lundi 23 janvier 2017

Balade de la Boverie à la Place Saint Paul (2ième partie)


Après moult tergiversations (on a parlé quelques années du Mamac, puis du Ciac pour le Palais des Beaux Arts de 1905 devenu Musée de l'Art Wallon en1952), Liège  a penché pour le nom «Boverie».  Jean-Pierre Hupkens, échevin de la Culture et de l'Urbanisme: «Nous nous sommes penchés sur un nom qui aurait une résonance à l'international. Il fallait un nom qui indique au public ce qu'il peut trouver au musée» (Le Soir 03 Mai 2016). Vu comme ça… Pour moi, une boverie évoque des bœufs, à l’international et au régional…
L’architecte de la Boverie est Rudy Ricciotti, une “grande gueule”. De ce point de vue le profil parfait pour Liège. Il se définit comme “anarcho-chrétien”. Va savoir ce qu’il veut dire avec ça… Le département des arts de l’Islam au Louvre, en forme de tapis volant, et le Mucem au port de Marseille, c’est lui. Il critique de sa “gueule de métèque” “le salafisme architectural du minimalisme de supermarché à la Rem Koolhaas. Le minimalisme, la déconstruction, sont des névroses qui se soignent avec des neuroleptiques. Sans faire intervenir l’argent public.” Ou encore : « J’adore Liège, camp retranché contre la barbarie pornographique de la globalisation. Une vraie cité avec des vrais gens, dans des vraies situations. Sans musée, que reste-t-il pour prendre conscience de ce que nous
sommes et de ce qui nous réunit ou diffère ? La finalité d’un musée est toujours politique ». Quant au rôle d’un architecte d’un musée : créer une nouvelle icône dans la ville, ou alors, se mettre au service des œuvres,  Ricciotti veut ‘faire juste, exact, contextuel. Donner une réalité populaire à l’exigence esthétique’ (La Libre Belgique 30 jan. 2016).  Or, quand on voit le résultat, c’est un peu “grande gueule” au péjoratif. Son extension du bâtiment n’a pas encore servi une fois pour une expo, sauf pour le vernissage. Difficile d’accrocher des tableaux sur ses parois de verre. Il se défend en disant qu’il y verrait plutôt de la sculpture. On aurait peut-être dû discuter ça avec lui avant de commencer ? En attendant, on pourrait y installer le cafet bien sympa du Mad-Musée qui est pour le moment sans domicile fixe, le temps d’une réfection…

Le pont Mativa et l’expo de 1905

Du côté Dérivation une autre passerelle qui était il y a un siècle révolutionnaire dans l’utilisation de béton armé. Dérivation de l’Ourthe, ou de la Meuse, au choix.  Le pont Mativa est classée. En 1945 les américains ont installé un atelier de réparation de chars sur la Boverie. Le pont a survécu au passage des chars Sherman, heureusement pas trop lourds… Le pont tire son nom du quai Mativa, sur l’autre rive. L’ouvrage d’art est aussi connu comme « Passerelle Hennebique », du nom de son concepteur. Cette passerelle est le troisième pont liégeois construit pour l’exposition universelle de 1905 à être classé. Les ponts de Fragnée et de Fétinne, tous deux à structure en métal, le sont en effet déjà. La passerelle fait aujourd’hui partie du réseau RAVeL.

