samedi 19 mars 2016

Balade santé MPLP de Lorca à Lorca 10 avril 2016


Cette balade va d'où se situait le club Garcia Lorca de Herstal à ce qui était le club Garcia Lorca de Saint Léonard (aujourd'hui le CPCR), à l'occasion de la commémoration en 2016 à Herstal du 80ième anniversaire de la guerre d’Espagne.
Les clubs Garcia Lorca ont marqué l’immigration espagnole en Belgique ! Le poète Federico García Lorca a été assassiné le 19 août 1936 par les milices franquistes.
Cette 22ième balade de Lorca à Lorca reprend une bonne partie de notre neuvième que j’appele le Ravel rail: le chemin le plus direct jusqu’au centre de Liège : seulement 3,3 kilomètres! Une balade poétique, avec en cours de route des petites lectures de textes de Lorca. 

Firmin Badillo, enfant de la guerre

Les enfants de Tossa arrivent à Comblain-au-Pont
En 1970, au plus fort de leur présence en Belgique, les 67.534 Espagnols représentent le troisième groupe étranger du pays, surtout concentrés à Bruxelles et Liège. Une première vague est venue avec les 5000 Niños de la Guerra, les enfants de la guerre acceuillis en Belgique,  évacués par le gouvernement républicain afin de leur permettre d’échapper aux combats. Firmin Badillo, dernier conseiller du PCB à Herstal, faisait partie de ceux-là. Il était heureux de saluer en 2000 les premiers élus du PTB. Il a encore fait une maquette de la nouvelle maison médicale que nous connaissons aujourd’hui….
Une deuxième vague migratoire s’officialise en novembre 1956 avec la signature de la convention bilatérale hispano-belge qui prévoit pour les candidats une durée minimum de cinq ans de travail dans les mines.

Les clubs Federico García Lorca

Le premier Garcia Lorca de Liège se réunit en 1959. Il connait un fonctionnement clandestin jusque fin 1961. Le mariage de Baudouin et de Fabiola était le 15 décembre 1960 et il ne fallait ménager la jeune mariée… et Franco.
Le Lorca se constitue alors en tant que section du F.G.Lorca de Bruxelles où j’allais manger le dimanche début des années 70.  En 1977 une section ouvre dans la rue Cockerill à Seraing et fin 1978 à Herstal.


A ce propos, voici une lettre de Firmin Badillo du 26/1/1977 au nom de l’Association des familles espagnoles de Herstal (l’ouverture du Garcia Lorca de Herstal se fera deux ans plus tard) :

M. le bourgmestre,

A Herstal une septantaine de parents espagnols se sont réunis. Ils ont insisté sur la nécessité de créer un club récréatif et culturel ici à Herstal afin de sauvegarder notre culture ; il nous est apparu aussi qu’en tant que citoyens et contribuables de cette commune il serait juste et logique que nous soyons reprédsentés au sein de conseil consultatif des Immigrés (CCCI). La plupart d’entre nous habitons cette commune depuis dix et vingt ans, nous nous y sommes mariés et parfois nous avons construit notre logement à Herstal. Serons-nous donc toujours des marginaux ?
 En 1987 le «Deportivo» (club sportif) s’installe dans la rue Jonruelle – Liège. En 1996 Le club Federico Garcia Lorca de Herstal devient le club Miguel Hernandez. Avec la fermeture du club F.G.Lorca situé au n° 151 de la rue Saint-Léonard à Liège, en 2008, s’achève la longue histoire de la vie des clubs Federico Garcia Lorca en région liégeoise. Le flambeau est repris par "le collectif Generación Lorca". C’est ce collectif qui a œuvré pour installer la phrase de Lorca au pied des coteaux : "Dans le drapeau de la liberté, j'ai brodé le plus grand amour de ma vie".  Si le temps le permet nous passerons un quart d’heure en présence de Lorca avec le comédien Ruben Otero.

Saroléa et les Demoiselles de Herstal.

