invoquait la «destinée manifeste» de l’entreprise, pour parler de l’échec des voitures et pour souligner que, à son avis, la FN ne pouvait trouver de salut que dans les armes et les munitions.

Le Cortil Madame

Via la rue André Deprez et la rue des Monteux nous longeons le Prémadame ou Cortil Madame.
En 1991 M. Santo de la société New Market achète les ateliers du Pré‐Madame à la FN Herstal pour le prix d’une friche industrielle. Pendant dix ans il loue le rez à une floppée de PME.  Ca lui rapporte un demi million d’€ par an. Mais le déménagement en 2011 de son locataire principal New Lachaussée change la donne. M. Santo se trouve devant un dilemme: la démolition des constructions (4.6 ha) coûterait plus que la valeur des terrains, du fait de la robustesse des constructions. 650 piles de béton de 6m³ de fondation. On dit que les bâtiments auraient été conçus pour résister aux bombardements. Un peu improbable, mais c’est du solide.
Aux rez‐de‐chaussée, des colonnes tous les 7m dans les deux sens. Aux étages, des colonnes tous les 21m dans un sens et 15m dans l’autre. La toiture en shed est soutenue par des poutres Vierendeel d’une portée de 21 m. De plus, des poutres sont placées perpendiculairement tous les 3,5m pour renforcer la structure.
La New Market S.A. propose alors d’accueillir des commerces et des services aux rez ‐de‐chaussée, et de réserver les étages au logement. Une idée géniale. Au lieu d’une valeur négative M. Santo ‘crée’ 4.6 ha de terrains à construire et la même superficie au rez pour des services. Il y avait un hic : comment vendre –sur plan - 350 à 400 logements aux étages ? C’était quand même hautement spéculatif ! Quid si on n’arrive pas à remplir ces deux dalles? Et là,  la Société Régionale du Logement de Herstal (SRLH) vient en aide. New Market signe une convention en 2007 avec la SRL, qui prend en charge le risque d’occupation en contrepartie d’un droit d’emphytéose pour 30 ans. Courant 2010, suite à des coûts de production plus élevés qu’estimés  au départ, le respect du  prix plafond pour la location à la société de logement s’avère trop élevé.New Market réoriente la gestion du projet par de la vente des logements à la SRLH plutôt  que de la location. La SRL prend une option pour soixante logements.  Autrement dit : la SRL prend sur lui la moitié du risque de la première phase, la plus délicate!

La vente des premiers logements

Voici comment century21 essayait de les vendre: "Le futur vous appartient ! Le Pré-Madame ! Soyez les premiers à acquérir votre maison neuve dans un Eco-Village au coeur d'Herstal sur un site chargé d'histoire ! 350 maisons 1, 2 et 3 chambres, disposant toutes d'une terrasse, sur un terrain de 4,8 hectares, 900 emplacements de parking (supplément de 12.500 €), un hôtel avec cafétéria, une crèche, 3.400 m² de bureaux, 1.500 m² de commerces, un espace culturel, etc. Le tout au coeur d'une architecture moderne (7 entrées majestueuses), mettant en valeur l'histoire du site et où la végétation et les espaces verts sont aussi remis à l'honneur
Mi juillet 2017 Sacha Hasson, directeur adjoint du projet annonce la vente des premiers logements : « nous avons déjà prévendus 20 des 25 logements. Quatre le seront par la Société Régionale du Logement de Herstal, qui au total achètera 50 de nos logements. Un autre va être acheté par l'Agence Immobilière Sociale de la Basse-Meuse et quinze autres devraient l'être par un investisseur privé ». Resterait donc cinq logements à acheter dont les prix varieraient de 119.000 euros pour un une chambre à 259.000 euros pour un quatre chambres, cave et terrasse privative comprises.
« La première phase doit s'achever mi-2018,  et comprend, à côté des 25 premiers logements, une maison de repos et résidence-service. Un bail a déjà été signé avec une personne qui gère deux maisons de repos, une à Herstal et une à Xhendelesse. Il va déménager ces deux maisons de repos au Pré Madame. Suivant les résultats, la seconde phase comprendra au minimum 63 logements et peut-être en plus des commerces. La seconde phase pourrait aussi comprendre l'aménagement du hall d'exposition. La Ville de Herstal est intéressée par ce hall qui pourrait accueillir la Cité de la mécanique qu'elle voudrait créer» (Aurélie Drion La Meuse 19 juil. 2017).
Il me semble qu’il s’avance un peu, notre M. Hasson. La Ville intéressée, sans qu’il y a eu un débat public sur le sujet ?
En septembre 2018 Newmarket est tombé en faillite. Le site vient de rejoindre la longue liste des friches à Herstal. La Société de Logement a heureusement réussi à tirer son épingle du jeu...