La tour cybernétique de Schöffer

Dans les années 50 la cybernétique était un mot à la mode. Aujourd’hui on parlerait de digital. Un certain nombre d’artistes ont surfé sur cette vague. En 1961, Liège achète une œuvre de l’artiste franco-hongrois Nicolas Schöffer, le père de l’art cybernétique : une sculpture abstraite de 52 mètres de haut.
La Tour réagit, grâce à des capteurs, à différents stimuli (température, vent, bruits de la ville, etc.) et déclenche, via des algorithmes cybernétiques, trois types d’action : mouvements (pales réfléchissantes), sons (diffusion aléatoire de bruits naturels retravaillés et de sons électroniques) et lumières (lumière naturelle réfléchie par les pales le jour, lumière artificielle colorée la nuit). L’artiste a tout prévu : un «moteur d’indifférence» intervient aléatoirement pour briser toute monotonie.
Tout ça est tombé assez vite en panne. Mais pendant toutes ces années des gens ont œuvré pour la restaurer. Etonnant, parce que l’artiste n’a pas des liens bien particuliers avec la ville…
En 1997, ils obtiennent le classement de ‘la tour cybernétique et les composantes matérielles ayant permis la réalisation du programme aléatoire et le spectacle luminodynamique « Formes et Lumières »,  l’ensemble des éléments techniques permettant le fonctionnement de la tour et l’animation de la façade du Palais des Congrès’. Je suppose que le classement a facilité la restauration.
Ce projet liégeois a encouragé Nicolas Schöffer à concevoir une autre Tour cybernétique de 360 mètres pour le quartier de la Défense à Paris; ce projet fut abandonné après la mort du président Pompidou, alors que le chantier avait été entamé. Paris Match avait publié en 1970 une simulation de la Tour dans un dossier présentant « Paris dans 20 ans».
En 1956 il avait installé sa première sculpture cybernétique autonome (CYST 1) sur le toit de la cité radieuse de Le Corbusier. Maurice Béjart avait développé un ballet autour de ce robot.
 En fait Schöffer s’est inspiré d’El Lissitzky qui avait produit entre 1919 et 1927 des Proun (une abréviation en russe de "projet pour une affirmation du nouveau"). Ses expérimentations avec l’espace et les matériaux sont une métaphore pour la visualisation des transformations fondamentales d’une société qu’il espérait voir surgir de la Révolution russe.
Pour Philips, Schöffer a développé Lumino, en 1968.
L’œuvre la plus marrante de notre «artiste ingénieur» est une sculpture à taper dessus pour transformer la violence en beauté » (Percussonor).
Le bureau d’architectes Philippe Greisch a supervisé la restauration, avec des nouveaux panneaux mobiles en inox, nouvel éclairage LED, etc. Mais j’ai l’impression que c’est de nouveau en panne aujourd’hui…

La Terre et L'Eau

Nous longeons le Ravel, le long du palais des Congrès, jusqu’au pont Albert I.
La Terre et L'Eau, à l’entrée du pont, sont deux sculptures de Georg Grard. En 1931, sa maison  de Saint-Idesbald était un rendez-vous prisé, entre autres, pour Pierre Caille, que nous retrouverons de l’autre côté du pont. A partir des années '50 Grard est souvent sollicité par des commandes publiques. Parmi les plus célèbres, la Figure assise de la Banque Nationale (1950), La Mer, à Ostende (1955). La Naïade de Tournai, (1950) dont la nudité avait fait scandale au point où elle a été  recouverte d'un tissu et même déboulonnée pour se retrouver durant trois décennies au pied du Pont-à-Pont. Ce n'est qu’en 1983 que la statue sera réinstallée à son emplacement d'origine.

Une longue grossesse pour le monument de Pierre Caille

De l’autre côté du pont une sculpture de Pierre Caille, "Liège à ses enfants morts pour elle". Cinq grandes stèles en marbre noir, un ensemble de croix en bronze doré, avec chaque fois une date. C’est pour les érudits, mais les dates ont été choisies après mûre réflexion, celles de neuf des nombreuses batailles qui ont jalonné l'histoire de Liège.Voici mon top 3, sujet d’un blog. Pour commencer la bataille de Vottem du 19 juillet 1346, nos Eperons d’or. Chassé de Liège par le peuple, le prince-évêque Englebert de la Marck avait levé une armée considérable grâce à l’Empire Germanique. Les milices liégeoises se sont opposés avec succès à la cavalerie ennemie. http://hachhachhh.blogspot.be/2014/02/la-bataille-de-vottem-de-1346-notre.html
En 1408, c'est la terrible défaite des Hédroits à Othée. Le 23 septembre, trois armées, celle du Princes-Evêque Jean de Bavière, du duc Jean de Bourgogne dit Jean sans Peur, et du comte Guillaume de Hainaut, attaquent les révoltés qui sont écrasés http://hachhachhh.blogspot.be/2010/01/1395-1404-la-revolte-des-hedroits.html
Caille était né à Tournai, haut-lieu de la tapisserie. Pourtant il faudra attendre 1989 pour sa grande tapisserie: ‘Chevaux, manants et chevaliers’.
Il a réalisé aussi pour Béjart le décor du Sacre du Printemps au Théâtre Royal de la Monnaie
Le projet "Liège à ses enfants morts pour elle" remonte 40ans en arrière, à l’époque où Albert I lance le projet d’un ‘Monument interallié’, que nous voyons sur notre gauche, au-dessus de la colline de Cointe. Pour Albert ce monument était un porte-manteau pour sa stratégie internationale d’après-guerre ; c’était aussi une alliance très subtile avec l’Eglise, qui a construit une ‘basilique’ juste à côté. http://hachhachhh.blogspot.be/2015/04/le-memorial-interallie-de-cointe.html
Trop subtil pour la Ville de Liège qui lance en 1918 SON projet: un beffroi en ‘hommage aux Liégeois combattant depuis dix siècles pour la liberté’. Le projet de la ville n’aboutit pas et en juillet 1936 le Conseil communal vote le transfert des fonds budgétisés vers celui du monument au roi Albert, alors en projet. Il faudra encore attendre presque 30 ans, en 1964, lors du 40e anniversaire de la bataille de Liège, pour sa réalisation.
Ce monument n’est donc pas seulement un pied de nez au Mémorial interallié, mais aussi à Albert qu’on retrouve en bas du pont, sur un cheval non sellé. L’absence de selle n’est pas un ‘statement’ politique de la part du sculpteur.

