En voici un petit extrait :
« 1° En
sortant du château par le vestibule de la cour de Marbre, on ira sur la
terrasse ; il faut
s’arrêter sur
le haut des
degrés pour considérer
la situation des
parterres des pièces
d’eau et les
fontaines des Cabinets.
2° Il
faut ensuite aller droit sur le haut de Latone et faire une pause pour
considérer Latone, les lézards, les rampes,
les statues, l’allée
royale, l’Apollon, le
canal, et puis
se tourner pour
voir le parterre et le château.
3° Il
faut après tourner
à gauche pour
aller passer entre
les Sphinx ;
en marchant il
faut faire une pause devant le Cabinet pour considérer
la gerbe et la nappe ». Voici ma Manière de montrer ma cité ardente.
Quant aux « Délices du Païs de Liège », c’est le titre d’un recueil
de gravures de Remacle le Loup. Cette « Description des monuments sacrés
& profanes de cet évêché-principauté » a été édité à Liège en 1738 par
l'éditeur Everard Kints, un précurseur de la marchandisation. Le dessin de
chaque vue coûte 4 pistoles au propriétaire du château ou du monument
représenté. Ceux qui désirent y faire figurer leurs armoiries payent 2 écus de
plus.
Les Guillemins : une œuvre d’art avant d’être une gare
On commence aux Guillemins: "Si on est dans la gare
on a pénétré à l’intérieur de l’œuvre
d’art.", dixit Calatrava. En face, la tour de Fedimmo que Calatrava a essayé de bloquer :
il a perdu au conseil d’État…. Juste à côté la maison Rigo qui va être démolie,
malgré une opposition féroce d’un comité d’action. Peut-on imaginer un dialogue
architectural plus évocateur que cette gare, cette tour et cette maison
Rigo ?
La Ville
voulait un axe de la gare à la Mediacité. Nous n’irons pas jusque là : ce centre
commercial tue le commerce dans le cœur de la ville.
La Belle Liégeoise
Il faut ensuite aller droit sur la nouvelle passerelle, oeuvre du bureau d’ ingenieurs
Greisch, qui ont aussi collaboré avec
Calatrava. Heureusement : suite à leurs calculs la structure de la gare a
été a été alourdie de 30%.
On l’a
baptisée ‘La Belle Liégeoise’, le surnom de Théroigne de Méricourt, qui a joué un rôle dans la
Révolution Française. Charles Baudelaire écrivait dans Les Fleurs
du Mal : « Avez-vous vu Théroigne, amante du carnage, / Excitant à l’assaut un peuple
sans souliers, / La joue et l’œil en feu, jouant son personnage, / Et montant,
sabre au poing, les royaux escaliers ? » .
Un nouveau musée
Il
faut après aller vers le nouveau musée de la Boverie. L’architecte Rudy
Ricciotti nous a fait une extension
d’un bâtiment qui date de l’expo universelle de 1905. L’on
fera considérer sa grande aile vitrée. Difficile d’y
accrocher un tableau. Ce projet de 27,6 millions d’euros a jusqu’à maintenant
juste servi comme cafet. L’architecte explique que pour son aile vitrée il y
verrait plutôt de la sculpture. On aurait dû se mettre d’accord avant sur ce qu’on allait mettre dedans. Pour
Ricciotti, “entre deux expos, il faut le
laisser vide pour qu’on y fasse la fête”. A cette heure, c’est même pendant
les expos qu’on y fait le vide…
Une statue du ‘sulfureux’ Jef Lambeaux
Il
faut après contourner le musée pour considérer une
statue de Jef Lambeaux, côté roseraie.
Le faune mordu avait été exposée en plusieurs
expositions. En 1905, l'Exposition universelle de Liège voulait l’installer à
la Boverie. Elle s'attire les foudres du journal catholique "La gazette de
Liège". On renvoya l’œuvre qui se cassa en chemin. Un conseiller communal
et l'échevin des Beaux-Arts font acheter l'oeuvre par la Ville, pour réparer
l'outrage fait au sculpteur anversois. Il faudra attendre les années 50 pour
que la statue soit installée dans la roseraie.
On doit au ‘sulfureux’ Jef
Lambeaux la statue de Brabo à Anvers, et
le pavillon des passions humaines au Cinquantenaire, dans un bâtiment d’Horta.
A Bruxelles aussi Lambeaux s’attire les foudres des "culs serrés". Le pavillon fut fermé jusqu’il y a peu. "La Nymphe du Bocq" aussi,
aujourd’hui devant l’Hôtel de Ville de Saint-Gilles, resta dans ses caves
jusqu’en 1976 à cause de "bons
esprits" du XIXe siècle qui la jugeaient trop indécente (llb 29 novembre 2008).