Olivier DWEK voit une Cité Radieuse !

Le bureau d'architecture Olivier DWEK est spécialisé dans la réhabilitation et la rénovation d'anciens ateliers et de manufactures. Au Prémadame il évide 56% de la toiture tout en conservant la structure pour maintenir le caractère industriel de l’architecture. Des «promenoirs» en plein ciel d’une largeur  de 10m, des chemins et placettes dont certains sont couverts. Sur 32.000m² pour les deux dalles, 17.500 seront consacrés aux circulations piétonnes. Il se compare à Le Corbusier « dont le credo était de faire vivre les gens en hauteur. Voyez les logements sociaux de la Cité radieuse qu’il a construits à Marseille au début des années 50. C’est un projet incroyable. Quand on est sur le toit, on a une vue imprenable sur la rade de Marseille. Ce sont des logements sociaux mais avec une vue de milliardaires ! » Autour du village, l’architecte a prévu des parcs au milieu desquels trônera l’hôtel. Evidemment, les parcs sont à charge de la ville…

Une valeur architecturale  incontestable

New Market invoque la valeur architecturale – incontestable – du bâtiment. L'architecte bruxellois M. Houyoux fut de 1927 à 1931 l'architecte de la F. N. On lui demande un plan pour les départements «Sports».  Il recherche à séparer «le flot continu de la fabrication» de la circulation des matières premières vers les magasins; d’où l’idée de magasins au rez-de-chaussée, les ateliers se trouvant au-dessus. Dans chaque bâtiment quatre groupes de circulations verticales sont établis le long des voies de chemin de fer et rues passant sous les ateliers. Chaque groupe comporte:  1° un monte-charge de 5 * 2,50 m., un monte-charge plus petit, un ascenseur ; 2° Un large escalier avec palier intermédiaire. Ces deux systèmes de circulation débouchent à l'étage dans l'allée centrale des bâtiments ; 3° Les bureaux de contremaîtres dans l’allée. Un fort pont roulant de 15 m. de portée alimente l'atelier des presses situé au rez-de-chaussée en matières premières, qu'il peut décharger directement des wagons, et porte, d'autre part, à l'étage les produits fabriqués. Ces circulations sont complétées par les monorails suspendus, transporteurs à rouleaux, etc.
Au rez-de-chaussée sont, en outre, établis la sous-station électrique, les transfos, les centrales à huiles et couleurs, des chaudières et réchauffeurs particuliers, etc. L’éclairage doit être maximum, mais sans soleil. L’architecte.améliore le type Shed classique  en augmentant l'angle tant en éclairement direct, qu'indirect, la face intérieure du versant plein peinte au lait de chaux devenant du fait de cette augmentation un amplificateur et réflecteur idéal.
Les rez-de-chaussée de 180 * 95 m. et de 150 * 75 m. sont divisés par des piliers suivant un module de 7,50 * 7 m. Ces piliers supportent le plancher qui peut porter 1.500 kg au m2. Dans le but de ne pas encombrer les ateliers par de trop nombreux points d'appui, il adopte des portées de 15 * 21 m. malgré des charges importantes imposées aux poutres par la présence de transmissions, transporteurs, etc. Ces portées ont été réalisées dans le sens des 15 m. par des poutres de fermettes espacées de 3,50 m. supportant la toiture en sheds ; dans le sens de 21 m. ces poutres sont supportées par les membrures inférieures des grands arcs (bow-strings)