Un parc de sculptures

L'architecte Dedoyard a conçu le projet de l'ensemble, comprenant aussi l'esplanade en contrebas du pont et la statue du roi Albert par Charles Leplae et le grand escalier d'honneur, doté de sculptures de M. Gillard et Paul Renotte qui a été après guerre échevin communiste de la culture.
Et puis il y a encore le ‘Relief au Lieutenant Graff‘,
un bas-relief d’Edmond Falise qui date de 1923. Après la guerre les troupes alliées, «la Garde du Rhin», occupent le Ruhr.  Le 23 mars 1922, le jeune lieutenant d'infanterie de l'armée belge, José Graff, regagne son casernement. A Ruhrort, quelqu’un tire à bout portant sur le sous-officier. En Belgique, la presse est déchaînée : «Le sang belge coule en Allemagne! Un soldat tombe au poste d'honneur en montant la garde du Rhin !». Heusy, où habite son père, général retraité, inaugure un modeste monument. A Liège un bas-relief en bronze est inauguré au pied de la passerelle, Place Cockerill. En 1940, les Allemands rangent cette plaque dans les réserves de la Ville. Elle réapparaît sur l'Esplanade après la deuxième guerre, en 1964.
Et enfin il y a L'Arbre et son ombre de Daniel Dutrieux (1991):  3 arbres de 7 essences différentes, choisies pour la couleur ou la forme du feuillage, sont plantés selon une disposition qui, en braille, écrit le mot «arbre». Il faut donc être aveugle pour le voir… Les 14 zones pavées affectent la forme d’ombres d’arbres; en braille, elles se lisent “ombre”. L’utilisation du langage des aveugles dans l’oeuvre plastique est une des démarches caractéristiques de Dutrieux, prompt à débusquer ‘notre profonde cécité collective face au devenir de notre environnement’. La maxi-carte, c’est la remise à Daniel Dutrieux de 13 poèmes de François Jacqmin, sous le titre ‘L’arbre et son Ombre’, en 1991.

Le seul monument national à la Résistance

On n’a pas encore fait le tour de notre Memoryparc. Devant nous les Terrasses d’Avroy.  En 1881, les Terrasses sont ornées de quatre sculptures en bronze dont la plus célèbre est le « Dompteur de taureau ». En 1880, ce groupe statuaire de  Léon Mignon, artiste sculpteur né à Liège, avait remporté la médaille d’or au salon de Paris, et Liège avait acquis l’œuvre, transposée en bronze.
La caricature ci-dessus représente l’évêque Doutreloux masquant les parties génitales humaines avec la « Gazette de Liége », journal bien-pensant dont le rédacteur en chef s’appelle alors Joseph Demarteau, lequel dénonce, dans ses éditoriaux, l’outrage infligé aux bonnes mœurs. En réaction ironique à cette campagne puritaine, le prénom du journaliste est utilisé pour désigner le dompteur. On parle désormais, en wallon, de « Djôsef » (Joseph) et son « torè » (le taureau).
Les groupes statuaires des Terrasses associent tous un homme et un animal, le premier dominant l’autre pour l’utiliser à son service : le « Bœuf au repos « , aussi de Léon Mignon, le « Cheval dompté » (1884) d’Alphonse de Tombay et le « Cheval de halage » (1885) de Jules Halkin
Devant nous le seul monument national érigé en hommage aux Résistants de 1940-1945, de l’architecte Paul Étienne et du sculpteur Louis Dupont. Dupont savait de quoi il parlait : en 1941, lui et son frère Georges avaient été enfermés à la Citadelle de Huy. Le groupe des statues à gauche évoque la résistance armée, celui de droite la résistante intellectuelle.
En 1958, le sculpteur réalise bas-reliefs du lycée Léonie de Waha, les reliefs « la Philosophie », « Les Lettres » et « L’Histoire », sur la façade du bâtiment de la Faculté de Philosophie et Lettres de
l’Université  et les reliefs pour l’hôtel des Télégraphes et des Téléphones, que nous croiserons un peu plus loin, et les reliefs « La Nativité» et « Le Cheval Bayard », au pont des Arches.
Dans le parc, le Madmusée, en réfection pour le moment, abrite une collection unique de 2 500 œuvres qui s’inscrivent dans le champ de l’art brut contemporain.