Ceci n'est pas une gare...
La nouvelle place devant la gare s’appelle Les Demoiselles de Herstal, en souvenir de l’histoire motocycliste de Herstal, avec Saroléa, Gillet, Bovy ou Brondoit.
Nous passons devant la gare, ou plutôt un PANG (point d’arrêt non gardé). Cette gare (en fait un abri pour un distributeur de billets) se retrouve au premier emplacement de la ligne ouverte en 1865 par la Compagnie du chemin de fer Liégeois-Limbourgeois. Cette ligne desservait la FN et les Acec, la sucrerie de Liers, ainsi que les Charbonnages d'Abhooz et Bonne-Foi, la Bonne Espérance, la Batterie, Bonne-Fin et Violette et les Charbonnages de la Grande Bacnure.
photo Pierre Maes
La gare aujourd’hui restaurée a été ouverte en 1914. Des mauvaises langues disent que les premiers à débarquer étaient des casques à pointe allemands, et qu’ils avaient même en bon allemand payé leur ticket avant d’embarquer….  L'ancien bâtiment de la gare doit devenir un espace polyvalent. Si tout va bien…
Nous suivons le nouveau piétonnier qui longe les voies. On a une belle vue sur l’arrière des bâtiments industriels de Saroléa. En 1892 on y commence le montage des bicyclettes Royale Saroléa. Puis Saroléa produit en 1901 des vélos où l'on a monté un moteur à pétrole quatre temps de 247 cm3. Pour l'Exposition universelle de Liège en 1905, Saroléa sort deux modèles avec un moteur révolutionnaire bi-cylindres en V. Léopold II en possèdera une. Les motos gagnent Paris-Nice et  Paris-Liège.
 Le bâtiment de 15 000 m² sur trois étages date de 1928. Cette usine était capable de produire 75 motos par jour. Saroléa produit tout elle-même, les roues, les moyeux, les moteurs, les boîtes de vitesses, les cadres... L’usine ferme en 1963.
Le tandem Saroléa/Gillet approvisionnera encore l'armée belge en pièces de rechange pour motos jusqu'en 1973, date de la disparition définitive des activités. De 1901 à 1963, Saroléa a construit 100.000 motos, la production actuelle d'une marque japonaise... en un mois! Depuis 1998, l'AIGS asbl s’ y  installe. Outre les nombreux services d'aide aux personnes il y a des expositions et des balades. Pour voir des Demoiselles de Herstal, il faut aller au musée du cycle à Ampsin ou le Musée du Circuit Spa-Francorchamps à Stavelot.

Les bornes de puits de l’ancien charbonnage de Belle-Vue

A hauteur de la Marée, on est sur le terrain de l’ancien charbonnage de Belle-Vue. A 4 mètres du sentier, deux puits de mine du charbonnage, marqués par une borne. Il serait heureux de conserver l’accès à ces témoins de notre histoire.  Sur la borne récemment rénovée les chiffres 202002 – 202, le n° de la Concession de Belle-Vue et Bien-Venue. Ces concessions existent toujours au niveau juridique. L’abrégé BV-BV + 002 indique le n° du puits.  Dans tous les charbonnages modernes il y avait au moins 2 puits, utilisés tant pour la translation du personnel que pour la remonte du charbon. Mais le puits n°1 - puits principal - servait toujours de puits d’entrée d’air et le puits n°2 - puits secondaire - de retour d’air.  L’air, servant à l’aérage des galeries et des tailles du fonds de la mine était aspiré et refoulé par des ventilateurs et acheminé dans tous les recoins de la mine par un circuit de porte ouvertes et fermées.  L’aération avait pour but d’amener de l’air frais là où travaillent les ouvriers mineurs, mais aussi d’éliminer l’air vicié par le CO2 et  par le grisou qui se dégageait des couches de charbon, en plus ou moins grande quantité suivant le charbonnage.
Nous prenons le tunnel cyclo pédestre  construit par Infrabel pour remplacer plusieurs passages à niveau non sécurisés. Au départ Infrabel avait mis des escaliers au lieu d'une rampe comme le prévoyait le permis. En fait, Infrabel aurait pu dégager un passage sous voie comblée qui servait à transférer les inertes de la paire de Belle Vue vers le terril. Tout au début de la Ruelle des Renards, la maisonnette marquée au fronton ‘1923’ abritait le treuil de la mise à terril.
Cette ruelle est un tronçon du Sentier des Terrils, 300 km, de Bernissart à Blegny-Mine.

Le Ravel Rail

Infrabel nous a aussi asphalté (et sécurisé) un Ravel Rail que nous suivons le long de la voie. Ce projet intéressant est une compensation pour la suppression de deux passages à niveau.
Nous avons sur notre droite plusieurs départs de sentiers, qui menaient vers des jardins. Le dernier (assez  raide) permet l’accès à un sentier qui longe le Bernalmont et qui débouche dans la rue des Petites Roches. Si tout va bien c’est pour notre balade de septembre.
Juste après le treillis anti-éboulement une veine de charbon apparente, ou plutôt une veinette qui a quand même un nom: « Beguine » (parce que stérile, non exploitable). Une deuxième,  «Halballerie», est cachée sous le treillis. A la Bacnure cette veine a été exploitée à moins 227 m. ! Ces veines en affleurement, donc visible en surface, ont été repérées lors de la construction de la tranchée du chemin de fer.

