bas relief au Palais Provincial |
Le 18 juin Geneviève Xhayet, directrice du
CHST-ULg, a donné une conférence consacrée à la Paix de Fexhe au Progrès de Herstal. Elle est invitée à la
Braise en septembre sur le même sujet. Elle préside aussi la 4ième session du colloque international du 15et 16 septembre 2016 au Musée de la Vie wallonne et au Palais provincial.
Certains comparent la Paix de Fexhe que avec
la Magna Carta. Mais toute proportion gardée, la Magna Carta concernait toute
l’Angleterre, tandis que Fexhe ne couvrait que la Pays de Liège, qui comptait à
l’époque seulement 9 villes franchisées. Nous sommes encore loin de 23 bonnes
villes de 1651 (12 villes thioises et 11
villes romanes ou wallonnes).
Et le document est une charte quelconque d’une
allure banale. Le seul exemplaire authentique est conservé à Maastricht.
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Mais associer cette Paix à la notion de citoyenneté, comme le fait allégrement la Province est franchement incorrect point de vue
historique. La Province a cru regrouper les commémorations sous le label
« Debout Citoyen! ». La Paix de Fexhe est essentiellement
corporatiste : on y définit le droit de la noblesse, clergé et métiers
d’être jugés par leur corps, sauf pour tout ce qui est hérésie, jugée par un
tribunal de l’église, qui deviendra plus tard l’inquisition, et pour des
assassinats, qui étaient jugés par le Prince qui était à Liège aussi l’Evêque,
qui s’arrogeait dans ce cadre là le droit d’arsin, « droit d'ardoir, d'arsin et
d'abattis », autrement dit le droit de détruire des biens immeubles du coupable
par le feu. Un droit qu’Israël s’arroge encore aujourd’hui dans les territoires
occupés.
Si, en plus, on y associe le 25ème anniversaire
du Traité européen de Maastricht, on est dans le décor : Maastricht n’est
quand même pas un exemple de démocratie... Bref, on peut se demander si la
Citoyenneté est servi avec un tel melting pot…
La Paix de Fexhe, le Mal Saint Martin, les Vêpres Siciliennes, les Matines de Bruges, et la montée des villes
Ceci dit, la Paix de Fexhe n’est quand même
pas un fait divers. En mettant fin à la révolte du Mal Saint Martin, elle s’inscrit dans un mouvement séculaire qui,
avec les Vêpres Siciliennes, les Matines de Bruges, la rébellion de Tournai de
Saint Omer de Rouen, de Magdebourg,
Augsburg et Trèves, a marqué la montée des villes face à la noblesse.
J’exagère un peu en disant que Fexhe met fin
au Mal Saint Martin. Avant Fexhe il y avait déjà eu la Paix d’Angleur, en 1313,
et la Paix de Hanzinelle en 1314. Et s’il fallait choisir, c’est plutôt la Paix
d’Angleur qui mit fin au mal Saint Martin. Fexhe est plutôt une trêve où
le prince évêque se pose comme arbitre dans la vendetta entre Awans et Waroux.
La Paix de Fexhe a aussi été très
éphémère : très vite la trève est rompue avec une rupture avec le
prince-évêque Adolphe de la Marck qui
quitte même la Cité le 14 février 1325, après avoir jeté l’interdit sur Liège.
C’est le début d’une guerre civile de quatre ans, où Liège, Dinant, Tongres,
Saint-Trond et le comté de Looz invoquent à plusieurs reprises la Paix de
Fexhe, à titre purement propagandiste.
Le 4 octobre
1328 on a une nouvelle trêve, la Paix de Wihogne, qui ordonne la
suppression de toutes les alliances, « à
l’exception de celles consignées dans la Paix de Fexhe ».