"Liège à ses enfants morts pour elle" et le Mémorial interallié
On ira droit au pont Albert où l’on trouve sur une distance
de 100 mètres un véritable parc des sculptures. On s’arrêtera devant une
sculpture de Pierre Caille "Liège à
ses enfants morts pour elle". Cinq grandes stèles en marbre noir, un
ensemble de croix en bronze doré, avec neuf dates, de neuf
batailles qui ont jalonné l'histoire de Liège. En passant on regardera
le ‘Monument
interallié’ à gauche, sur les hauteurs de Cointe. Liège a
refusé en 1918 de soutenir le Mémorial de Cointe, un projet d’Albert I. Liège
proposait un beffroi en ‘hommage aux
Liégeois combattant depuis dix siècles pour la liberté’. Le projet n’aboutit
pas et en juillet 1936 le Conseil communal transfère des
fonds budgétisés vers celui du monument au roi Albert, alors en projet. 30 ans
plus tard, en 1964, lors du 40e anniversaire de la bataille de Liège, on installe les stèles de Pierre Caille et Albert,
en bas du pont, sur un cheval non sellé.
Li Toré
On fera le tour des Terrasses d’Avroy pour
considérer les statues, dont « Dompteur
de taureau » ou Li Toré. L’on fera une pause pour considérer le seul
monument national érigé en hommage aux Résistants de 1940-1945, du sculpteur Louis
Dupont, qui avait été lui-même enfermé à la Citadelle de Huy, en 1941. Le
groupe des statues à gauche évoque la résistance armée, celui de droite la
résistante intellectuelle.
Saint-Jacques : dix siècles d’usurpation rampante.
On ira à l’église Saint-Jacques le Mineur, ou « Jacques le petit », un frère de Jésus. Compostelle est dédiée à Jacques le Majeur,
un autre frère. Les moines de l’abbaye St Jacques trichent
depuis le début: la dédicace de l’église se fait le jour de la fête de Jacques
le Majeur, et pas le jour de celle du Mineur, alors le 1er mai. Les Bénédictins
liégeois envoient en 1055 un frère à Compostelle pour demander une relique du
Majeur. Ils installent vers 1520 un ange qui exhibe une grande coquille
–attribut du Majeur - sur deux des chapiteaux. En 1682 ils commandent à Jean
Del Cour une effigie de saint Jacques le Majeur. Le Mineur n’aura la sienne
qu’en 1691, presque dix années plus tard
La Place Saint-Paul, haut lieu de la lutte des classes et d’architecture
On ira après à la Place Saint-Paul, et on en
fera le tour pour considérer ce haut lieu de la lutte des classes ; c’est
là que la FGTB organise sa fête du 1 mai, et le Parti Communiste et le PTB leur
meeting 1 mai.
En face le complexe scolaire Hazinelle, une
machine à enseigner, si je peux paraphraser Le Corbusier : «une maison=
une machine à habiter ». Jean Moutschen qui a conçu ce bâtiment était dans
la ligne d’action des Congrès Internationaux d’Architecture Moderne. Dans le hall d’entrée le bas-relief d’Idel
Ianchelevici, auteur du plongeur à l’entrée du port des yachts. Moutschen a
également conçu le lycée Léonie de Waha, un peu plus loin, sur les boulevards.
L’institut supérieur pour demoiselles avait été fondé par la pédagogue Léonie
de waha en 1868 dans des locaux de la rue
Hazinelle.
La Banque Nationale (1968) est du Groupe EGAU (Études en Groupe
d'Architecture et d'Urbanisme), artisans des transformations urbanistiques du
centre de Liège entre 1950 et 1992. Elle fermera fin 2018.
On fait une pause devant l’ex-collégiale
Saint-Paul, devenue cathédrale avec le concordat de 1801, Saint Lambert étant
‘démonté’ comme symbole de la tyrannie. St Paul avait une tour basse, et la
flèche octogonale date de 1811 est une copie de celle de St Lambert.