Une Maison Dieu, un temple Antoiniste et un vieux château

le temple rue hors chateau

En face du pré Madame se trouvait au XVI siècle un hôpital ou Maison Dieu. Est-ce un hasard de l’histoire : le temple Antoiniste, au
81 de la rue Émile Tilman, héberge aussi des guérisseurs.
L'antoinisme est un mouvement d'inspiration chrétienne qui célèbre les fêtes catholiques. Le fondateur est décédé voici 100 ans. Louis-Joseph Antoine  a longtemps travaillé comme ouvrier, d'abord dans les mines puis dans la métallurgie. En 1910 Antoine découvre ses dons de guérisseur: il se rend compte qu'il peut manipuler les fluides (pensées). Il croit aussi en la réincarnation, mais seulement d'humain à humain. Plus l'être se réincarne, plus il a des chances d'atteindre «l'état divin». Quand l'humain parvient à cet état, le cycle des réincarnations s'achève (il faut une fin à tout).
La maladie serait le produit de notre imagination (« Le mal n'existe pas ») et les épreuves que nous endurons sont des complications dues à nos vies antérieures. « L'Opération générale » consiste à prier pour transmettre le bon fluide. S'ensuit « La lecture », où le desservant lit des passages des livres d’Antoine. L'antoinisme a gardé les principales fêtes comme la Toussaint ou la Noël. Trois autres célébrations sont venues s'ajouter à son calendrier: la « Fête du Père » (pour célébrer la mort d'Antoine) mais aussi la fête de « La Mère » (sa femme Catherine, qui avait pris la relève à sa mort) et la date à laquelle le premier temple a été consacré. Selon le directeur de Centre d'information et d'avis sur les organisations sectaires nuisibles, « c'est un culte belge pour lequel nous n'avons jamais eu de plaintes en 12 ans, un cas assez rare pour le signaler ».
Ce culte remplace donc en quelque sorte cette Maison Dieu que l’on accédait par la ruelle de l’Hôpital.

Le frère François Tinlot, architecte des temples antoinistes

L’architecte des temples antoinistes de de Sclessin, Liège, Fragnée, Visé, Momalle, Herstal, etc est François Tinlot qui faisait partie du Conseil d'Administration du Temple Antoiniste, « à côté de Mr Louis ANTOINE, Guérisseur, membre de droit ». Le frère Tinlot fait aussi des plans d'usine; comme la maison Saroléa de Herstal ou les Forges et Estampage Gillet, au Quai de l’Abattoir.
Via la rue du Tige et la rue E. Tilman nous débouchons ‘derrière les rieux’. C’est quoi, ces rieux ? Il y en a deux : le rieu des Moulins qui écoule les eaux de Vottem et de Milmort, et un second qui descend la rue de Trois Juin

Le manoir Hanxeller

La vénérable rue du Vieux Château débouchait à l’époque dans la rue du Chou et possédait une seconde issue au Tige. Ce Vieux Château est ce qui reste du manoir Hanxeller, construit vers 1575 et détruit en 1854. Sur la carte Ferraris on voit un bras d’eau (les rieux !) longeant la propriété. « Elle constitue le seul vestige de la Renaissance italianisante conservé à Herstal", expliquait notre échevin André Namotte (CDH), lors d’une ouverture au public en 2009. Je lui demanderai à la prochaine occasion ce que veut dire ‘Renaissance italianisante’. L'inventaire du patrimoine de Herstal, de l’Ipic, parle de style mosan.
Place Licour 13, «en retrait, la Tour Pépin est un vestige de l'ancien manoir Hanxeler ou château de Herstal, érigée à la fin du 16e siècle dans un style traditionnel mosan. À l'angle sud-est, la chaîne d'angle en tuffeau est interrompue par un fût de colonne en calcaire dont un des tambours porte les armoiries de Hanxeler et Speis et la date de 1597. Renforcée par des chaînages d'angle, la bâtisse en briques, calcaire, grès et tuffeau est coiffée d'un toit à deux versants à croupes d'ardoises; baies à croisée ou traverse sur piédroits chaînés. À la façade est, vestiges de jambages gothiques en calcaire.