Wihogne aussi s’avère une trêve très
passagère. La révolte reprend. Victorieux en 1331, le prince soumet le Conseil
de la Cité à la Réformation d’Adolphe, qui réduit le rôle des Métiers. Son
article treizième, la « Loi de Murmure
», interdit même toute parole hostile au pouvoir princier. Une suggestion pour
le gouvernement Michel qui trouve que les médias et syndicats ne communiquent
pas bien sur ses ‘bienfaits’ ?
La Paix de Fexhe est donc supprimée par cette
Réformation d’Adolphe, quinze ans après sa signature.
Le tribunal des XXII
En 1343 le premier tribunal des XXII fut fondé après un conflit entre les autorités
liégeoises et les Hutois. Ce tribunal des XXII sera souvent associé à la Paix
de Fexhe. 22 membres sont chargés de punir les abus de pouvoir des agents du
prince. Leur seconde mission est d’assurer le respect des accords de paix
passés entre les princes-évêques et leurs sujets.
Le Prince-Évêque dissout le tribunal le 25
février 1344, juste avant sa mort : il convoque les quatre chanoines du
tribunal et les force à lui livrer l’écrit qu’il mettra en pièces.
emplacement présumé perron Vottem |
Et comme avec la bataille de Courtrai, la
victoire historique du peuple à Vottem ne tient pas dans la durée : un an
plus tard l'évêque avait de nouveau
réuni une armée formidable. Les milices de Liège acceptent le combat en rase
campagne et se font battre à plate couture à Tourine. Huit jours après, la paix
de Waroux leur impose un lourd tribut.
Il faudra attendre 30 ans pour que le second
tribunal des XXII est reformé, le 2 décembre 1373, de commun accord entre les
états et le prince Jean d'Arckel.
Donc, entre 1313 (la fin du Mal Saint Martin)
et 1347, on a eu la Paix d’Angleur, la Paix de Hanzinelle en 1314, la Paix de
Fexhe, la Paix de Wihogne, la Réformation d’Adolphe, et la paix de Waroux en
1347. On a presque fait le tour du Grand Liège.
Objectivement ces documents ont le même poids.
La différence tient à la mémoire. Comme le dit le médiéviste Christophe Masson,
«concernant Fexhe, il vaut mieux parler
d’une trêve que d’une paix. L’efficacité de la paix de Fexhe tient plus dans sa
mémoire que dans son application. Lors de la Révolution liégeoise, la paix a
été exhibée comme le témoin d’un âge d’or démocratique. Quand on a voulu créer
une constitution wallonne à la fin des années 1990, la paix de Fexhe a été
citée ainsi que le congrès de Polleur et la charte de Huy de 1066. Dans toutes
les commémorations, il y a des actualisations. Les spécialistes de la mémoire
ont montré comment on utilise un fait historique pour dire autre chose (LLB
22 février 2016).
De Godefroid de Fontaines à la paix de Fexhe
Pourquoi la Paix de Fexhe est resté dans la
mémoire collective ? La solution de cet énigme se trouve peut être dans ces quelques phrases:
« Nous Evesques et capitles avons
ensemble par commun accord ordoneit et ordonnons ke les franchies et li ancien
usage des bonnes villes et de commun paiis del Eveschiet de liege soient dor et
avant maintenut et ke chasons soit menies et traities par loi et jugement
descheuins ou dommes solonc che ke a chascon ».
Un langage qui aurait aujourd’hui parfaitement
sa place sur facebook. Je préfère néanmoins continuer en bon français:
« que
chacun soit gouverné par la loi et le jugement des échevins selon ce que chacun
est (=selon le corps auquel il appartient), à l’exception des cas qui relèvent
de la hauteur de Nous, Evêque de Liège ; le premier des cas concerne le
premier fait de mort d’homme, dans ce cas nous avons le pouvoir d’incendier
(les biens de ce malfaiteur). Au cas où la loi ou les coutumes du pays seraient
estimées trop larges ou trop rigides ou trop étroites, cela devra être modifié
en temps et en lieu par le Sens du Pays ».