Le Théâtre de Liège
Il faut ensuite aller droit vers la Société Libre d’Emulation (SLE), aujourd’hui Théâtre de Liège. L’Emulation fut fondée en 1779 par François-Charles de Velbrück, Prince-Évêque de Liège ‘éclairé’. Le peintre Léonard Defrance y rencontre J-J Fabry et J-N Bassenge. Tous les trois joueront un rôle clef dans la révolution qui couve. Defrance dirigera le démontage de la cathédrale. Lors de la Révolution liégeoise l’Emulation compte 600 membres.En août 1914, le bâtiment est incendié. En 1930 la Ville de Liège reconstruit un édifice néo-classique. Dans les années 1960, l’Université de Liège louera sa grande salle pour y donner des cours. De 1985 à 2004, le Conservatoire royal de Liège s’installe. À la suite d'une importante rénovation, ses locaux de la place du Vingt-Août logent désormais le Théâtre de Liège.
L’ Hôtel des Postes néogothique
On ira droit à la Grande Poste de Liège d’Edmond Jamar. Cet édifice
néo-gothique a une structure portante en acier. Pendant la longue période de
majorité catholique absolue, de 1884 à 1918, les ‘calotins’ ont rempli le pays
d’églises et de bâtiments publics néo-gothiques, comme le Palais Provincial de
Liège, que nous verrons en fin de balade. Le bâtiment désaffecté est classé
depuis 2002. Plusieurs projets de réaffectation ont été bloqués par la
plate-forme Place Cockerill.
La « passerelle
de la Régence » date de 1880 et porte le nom de la rue qu'elle prolonge.
Les gens de l’au-delà parlent de passerelle Saucy, en référence au boulevard
auquel elle mène en Outremeuse.
Rue de la Régence : La Wallonie
Il faut ensuite aller droit sur le Commissariat "Wallonie", acquis par le quotidien La
Wallonie en 1922 et transformé par l'architecte Jean Moutschen. La
Centrale liégeoise des Métallurgistes inclut dans sa cotisation l’abonnement au
quotidien. Les ventes passent ainsi de 28 000 à 50 000 exemplaires. Il y a même
une Radio Wallonie qui émet d’octobre 1925 à mai 1940.
Saint Denis : un mélange de styles
On entrera dans le
cloître de la collégiale Saint-Denis, fondée en 987, du temps de Notger. Les
chanoines des 8 collégiales liégeoises vécurent en commun jusqu'au 12e siècle,
puis délaissèrent le dortoir et le réfectoire pour s'établir dans des maisons
situées aux alentours. Le chapitre avait 33 chapelains, des chantres, des
musiciens et 8 enfants de choeur dont André-Modeste Grétry que nous saluerons
Place de l’Opéra. Le chapitre fut supprimé en 1797 et l'église devint
paroissiale.
La tour est Notger, le
choeur est gothique et l’intérieur est baroque : un étrange mélange de
styles.
La Place Saint Etienne toute récentee
On descendra à la place Saint-Etienne, inaugurée
en 2005. La Ville a étudié une centaine de propositions de noms. Dans les années
60, le Grand Bazar avait rasé l’îlot entre les rues Saint-Étienne et
Saint-Denis, pour une extension du magasin qu'on appellera le « hall Saint-Denis».
La cathédrale Saint Lambert, démontée par les révolutionnaires liégeois en 1792
On descendra sur la Place
Saint-Lambert. La cathédrale du même nom, une des plus grandes de l’occident, a
été démontée par les révolutionnaires liégeois en 1792 comme symbole de la
tyrannie de l’Ancien Régime.
En 1801 Bonaparte offre
à la ville la propriété de l’emplacement de la cathédrale. En 1812, le Conseil
municipal veut aménager une place Napoléon le Grand, mais la défaite de
Napoléon arrête ces projets. Un siècle et demi plus tard un trou s’y creuse
dans le cadre d’un projet d’amener une autoroute par le centre ville…
En 1995 la ville a
organisé une consultation populaire sur la fontaine. 3.000 personnes seulement
s'étaient exprimées. C’est peu. Mais 46,7 % avaient opté pour le «Grand Yo-Yo» d'Alain De Clerck. Le collège échevinal de Liège désigna
finalement la deuxième classée, Halinka Jakubowska (21,2 %), comme
lauréate. Nous retrouverons notre artiste engagé Alain un peu plus loin, rue
Féronstrée, avec son Sculpture Publique d’Aide Culturelle.
La Place du Marché et le perron
Après
on ira jusqu’au Perron et la Place du marché, cœur politique de la ville
jusqu’au démantèlement de Saint Lambert.
Charles le Téméraire fit l’enlever le Perron, et graver sur le
piédestal
N'ELEVEZ PLUS VOS FRONTS SI HAUTAINS
VERS LE CIEL !