La tour Pépin : un hoax?

Selon d’autres sources, le bâtiment est construit sur « les restes d'une tour romane entièrement aveugle, appareillée en moellons de grés houiller sur une base peut-être carolingienne ». Ce qui explique que des les nostalgiques de Charlemagne (et ils sont nombreux à Herstal !) l’ont appelé erronément ’tour Pépin’. Nous verrons plus loin que les fouilles de 2010 n’ont pas trouvé d’éléments antérieurs à la fin du XVième siècle.
Ce château a été détruit en 1857 par Jean-Michel Courard pour y construire sa maison. Dommage pour notre vieux château, même si la Maison Courard est aussi repris dans l’IPIC,  « un double-corps bien conservé en brique et calcaire, de cinq travées sur deux niveaux, sous toiture d'ardoise à deux versants. La façade symétrique à l'architecture soignée est percée de baies à linteau déprimé. Un petit balcon agrémente la baie centrale de l'étage. Un décor original en calcaire, fait de redents et d'une frise d'arceaux en plein cintre, souligne la corniche. Une lucarne à encadrement chantourné ponctue le centre de la toiture ».
L’erreur sur la tour Pépin remonte au moins à 1844, donc encore avant la démolition du château, quand le ‘Guide du Voyageur sur la Meuse; ou, description du fleuve, des villes, villages, châteaux’ dit que « Herstal a été fort célèbre dans l’histoire de France, sous les rois de la seconde race. On remarque encore aujourd’hui, sur la grande place, dite Li Cour, les restes de l’ancien palais, avec deux tours, de Pepin-le-Gros, à qui tous les histoires donnent le surnom de Herstal, pour le distinguer de son aieul Pépin de Landen ».
Simenon en rajoute une couche en évoquant, dans ‘Pédigrée, son grand-père Guillaume Brüll, « habitant avec toute se famille dans l’ancien château de Pépin de Herstal. Maman, tu avais cinq ans donc, quand tu as quitté le vieux château de Herstal, qui avait été démolie lorsque j’ai eu l’âge de regarder autour de moi. Pendant tes derniers jours, pensais tu parfois aux piles de bois qui s’entassaient autour du château de Herstal ? »

Une rénovation ratée ?

projet restauration tour S. Jost
La tour est classé en 1962. Mais classement ne signifie pas nécessairement rénovation.
En 2009 on apprend que la tour allait être rénové et transformé en espace de bureaux par Guy Paternotte et sa société GP Consult, spécialisée dans la rénovation du patrimoine. Le bureau Archi2 qu’il dirige a présenté ses projets pour la tour et la ville de Herstal avait même décidé de participer à cette rénovation en adjoignant un éclairage.
Ce projet a eu le mérite d’avoir relancé les recherches.
Suite au succès des visites en septembre 2009, une conférence a réuni Jean-Marc Léotard, archéologue, Caroline Bolle,maître en architecture et Jean-Luc Charlier, docteur en histoire de l’art et archéologie (tous trois actifs au service de l’Archéologie de Liège du Service public de Wallonie), et Olivier Verheyden (école supérieure des Arts Saint-Luc Liège), qui effectuent depuis 2007 des recherches sur le site.
Selon Caroline Bolle, et Jean-Marc Léotard, les plus anciens vestiges ne seraient pas antérieurs à la fin du XVième siècle. Voici le résultat des fouilles de  l’été 2010, suivies en 2011 par une analyse dendrologique. Mais Guy Paternotte ne fait rien : un dossier qui n’est pas très glorieux pour quelqu’un qui prétend être spécialiste de la rénovation du patrimoine…
Selon la DH, en décembre 2013, le conseil communal aurait voté l’acquisition de la tour Pépin. Pour en faire quoi ? On peut rêver d’une extension de notre musée.