L’église de Saint Jacques : dix siècles d’usurpation rampante

Nous allons via le Boulevard Piercot vers l’église de Saint Jacques.  Nuance: St Jacques le Mineur, ou « Jacques le petit », dans l'expression « Marie, mère de Jacques le petit et de Joset » pour désigner une des trois femmes au pied de la croix dans l'évangile selon Marc. Cette expression donnera par la suite « Jacques le mineur », probablement pour en minorer le rôle. Jésus avait, selon Mt 12,46, Lc. 8,19, Jean 2,12 et 7,3-5 et 1Cor 9,5, des frères et selon Mc 3,31 et 6,3 même des soeurs. Mc 6,3 et Mt 13,55 donnent même des noms. Paul (Gal 1,19) appella Jacques ‘le frère du seigneur’. L’église de Compostella est dédiée à un autre frère de Jésus, Jacques le Majeur. Les moines liégeois se sentaient un peu frustrés de n’avoir que le mineur. Au point que qu’ils organisent la dédicace de l’église le jour de la fête de saint Jacques le Majeur, et pas le jour de celle du Mineur, alors le 1er mai. Ils envoient en 1055 un frère à Compostelle pour demander une relique. Ce qui ne devrait pas poser problème, puisque le corps entier de ce Saint était supposé translaté en Espagne, selon le Codex Calixtinus qui reprend une Lettre apocryphe du pape Léon: « tué par l'épée en Palestine sur ordre du roi Hérode, ses disciples ont pu récupérer son corps et l’embarquer sur un navire qui, en sept jours, les transporta en Espagne ».
Si vous ne croyez pas celle-là, ils vous en raconteront une autre à Compostelle. Cette invention apparaît opportunément à un moment crucial de la Reconquista des royaumes musulmans par les souverains chrétiens. Ils parlent là-bas de Santiago le Matamore, le tueur de Maures. L’envoyé liégeois y raconte que son abbaye est dédiée à Jacques le Majeur, question de ne pas éveiller des soupçons. Ceci dit, à Compostelle, ils ne sont pas nés de la dernière pluie et ils percent le subterfuge.
Témoin ce tableau magnifique ‘La Catedral de Santiago el Menor (Lieja)’ à Coruña.
Voilà donc l’église Saint-Jacques le Mineur en possession de reliques de saint Jacques le
Majeur. Les moines liégeois cultivent la confusion. Cela s’accentue en 1114, lorsqu’un chanoine de Compostelle apporte à Saint-Jacques des reliques supplémentaires. Sous l’abbé Jean de Coronmeuse (1506-1525) on installe un ange qui exhibe une grande coquille sur deux des chapiteaux de la première des absidioles du côté nord. En 1682 le moine Antoine de Tiège commande à Jean Del Cour une effigie de saint Jacques le Majeur, sculptée dans du bois de tilleul et peintes en blanc pour imiter le marbre de Carrare. Le Mineur n’aura la sienne qu’en 1691, presque dix années plus tard.
Pierre Colman, professeur émérite de l’Université de Liège, décrit en long et en large ces dix siècles d’usurpation rampante entre le majeur et le mineur dans le bulletin trimestriel du Trésor de Liège de décembre 2015.
Saint-Jacques était au départ une abbaye bénédictine fondée en 1015 par l'évêque Baldéric II. Il est enterré dans la crypte qui a disparu en 1538, lorsque l’église romane qui a précédé l’église gothique actuelle s’est effondrée.
De l'église primitive, seul subsiste l'avant-corps occidental roman du XIIe siècle. De par son statut d’abbaye elle avait une indépendance par rapport aux huit collégiales dont les chanoines faisaient le pluie et le beau temps à Liège. Au point où les 32 Métiers y déposaient leurs chartes et ont même payé un vitrail magnifique http://www.fabrice-muller.be/sj/vitraux/vitraux-metiers.html