PAR MA CHUTE, APPRENEZ QU'IL N'EST
RIEN D'ETERNEL
J'ATTESTE AUJOURD'HUI, VIL JOUET
MEPRISE
QUE CHARLES M'A VAINCU, QUE CHARLES
M'A BRISE !
En 1478, après 10 ans
d’exil, le Perron est réinstallé à Liège.
Les trois Grâces qui le
couronnent sont une copie de l’original de Delcour, exécutée par l’échevin
communiste de la culture, l’artiste Paul Renotte, dans l’après guerre. On ira
saluer l’original au Curtius.
En 1795, « la municipalité liégeoise résolut de mutiler
les armoiries de la cité, en leur enlevant la croix, qui était disait-on, fort
absurdement plantée sur la pomme de pin ».
1983 : les agents communaux sur la « dalle »
On ira par la rue Féronstrée
(Ferons : artisans du fer), où l’on s’arrêtera un moment devantla Sculpture Publique d'Aide Culturelle d’Alain Declercq. Un
genre de « C.P.A.S » qui achète des œuvres à des artistes contemporains
vivants. Lorsqu’on introduit de la monnaie dans l’horodateur la Flamme de la
Culture s’allume au sommet d’un arc métallique.
On passera après sur la dalle de l’îlot Saint Georges qui devient en 1983 pendant 3 mois le
haut lieu de la mobilisation sociale… Chaque jour, les agents communaux en
lutte se retrouvent sur « la dalle». Liège
est en faillite. Le collège ECOLO RPSW
(socialiste et wallons progressistes) lance un plan d’austérité sur la table :
en 1981, Liège avait 7914 agents ; en 2008, il en restait 3043. Il n’y a que
44% d’agents nommés en 2008 contre 84% en 1981.
On ira par la rue sur les Foulons et la quai
de Maestricht au palais Curtius, construit au XVIIe siècle par le richissime
munitionnaire liégeois Jean de Corte. Dans la galerie lapidaire un saluera
l’original des ‘Trois Grâces’ de Jean Delcour.
Les principautaires’ de Mady Andrien
On ressortira par la Place
Saint Barth, où l’on saluera ‘les
principautaires’ de Mady Andrien, en acier Cor-Ten, payée par Cockerill
Sambre. Pour Philippe Delaunois, administrateur délégué de Cockerill, c’est
David et Goliath, défi des petits aux grands. Pour l’échevin Michel Firket c’est
le courage liégeois qui toujours se dissimule sous les apparences d'une
insouciance quelque peu frondeuse. De la même artiste, il y a Place de la
Bergerie à Seraing, un monument pour le syndicaliste René Piron, et à Wandre un
pour Robert Gillon.
Esplanade Saint Léonard
A l’Esplanade, on lèvera
les yeux vers la citadelle, construite après la défaite des Grignoux, en 1650. Tous
les bastions sont tournés vers la ville, donc contre l’ennemi intérieur. En
1974 on détruit les bastions dirigés vers la campagne pour la construction de l'hôpital de la Citadelle.
La citadelle se retrouve donc aujourd’hui dans un état de départ, pour mater la
ville…
On marchera le long de la Méridienne sur l'esplanade, œuvre d’Eugène
SAVITZKAYA : « Allez comme
vous voulez sur le fil de l’ancienne muraille de la ville étendue à tous ses
habitants morts, vivants et à venir, émigrants de toujours et nouveaux
migrants…».
Au pied des coteaux, on lira la phrase de Lorca:
"Dans le drapeau de la liberté, j'ai
brodé le plus grand amour de ma vie".
Un projet du «Collectif Génération Lorca», en
collaboration avec l’artiste Alain De Clerck (encore lui !) et les deux
architectes de l’esplanade, Aloys Beguin et Brigitte Massart, qui ont aussi
conçu les poubelles.
Mes blogs sur des balades à Liège
Je fais bien volontiers le greeter pour une
balade à Liège. Voici mes blogs sur le sujet :
http://hachhachhh.blogspot.be/2017/03/saint-leonard-une-balade-sur-le-theme.html
http://hachhachhh.blogspot.be/2017/01/balade-de-la-boverie-la-place-saint.html
http://hachhachhh.blogspot.be/2017/01/balade-cite-ardente-des-guillemins-la.html
http://huberthedebouw.blogspot.be/2016/12/wandeling-door-de-vurige-stede-luik-van.html
http://hachhachhh.blogspot.be/2014/03/balade-liege-des-revoltes-les-braises.html
http://hachhachhh.blogspot.be/2014/03/sur-lesplanade-saint-leonard-grave-dans.html
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