Les terres de l’Evêque

La rue Bois de l’évêque servait aux princes-évêque pour visiter leurs nombreuses terres à Herstal. La ferme dite de la Charlemagnerie s’appelait pendant des siècles la ferme du séminaire. La cité de la Préalle que j’habite a été construite en 1928 sur les terres de l’Evêché, qui y avait aussi une carrière d’où rue de la Carrière) ainsi que les ‘sept bonniers’ où se trouve notre maison médicale et le site de la FN.
Au dessus de la rue du Bois de l’évêque se trouvait une passerelle, là où il y a aujourd’hui une cabine électrique. Dans le fond d’un des jardins débouche un tunnel qui reliait la paire de Bernalmont, derrière Coronmeuse, et les sièges de Cloes et de la Petite Bacnure. Un branchement arrivait au pied du terril de Bernalmont.
Nous longeons le chemin de fer via la rue des Vignes et le Boulevard Solvay, sous-produit de l’expo de 1905. Au dessus de nous le parc des Vignes très délabré. Le 11 décembre 2006 des jardiniers de la Ville de Liège y découvrent un sac de sport rempli des ossements d’un bébé. Très vite on fait le rapprochement avec la disparition signalée le 25 septembre 2005 par Angela Baptista Santos Freitas de son enfant soi-disant enlevé par son mari.
Nous restons dans le horreurs, avec au pied du Thier-à Liège, au Pont des Bayards, cinq coquelicots géants en acier, plantés là où en 2006 ont été retrouvés les corps sans vie de Nathalie et Stacy. L’œuvre est d'Alexandra Gadina, à l’époque étudiante à l'Académie des Beaux-Arts de Liège.
Nous prenons l’Impasse Marcors qui n’est pas impasse pour le piéton. Nous débouchons sur la paire du Charbonnage du Bâneux, mentionnée déjà en 1585, une des mines les plus anciennes de Liège. Le charbonnage de Bâneux a été fermé en 1942. Son puits atteignait 350 m de profondeur. Une galerie part d’ici vers le charbonnage de Batterie au Thier à Liège, où nous sommes passés lors de notre balade de mars.  Dans les galeries abandonnées de Bâneux on a fait des recherches pour les petites victimes d’Ait Oud, Stacy et Nathalie. Elles ont été retrouvées dans un caniveau, le long du chemin de fer, quelques centaines de mètres plus bas … On a vu le monument en acier Corten aux Bayards.

La Gare de Vivegnis

En dessous de nous la gare de Vivegnis, où l’on débarquait les travailleurs italiens dans une gare de marchandises. La marchandise, c'était eux, vendus pour un sac de charbon. La fin des hostilités entraîne la fin de la mise au travail de 32271 prisonniers de guerre allemands, qui sont libérés entre mai et octobre 1947. Pour les remplacer la Belgique signe en juin 1946 le protocole ‘bras contre charbon’ avec l'Italie...  A . MORELLI raconte qu’ à Vivegnis la main d'oeuvre est ‘rangé’ par numéro de puits et arrive à destination sur les camions non bâchés, crasseux, qui venaient de transporter du charbon. Dans la deuxième moitié de 1946, un millier d'Italiens arrivent ainsi chaque jeudi dans les mines belges. La gare de Vivegnis sera exploitée jusqu’au 29 janvier 1972. On promet depuis des années une passerelle.

Les Coteaux de la Citadelle

Nous prenons le chemin sur notre droite qui fait partie des Coteaux de la Citadelle: 80 hectares de jardins et de bois en plein centre ville ! Trois étoiles toutes fraîches au Michelin.
Du point de vue nous avons une belle vue sur le faubourg de Saint Leonard qui était au 19ième siècle un zoning industriel au cœur de la ville. Un paquet d’usines se sont installées dans les anciens couvents vendus en 1799 comme bien national. Le couvent des Récollectines est acheté par John Cockerill qui y installe une linière où 1.000 personnes travaillaient La fonderie de canons (aujourd'hui l'Athénée Liège 2) est construite en 1803 par Napoléon dans l'ancien prieuré de Saint-Léonard. Les frères Ponce­let fondent la Société Saint-Léonard qui s’installe en 1826 dans  l’ex-couvent des Carmélites, située à l’emplacement de la Braise. Cette usine construira en 1839 sa première locomotive.
loco St Léonard à l'Usine de Rumelange vers 1910 photo Schlim
En 1865 la Société St Léonard construisit 3 locomotives pour le chemin de fer Liégeois-Limbourgeois. Cette société n’a jamais été reliée directement au chemin de fer. Pourtant, elle se trouvait à un kilomètre de la gare de Vivegnis qui était la gare terminus pour la Compagnie privée. Plus tard, le faisceau de garage de Vivegnis fut réimplanté à Liers, qui devint donc la « Tête de ligne » mais qui perdra bientôt ce statut au profit de Kinkempois.
Au dessus nous retrouvons le sentier des terrils que nous avons croisé à Herstal. Nous descendons par les 600 degrés qui longeaient le mur qui reliait les fortifications de Saint Léonard à la Citadelle.