Une fin mouvementée : Saint Jacques et l’Empereur sacristain

La fin de l'abbaye vaudrait une enquête approfondie. Cette abbaye qui faisait contrepouvoir aux huit collégiales fut sécularisée par le pape Pie VI le 28 mai 1785 et transformée en collégiale pour vingt cinq chanoines ! Pendant un bref moment la cité a donc dû entretenir neuf collégiales. Le même pape supprima l'abbaye de Saint Gilles en 1786 et réunit ses revenus à ceux de Saint-Jacques ce qui permettait de monter le chapitre à trente chanoines comme ceux des autres collégiales liégeoises.
le tombeau de l'empereur-sacristain à Vienne
L'empereur Joseph II approuva ce changement le 31 juillet suivant. Mais c’est en fait lui a poussé le pape dans le dos pour supprimer les ordres contemplatifs qui n’apportaient rien à son Empire. On lui a donné le surnom d’ »Empereur sacristain ». Son ingérence dans les affaires de l’Église allait jusque dans les plus petits détails : en dix ans de règne, il a promulgué 6000 décrets concernant les questions religieuses ! Mais avec la «patente de tolérance » de 1781 on n’est plus dans le détail : tous les non-catholiques de tout l’Empire peuvent pratiquer leur culte, construire des temples à leurs frais (sans visibilité du porche et sans cloches) dès que leur communauté atteint 100 personnes et ils ont accès aux emplois publics ; la tolérance fut même étendue aux Juifs. Concernant les couvents, Joseph II niait la moindre utilité sociale aux contemplatifs : « le moine est un individu à tête tonsurée que le peuple vénère à genoux, mais étant inutile au monde, il ne peut être agréable à Dieu ». Il supprime 763 couvents parce qu’ils ne s’occupent ni d’enseignement ni des malades; les bénédictins et autres devaient prouver qu’ils avaient des « activités utiles ». Apparemment ce n’était pas le cas pour Liège. Avant de mourir, Joseph II se choisira très lucidement comme épitaphe : « ci-git un prince qui, avec les meilleures intentions, n’a jamais pu réaliser ses projets ». On peut avoir les meilleures idées de réforme que l'on veut: il est difficile de les réaliser sans toucher aux privilèges de classe établis! C’est l
a révolution française qui réalisera ses projets. Après le concordat de 1801, Saint-Jacques devient église paroissiale.

Vitraux, miséricordes, parcloses, statues de Delcour et un organiste enterré sous son orgue

J’ai parlé du vitrail des 32 Métiers. Les autres vitraux du XVIe siècle ont été offerts par la famille de Hornes. La famille a été mal récompensée: en 1568 Horne est décapité à côté d’Egmont à Bruxelles. De Coster écrivait dans son ULENSPIEGEL: « sur cet échafaud furent mis à mort, par le glaive, les nobles comtes d'Egmont et de Hornes. Et le roi hérita ». Ici c’était le Prince-évêque qui hérita. Horne n’ayant pas d’héritier direct son fief tombé en déshérence a été attribué à Liège en 1568.
Ca vaut aussi la peine de lever un peu les miséricordes et les parcloses des stalles du XIVe siècle où l’on a laissé faire apparemment le sculpteur.
De somptueuses statues baroques – en bois de Tilleul - sont l’œuvre de Jean Del Cour. Lors de la dernière restauration on les a imprègnées de cire : on pourrait les utiliser comme bougie…
L'église est une merveille de l'architecture de style gothique flamboyant, avec sa voûte qui compte plus de 150 clés de voûte; c’est une des rares voûtes qui a gardé ses peintures. En 1558, Lambert Lombard y ajoute un portail Renaissance.
L'orgue date de 1600. Il connait plusieurs restaurations, dont le premier en 1669, par André Séverin de Maastricht  qui fut d'ailleurs enterré sous l'instrument, avec l’épitaphe suivante:
André Severin , en son art sans pareilles
mourut, rempli de grâces , dans ces cloistres :
Ainsi , d’un destin très-heureux ,
Son corps repose dans ces lieux ,
Son âme esclate dans les cieux,
Et son ouvrage au milieux.
Ecoutez-moi cet âme qui éclate dans les cieux https://www.youtube.com/watch?v=HPuW0PalKUI
Les Amis de l'Orgue de Saint-Jacques organisent depuis 1998 chaque automne le Festival d'Orgue de Liège afin de mettre en valeur les orgues les plus remarquables de la région liégeoise.
La balade continue vers la Place Saint Paul. Voici mon blog qui décrit le trajet de Saint Paul jusqu’à la Place Saint Lambert

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