Hanxeler, un homme de paille de Guillaume I d’Orange

En fait, Herstal n’a pas besoin d’inventer une tour Pépin : l’histoire de Hanxeler suffit largement pour intéresser un large public. Notre Hanxeler était en fait un homme de paille de Guillaume I d’Orange, au moment où il mène la guerre contre l’Espagne catholique. En 1561, suite à son mariage avec la fille protestante de l'électeur de Saxe, Guillaume change allégrement dereligion. Le favori de Charles Quint devient persona non grata et ses biens sont confisqués en 1569 par le duc d’Albe. Dans ces biens, sa Seigneurie de Herstal. Guillaume met ces biens en gage auprès de Hanxeler pour 26.000 florins ; une opération qui empêchait l’Inquisition de mettre la main dessus. Ce François Hanxeler, chevalier de l'Ordre Teutonique depuis 1549,  s’attribue le titre de ‘seigneur gagiste de Herstal’ et y construit en 1575 un manoir.
François Hanxeller était chevalier de l'OrdreTeutonique depuis 1549. Cet Ordre avait son mot à dire à Liège. Ce qui explique que ce qu’on appellerait aujourd’hui un ‘montage financier’ a marché. C’est d’autant plus étonnant que la principauté  de Liège était en plein impliquée dans le conflit. En 1568  Guillaume avait lancé une attaque sur les Pays Bas espagnols via la principauté de Liège. Un assez bon nombre de liégeois lui firent croire qu'il lui serait facile de se procurer des intelligences dans la place. Je n’ai retrouvé aucune référence historique, mais n’est-il pas permis de penser que la rocade de Guillaume par Liège est aussi motivée par ses liens avec Herstal ? C’est un peu comme s’il jouait à domicile de sa Seigneurie de Herstal…  Le 28 octobre 1568 il s’était présenté devant Sainte-Walburge, mais les états de Liège refusent le passage. Guillaume brûle alors les abbayes de Saint-Laurent, de Saint-Gilles et du Val Benoît, Sainte-Marguerite, Hocheporte et Sainte-Walburge et essaye à travers le Brabant de faire sa jonction avec les huguenots français. Le renfort huguenot s’avérant assez faible, Guillaume se retire sur Strasbourg.
En 1603 Herstal retourne aux Nassau (source Collart, André, La seigneurie de Herstal sous les Hanxeller : 1568-1604).
La maison royale de Hollande porte toujours le titre de Seigneur de Herstal !

Le Vieux Moulin

Au bout de la place de la Licour nous prenons le rue du Vieux Moulin, qui était à l’époque alimenté par les rieux. Nous voilà dans la rue Léonard Jehotte et un autre chemin (sans nom) parallèle au Boulevard. On se rend compte de la coupure que représente cette demie autoroute entre la Ville et Le Ravel Canal. Cette voie sera bientôt à quatre bandes tout le long, après la réouverture de la bretelle d’accès de l’échangeur n°35 vers Aix-la-Chapelle. Nous vous invitons à réfléchir à la cicatrisation de cette coupure.
Les experts du Plan Communal de Mobilité Herstal a mesuré en 2009 sur les boulevards 10.000 evp/jour dans  chaque sens. Le PCM préconisait de profiter du réaménagement des boulevards Solvay et Gramme « pour y sécuriser les traversées et relier Herstal-centre au RAVeL Les rond-point à la plupart des carrefours avec les pénétrantes dans Herstal doivent présenter une branche au gabarit cycliste vers le bord du canal. Le Pont de Wandre est le seul ouvrage permettant de relier directement Herstal à la rive droite de la Meuse. Il est donc un passage obligé pour les cyclistes souhaitant traverser le fleuve et doit en ce sens leur permettre une circulation en toute sécurité. Dans un premier temps, on pourrait partager l’usage du trottoir sur le pont entre les piétons et les cyclistes; aménager les bordures pour permettre aux cyclistes de  monter de façon confortable sur le trottoir partagé, voire aménager une passerelle pour cyclistes accolée au pont (exemple du Pont Atlas à Liège) ».
Le long du Ravel Canal nous avons le complexe de l’île Monsin, trilogiport avant la lettre. Sans oublier le pont de Wandre de Greisch (1987), classé patrimoine historique majeur en 1993, à peine six ans après sa construction. Sur la rive droite du canal, la ‘route du feu’, ou plutôt la route de la fonte. Dans les années 60 l’Espérance-Longdoz construit une nouvelle aciérie et un train à larges bandes à Chertal. Entre ses haut-fourneaux (on vient de dynamiter le dernier, le HF6 à Seraing) et cette nouvelle aciérie la fonte est amenée en wagons thermos. Les rails sont toujours là, sauf un petit bout  que démonté en 2013 pour empêcher une centaine de wagons-thermos de partir vers Sidmar.