Tout est dans ces mots ‘Sens du Pays’. C’est quoi, ce ‘sens du pays’ ? Deux fois par an, les «Journées d'État » sont
convoquées par le Prince. Elles durent en principe 10 jours. L'État primaire
est l'État du clergé. Puis il y a l'État noble et l'État tiers qui représente
la bourgeoisie. Les trois États sont notamment compétents pour voter l'impôt,
approuver les traités, approuver la levée des troupes, disposer des principaux
offices publics, voter les lois. Si les recès des trois États sont uniformes,
ils représentent le "Sens du Pays",
c'est-à-dire de la volonté de la nation.
L’élément nouveau est dans cette référence au Sens du Pays. Selon G. Xhayet, ce qui donne
une place de choix à la Paix de Fexhe c’est ce Sens du Pays qui s’inscrit
dans l’aristotélisme politique de
Godefroid de Fontaines (v. 1250-1309),
chanoine de la Cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Lambert et maître séculier à la
faculté de théologie de l'université de Paris. Né à Fontaines
(Horion-Hozémont), cadet de l'une des plus grandes familles de la Principauté
de Liège, il est pourvu de nombreux bénéfices : prévôt de Saint-Séverin de
Cologne, chanoine de Saint-Lambert et de Saint-Martin de Liège, chanoine de
Paris et de Tournai etc..
Sa théorie de l'autorité consentie s’inspire
de la Politique d'Aristote. Les commentaires du philosophe arabe Averroès sur
Aristote étaient entrés autour de 1230 dans le monde chrétien grâce aux
traductions de Michael Scot. Un bel exemple de multiculturalité : un
écossais qui redécouvre Aristote
via Averroès (ou Ibn Rochd de Cordoue), un
philosophe islamique, juriste, mathématicien et médecin musulman andalou, né en
1126 à Cordoue, en Andalousie. Son nom complet est Abu al-Walid Muḥammad ibn
Aḥmad Muḥammad ibn Rošd.
Averroes de Cordoue |
A l’époque, une série d’universitaires tentent
d'opérer une synthèse entre la morale sociale du philosophe grec et la doctrine
chrétienne. Pour Godefroid, c'est la
communauté qui octroie un pouvoir légitime au gouvernant, après avoir participé
tout entière à son élection: il s’inspire là sans doute du chapitre des
chanoines procédant à l'élection de l'évêque dans la petite république
ecclésiastique que constituait la Principauté de Liège à son époque. En 1303,
il était devenu membre d'une commission désignée par le chapitre cathédral de
Liège, en vue de procéder par voie de compromis à l'élection de l'évêque.
Mais Godefroid s’inspire aussi de l’aristotélisme politique. Il se démarque de
l'arbitraire du prince, tout autant que du principe de succession héréditaire.
Il se situe ainsi à gauche de cette mouvance, contrairement à Thomas d'Aquin
qui est pour la monarchie. Godefroid de Fontaines prend même des fameux risques :
il critiquera l’évêque de Paris Étienne Tempier,
qui avait condamné 219 propositions averoïstes en 1277: « ils disent que cela est vrai selon la
philosophie, mais non selon la foi catholique, comme s'il y avait deux vérités
contraires, et comme s'il y avait, opposée à la Vérité de l'Écriture sacrée,
une vérité dans ce que disent les païens damnés ».
Godefroid approuve aussi le Miroir des simples âmes de Marguerite
Porete, béguine de Valenciennes, en recommandant toutefois que ce livre ne fût
pas mis entre toutes les mains. Là aussi il prend des fameux risques : la
Porete est brûlée le 1er juin 1310, avec son livre.
Nous devons ce lien entre l’aristotélisme
politique et la Paix de Fexhe à Jean Lejeune qui publie en 1962 « De Godefroid de Fontaines à la paix de Fexhe ». Lejeune avait consacré sa thèse sur la
formation du capitalisme moderne dans la principauté de Liège au XVIe
siècle. La guerre interrompt cette
brillante carrière scientifique naissante.
Il est emmené en Allemagne où il restera cinq ans. A ses compagnons, il
fait revivre le passé « qu’ils veulent
aussi nous prendre. Dans un garage pour blindés, dans une baraque pleine de
vermine», il entreprend d’écrire son chef-d’œuvre: Liège et son Pays :
naissance d’une patrie (XIIIe- XIVe siècles). Ses centres d’intérêt historique glissent
vers le Moyen Age avec e.a. donc Godefroid de Fontaines.
Lejeune restera probablement dans la mémoire
collective pour le trou de la Place Saint Lambert. Elu conseiller communal
libéral en 1958, il était devenu d’emblée échevin des Travaux publics (voir
plus bas), mais donnons aussi une place sa thèse sur la Paix de Fexhe (p.223)
Le 15 septembre 2016 à 16h15, lors de la
session 2 du colloque sur la Paix de Fexhe, Mgr. Jean-Pierre Delville
interviendra sur « Godefroid de Fontaines et l’aristotélisme politique ».
Curieux s’il abordera des sympathies hérétiques de notre chanoine…
Charles le Téméraire s’acharne sur la Paix de Fexhe
Voilà pour les bases philosophiques du ‘Sens
du Pays’. Est-ce suffisant pour expliquer les références à Fexhe dans
l’histoire de la Principauté ? Pourquoi Charles le Téméraire s’acharne
particulièrement sur la Paix de Fexhe : il supprime tout ce qui est
consigné dans cette Paix et qui est contraire aux libertés et aux franchises de
l’Église et des ecclésiastiques, ce qu’Olivier de la Marche exprime par ces
mots : «Charles remist l’eveschié et le
pays en obeissance de monseigneur Loys de Bourbon».
Nuance : le Téméraire ne supprime pas
complètement cette Paix, mais seulement ‘ce
qui est contraire aux franchises de l’Église’. Ce manque de précision était
peut-être voulu par le Téméraire qui légalisait ainsi sa totale liberté de
mouvement.
Dès la fin de l’année suivante, les Liégeois se
soulèvent de nouveau. Le duc de Bourgogne brûle la cité le 30 octobre 1468. Mais
quand, à la mort de son protecteur sous les murs de Nancy, en 1477, le Prince Louis
de Bourbon essaye de se reconcilier avec la Cité, il quémande à Marie de
Bourgogne, fille du Téméraire, le renoncement aux droits obtenus par son père
dans la Principauté de Liège. Ni Adrien, moine de l’abbaye Saint-Laurent de Liège ni l’acte de
la duchesse ne citent clairement la Paix de Fexhe. Mais pour Jean de Looz, les
« bona confiscata » sont restitués,
ce qui est probable vu que la Paix de Fexhe figure parmi les archives de la
cathédrale Saint-Lambert à la fin de ce siècle. Louis de Bourbon accepte aussi
une pétition en trente points dont trois articles font une référence plus ou
moins claire à la Paix de Fexhe.
Le sixième article parle de « modération de
Adoulphff ». Cela réfère soit la Modération de la Paix de Fexhe, soit la Paix de Vottem, aussi appelée Réformation
d’Adolphe.
Les Grignoux revendiquent de la Paix de Fexhe
Presque deux siècles plus tard les Grignoux, composés d’hommes d’« ascension sociale plus récente», citent en 1638 dans leur manifeste « Le Liégeois resveillé » le texte de 1316 comme borne du
pouvoir du prince. Ils défendent le rôle exclusif des « trois Estats du Païs » (= Sens du Pays) dans la rédaction des lois
et l’attribution de la police.
Les Grignoux avaient été portés au pouvoir après l’assassinat de leur
populaire bourgmestre La Ruelle. Le prince-évêque Ferdinand de Bavière avait
quitté Liège, mais il s’était vite retrouvé dans une situation délicate.
Attaqué dans son électorat de Cologne par les protestants, il se décide à se
rapprocher des Liégeois. Ferdinand obtient le 26 avril 1640 la Paix de Tongres,
surnommée « la Paix fourrée ». Il
accepte le Sens de pays comme le stipulait la Paix de Fexhe si les négociateurs
ne parvenaient pas à s’accorder. Il arrive à faire revenir à Liège ses fidèles et
les ‘fourrer’ aux postes de pouvoir.
Il se croit même permis d’exécuter Arnould de
Cerf, beau-frère de La Ruelle. Ce qui provoque les émeutes dites de la «
Saint-Grignou», en juillet 1646. Les Grignoux repoussent les hommes de l’évêque
de la cité.
Ferdinand revient avec le soutien des troupes
impériales menées par son oncle Maximilien-Henri de Bavière, le 31 août 1649.
Les principaux chefs de l’opposition sont conduits à l’échafaud.
Maximilien-Henri succéda à Ferdinand comme prince-évêque de Liège. Un de ses
premiers gestes est de faire exécuter Pierre Bex, ancien bourgmestre. Les
Grignoux profitent de la fin de la guerre de Hollande de Louis XIV pour
déstabiliser une nouvelle fois leur Prince. Lors de la retraite de l’armée française
à travers la principauté, le maréchal d'Estrades ordonna la démolition de la
citadelle de Liège. Maximilien envoya trois compagnies de ses troupes
allemandes pour prendre possession des ruines de la citadelle, mais le peuple
les chassa et acheva l'œuvre de démolition. Les Grignoux triomphaient.
Maximilen-Henri reprend la ville avec l’aide de
Guillaume de Furstemberg, évêque de Strasbourg. Les principaux mutins furent
arrêtés et périrent sur l'échafaud: Maximilien fit sa rentrée en ville le 9 octobre
1684, à trois heures, six heures après leur supplice. Il n'avait pas revu Liège
depuis 1671.
Son nouveau règlement concernant les élections
magistrales de 1684 marque la fin de la période dramatique de l'histoire de
Liège. La principauté tomba dans l'atonie ; les anciens privilèges cessèrent
d'exister.
Fexhe et la révolution liégeoise
les 32 bons métiers |
Les démocrates liégeois de 1789 se réclamaient
d’un mythe. Pour le peuple, Fexhe évoquait le retour à un paradis imaginaire, à
une époque où ‘l’air de la ville rendait
libre’.
Le mythe de la Paix de Fexhe du XIX au XXI ième siècle
Avec la suppression des Métiers le mythe de la
Paix de Fexhe a vécu. Ce qui n’a pas empêché de la repêcher par le mouvement wallon. Le Moniteur officiel du Mouvement wallon de
juillet-octobre 1912 constatait : « Depuis
quelque temps l’idée d’une fête annuelle de la Wallonie, pour faire pendant à
la commémoration flamingante du Massacre de Groeninghe, a heureusement germé
». Les liégeois avancent la Paix de Fexhe, ou les 600 Franchimontois, mais
c’est jugé trop liégeois ; les Namurois sont
pour les quatre fils Aymon, mais à quelle date peut-on accrocher
ça ? Un autre suggère le dernier dimanche du printemps…
Drdeppe Paix de Fexhe |
Avec ça, Fexhe ne passe pas complètement à la
trappe : lors du débat sur la constitution wallonne en 1997, Van Cau veut que la Constitution fasse référence à une série de textes
fondamentaux qui démontrent que dans l'identité wallonne, l'attachement à la
démocratie est une valeur affirmée, revendiquée et ce de façon précoce, comme la
Paix de Fexhe (1316) et la Déclaration des Droits de l'homme et du Citoyen des
gens de Franchimont (1789).
Mettre dans le même sac de l’attachement à la
démocratie la Paix corporatiste de Fexhe et la Déclaration des Droits de
l'homme montre un discernement historique peu développé. Mais cela n’empêche
que le préambule de la Constitution « s’inscrit résolument dans la démarche humaniste des
citoyens qui se revendiquèrent de la Charte de Huy (1066), de la Paix
de Fexhe (1316) et de la Déclaration des Droits de l’Homme et du
citoyen des gens de Franchimont (1789), dans la lignée des projets
autonomistes développés au sein du Mouvement wallon et dans l’esprit de toutes
les affirmations d’une identité wallonne démocratique, ouverte et plurielle ».
Elle a bon dos, cette Paix de Fexhe, 7 siècles
plus tard… Ce n’est pas ainsi que je m’imagine une éducation citoyenne… Ceci
dit, ça plaide pour la Province (à la base des commémorations de 2016) qu’elle
s’est rendu compte que la Paix de Fexhe est un peu maigre
(Fexhe-le-haut-clocher a un nom impressionnant, mais c'est un patelin). A
partir de ce constat elle a élargi les commémorations à toute année qui se
termine sur 6. C'est ainsi que Herstal a pu grappiller quelques euros pour la
grève des femmes (1966) et d’autres pour l'accord 'bras contre charbon' de 1956, ou la première convention collective
de Verviers (110e anniversaire). Cette convention est certes présentée en
version soft, sans dire un mot sur le lock out patronal qui l’a précédé. Encore
un peu et on commémorait la dernière Convention Collective sous Michel I, en
2016. Par contre, aucune commune a repris la grande révolte de 1886.
Laissons le mot de la fin à la Paix de Fexhe :
« Nous
vint ke ceste ordinance valhe et demeure en sa plaine vertu perpetuelment. Che
fut fait ordoneit lan de grace mil trois cens et sauze le vendredi deuant le
gfeste sainct Jehan baptiste »
PS sur Jean Lejeune
le trou en 1993 |
Lejeune
ne nous pas pas seulement légué son
« De Godefroid de Fontaines à
la paix de Fexhe », mais aussi le trou de la Place Saint Lambert.
Pourtant, dans son ouvrage ‘Pays sans frontière’, rappelant le passé commun de
l’Eurégio, il prétendait que toute cité
ancienne « a si étroitement moulé
son être aux mouvements du relief, au cours des eaux et aux besoins des
paroisses, qu’il faut de la prudence pour y porter la pioche » (Renaissance
de la Nation liégeoises, p.53).
Il s’est attaché à la conservation des
monuments et sites (Saint-Denis, Saint-Jacques, Saint-Barthélemy destiné à
accueillir notamment le Musée de l’art mosan, l’hôtel Desoer, l’hôtel de Bocholtz,
l’hôtel Brahy, l’hôtel Somzé ). Il a restauré l’Opéra, l’église Saint-André et créé
Musée de la Vie wallonne «conservatoire
de plus en plus irremplaçable des usages et des traditions populaires des
terroirs wallons».
Mais ses projets ambitieux s’appuyaient sur la
construction de deux bretelles d’autoroutes vers les quais de la Meuse
transformés en voies rapides, bretelles reliées entre elles par la «route de la Corniche» derrière le
palais des princes-évêques. Quand on abandonne finalement ce projet (que faire
avec toutes ces bagnoles au cœur d’une cité), il reste un trou. Il faudra
trente ans pour le combler.
Biblio
Christophe MASSON, LA PAIX DE FEXHE, DE SA
RÉDACTION À LA FIN DE LA PRINCIPAUTÉ DE LIÈGE
Remarque pour les amateurs de BD:
Christophe MASSON a aussi écrit le scénario d’une bande dessinée ‘le sang de la
Paix’ http://www.deboutcitoyen.be/programme/bande-dessin%C3%A9e-%C2%AB-le-sang-de-la-paix-%C2%BB
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