Au pied des coteaux  une phrase de Lorca: "Dans le drapeau de la liberté, j'ai brodé le plus grand amour de ma vie". 

Un projet conçu par le « Collectif Génération Lorca », en collaboration avec les deux architectes de l’esplanade, Aloys Beguin et Brigitte Massart. Pour nos deux architectes c’est en quelque sorte la cerise sur le gâteau de ‘leur’ Esplanade, pour laquelle ils ont aussi conçu les poubelles et la Méridienne : gravé dans un bandeau d’inox un poème de Savitzkaya évoque les remparts, les charbonnages, les luttes et la multi culturalité.
Pour les amateurs, un petit tour sur la Batte. Et pour tous un retour en bus de la TEC. Avec pour les amateurs un petit repas espagnol au Miguel Hernandez de Herstal….

Programme des commémorations de la guerre d’Espagne

Notre balade-santé s’est inscrite dans un programme très fourni de commémorations à Herstal. Maite Molina Mármol, prof à l’Ulg, a fait une conférence sur l’histoire des clubs Garcia Lorca au centre culturel de Herstal. Elle a publié un article sur la présence espagnole en Belgique dans ANALYSE DE L’IHOES N°141- 6  JUILLET 2015
Elle a présenté aussi une Histoire del'Espagne (1931-1981) avec Ángeles Muñoz et Anne Morelli à la cité miroir en 2015
Au centre culturel il y a eutrois expos (excusez du peu):
‘Los ninos de la guerra’, avec témoignages vidéo ; une expo photos de l’association Generacion Lorca. Et une petite expo (12 panneaux) de l’ihoes ‘en cara a espana’.
A la maison de la laïcité il y a eu une expo 'No Pasaran', et une projection du film « Levés avant le jour »
Et pour terminer, il y a eu Aux Loisirs un Concert du groupe musical Ialma . Ecoutez moi ceci : ça me plait https://www.youtube.com/watch?v=s8sf7FEXjtA

Le coup de corne et la mort

J’ai voulu conclure ce blog avec un extrait du poème le plus connu de Garcia Lorca, son Llanto por Ignacio Sanchez Mejias, chant funèbre pour un toreador. Un poème que je connaissais par cœur à 16 ans….
L’ illustre torero Ignacio Sanchez Mejias, écrivain passionné de littérature et de musique, était un ami proche de Lorca. Il s’était déjà retiré de l'arène, lorsqu’en 1934, âgé de quarante-trois ans, peut-être pour retrouver les sensations que donnent le défi de la mort, peut-être pour des raisons matérielles, il retourne à l'arène. Il doit perdre quinze kilos pour revêtir son costume de lumière. Il ne restait que trois contrats au toréador-poète, avant de renoncer définitivement à la corrida. Mais l'ombre de la "faria" planait; Domingo Ortega blessé, lui demande de le remplacer. Ignacio accepte. La corne du taureau transperce sa cuisse et il meurt. En 1962, August Puig crée "69 images sur le poème que l’on peut lire en espagnol été en français.

Aujourd’hui les mœurs ont changé et certains diraient qu’il l’a cherché…
Ecoutez moi ça en espagnol:  ‘LA COGIDA Y LA MUERTE’. https://www.youtube.com/watch?v=MFFCoxJU0Gc
A cinq heures du soir.
Il était juste cinq heures du soir.
Un enfant apporta le blanc linceul
à cinq heures du soir.
Le panier de chaux déjà prêt
à cinq heures du soir.
Et le reste n'était que mort, rien que mort
à cinq heures du soir.

Déjà luttent la colombe et le léopard
à cinq heures du soir.
Et la cuisse avec la corne désolée
à cinq heures du soir.
Le glas commença à sonner
à cinq heures du soir.
Dans les recoins, des groupes de silence
à cinq heures du soir.
Et le taureau seul, le coeur offert!
A cinq heures du soir.

Mes blogs en rapport avec cette balade

http://hachhachhh.blogspot.be/2014/03/sur-lesplanade-saint-leonard-grave-dans.html

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