1847 le canal latéral Liège-Maestricht

Cette rue sans nom est interpellant aussi derrière ses digues. Cette rue est au niveau de l’ancien canal Liège Maastricht ! On a fait les digues parce qu’on voulait éviter des écluses sur la nouveau canal Albert (la première écluse après Monsin est à Genk) et aussi parce que tous les terrains où l’on a exploité du charbon se sont affaisés de 5-7 mètres.
Avant la construction du premier canal latéral, en 1847, on traversait la Laye pour aller sur la bucolique Ile Monsin par le Wez de Mille Saucy. Ce gué étant souvent impraticable sauf en été, en 1847 le bourgmestre J-L Sauveur a fait rehausser le gué par 1200 m3 de pierres et de gravier. Mais après le creusement de la dérivation en 1855 à chaque inondation la chétive construction fut
emportée. Laloux, bourgmestre depuis 1848, avait des terres à Monsin et la fit réaménager à plusieurs reprises. D’où le nom ‘pont Laloux’.  Cette construction provisoire existait toujours en 1930.
Le café à l’entrée de ce ‘pont’ ne respectait pas toujours les heures de fermeture, à 23 heures. Notre bourgmestre n’a rien inventé, avec son couvre-feu pour les cafés. En 1869 le commissaire de police verbalisa. Quinze convives furent condamnés à l’amende, mais furent acquittés en appel. Au lendemain de cette victoire le café prenait comme enseigne le ‘Café des XV’. Et le pont Laloux devint le pont des XV (P. Baré, Herstal en cartes postales, TII, p.31-32).
La rue de la Roche réfère au premier plateau de la Meuse, en termes géologiques.
Le  quai de l’Abattoir se trouvait aussi le long de l’ancien canal. A côté de l’abattoir s’étaient installés les Forges et Estampage Gillet. Les motos Gillet faisaient partie des Demoiselles de Herstal. Lors de l’installation de la paroi de pieux sécants (je viens de découvrir le terme) on voyait très bien une couche de cendres au dessus des pieux, provenant probablement  de l’usine Gillet, construite par le frère Antoiniste Tinlot.

Une nouvelle voirie pour le parking en dessous du nouveau centre administratif.

Nous avons une belle vue sur le chantier de la nouvelle voirie pour le parking en-dessous du nouveau centre administratif. Pourtant, le permis du 19/1/2010 prévoyait l’accès au parking via la rue des Mineurs! On apprend aujourd’hui que cet accès était provisoire. Cet accès n’a d’ailleurs jamais été utilisé et est impraticable: l’accès se fait par la friche des ateliers Kraft où la Ville essaye d’attirer un promoteur immobilier. Le Conseil d’administration d’Urbeo « a constaté le 4 octobre 2016 la fin du ‘dialogue compétitif’ pour la promotion immobilière  située entre la nouvelle cité administrative et le boulevard urbain. Urbeo, bras armé du développement urbain herstalien, souhaite maintenir un haut niveau d’exigence qualitatif pour valoriser un hectare de terrain stratégiquement situé au cœur de la Ville : le meilleur terrain mérite le meilleur projet. Dès lors, la promotion « La Ruche » est temporairement gelée mais le site va d’ores et déjà faire l’objet de plusieurs aménagements pour offrir rapidement une plus-value pour les usagers du centre en créant un espace de respiration et de détente pour les Herstaliens. Une nouvelle voirie d’accès au site depuis le hall omnisports Michel Daerden va être réalisée dès le printemps prochain pour accéder au centre administratif et favoriser la future promotion immobilière toujours souhaitée. Le bâtiment « Kraft » va également être démoli pour permettre d’améliorer le cadre de vie des riverains de la rue des Mineurs et amplifier les opportunités de développement du site ».
En fait, la nouvelle voirie sert à rendre la friche ‘Kraft’ plus attractive pour un promoteur, en ne lui imposant aucune contrainte point de vue accès au centre administratif.
Si je comprends bien, en 2010, on a créé un parking en dessous du centre administratif sans savoir par où on allait entrer… Six ans plus tard, on arrive à la conclusion que la connexion prévue par la rue des Mineurs « engendrerait de nouvelles expropriations et amènerait un charroi important au carrefour E. Dumonceau/Mineurs, déjà engorgée où passent plusieurs lignes de bus ».
Cette nouvelle voirie très raide ne sera pas du tout attractif pour le piéton. Et un accès piéton reliant le parking du nouvel hall omnisport vers la piscine fera l’objet d’une demande en permis d’urbanisme à venir. «Une liaison mode doux est prévue dans le haut de la rue des Mineurs mais celle-ci dépendra de la future promotion immobilière».
Par contre, on a pensé à la favorisation « d’une flore herbacée diversifiée (plantes à fleurs inféodées aux milieux secs et sols non amendés). Il y a lieu de ne pas mettre en place la couche de terre arable de finition prévue dans le sujet, mais de laisser les remblais bruts. Nous recommandons l’emploi d’un mélange de type ‘pré fleuri’ composé de 20% de dicotylées (plantes à fleur) et de 80% de graminées suivant une densité de 100 à 200 kg/ha. Les semences doivent avoir une origine locale (wallonne) certifiée ». Peut-être veut on ainsi compenser l’horreur de cette façade végétalisée où la moitié des bacs ‘verdurisés’ sont morts ? Je suppose qu’il y aura une consultation démocratique sur le pourcentage de graminées…
En Faurieux 18, un ancien atelier du début du 20e siècle «  La travée d'entrée à gauche est couronnée par un fronton aux amortissements en calcaire ouvragés, de grandes dimensions, représentant le monogramme H et L stylisé. Le nom de la firme Gilbert est peint au-dessus de l'entrée et au pignon.
Au N°41 une intéressante maison de style éclectique, teinté d'Art Nouveau géométrique, datée de 1912 et signée par l'architecte H. Sauveur. Élégante façade en brique et calcaire, dont la travée principale est couronnée par une grande lucarne-pignon triangulaire à ferme débordante évoquant le style villégiature. La qualité architecturale de la façade est renforcée par les encadrements de baies sculptés de motifs géométriques et les menuiseries d'origine au profil particulièrement soigné et parfaitement préservées, agrémentées de verre cathédrale coloré.
Nous passons par le chantier de la nouvelle voirie entre la rue Faurieux et la rue Lamoureux pour rejoindre notre point de départ.
Je vous le vends pour le prix que l’on a vendu le projet de ‘poumon vert au coeur de Herstal’ au programme Feder : « l’Espace Browning, ancien site industriel (une usine désaffectée et un terrain) s’étale sur deux niveaux entre les rues Faurieux et Jean Lamoureux. L’aménagement de cet espace en parc urbain  a pour objectif d’offrir un espace culturel et de détente ». 



Aucun commentaire: