Cette balade va d'où se situait le club Garcia Lorca de Herstal à ce qui était le club Garcia Lorca de Saint Léonard (aujourd'hui le CPCR), à l'occasion de la commémoration en 2016 à Herstal du 80ième anniversaire de la guerre d’Espagne.
Les clubs Garcia
Lorca ont marqué l’immigration espagnole en Belgique ! Le poète Federico
García Lorca a été assassiné le 19 août 1936 par les milices franquistes.
Cette 22ième balade de Lorca à Lorca reprend une bonne partie de notre neuvième
que j’appele le Ravel rail: le chemin le plus direct jusqu’au centre de
Liège : seulement 3,3 kilomètres! Une balade poétique, avec en cours de route
des petites lectures de textes de Lorca.
Firmin Badillo, enfant de la guerre
Les enfants de Tossa arrivent à Comblain-au-Pont |
En 1970, au plus fort de leur présence en Belgique, les 67.534
Espagnols représentent le troisième groupe étranger du pays, surtout concentrés
à Bruxelles et Liège. Une première vague est venue avec les 5000 Niños de la
Guerra, les enfants de la guerre acceuillis en Belgique, évacués par le gouvernement républicain afin
de leur permettre d’échapper aux combats. Firmin Badillo, dernier conseiller du
PCB à Herstal, faisait partie de ceux-là. Il était heureux de saluer en 2000 les premiers
élus du PTB. Il a encore fait une maquette de la nouvelle maison médicale que
nous connaissons aujourd’hui….
Une deuxième vague migratoire s’officialise
en novembre 1956 avec la signature de la convention bilatérale hispano-belge
qui prévoit pour les candidats une durée minimum de cinq ans de travail dans
les mines.
Les clubs Federico García Lorca
Le premier Garcia Lorca de Liège se réunit en 1959. Il connait un
fonctionnement clandestin jusque fin 1961. Le mariage de Baudouin et de Fabiola
était le 15 décembre 1960 et il ne fallait ménager la jeune mariée… et Franco.
Le Lorca se constitue alors en tant que
section du F.G.Lorca de Bruxelles où j’allais manger le dimanche début des
années 70. En 1977 une section ouvre dans
la rue Cockerill à Seraing et fin 1978 à Herstal.
A ce propos, voici une lettre de Firmin
Badillo du 26/1/1977 au nom de l’Association des familles espagnoles de Herstal
(l’ouverture du Garcia Lorca de Herstal se fera deux ans plus tard) :
M. le
bourgmestre,
A Herstal
une septantaine de parents espagnols se sont réunis. Ils ont insisté sur la
nécessité de créer un club récréatif et culturel ici à Herstal afin de
sauvegarder notre culture ; il nous est apparu aussi qu’en tant que
citoyens et contribuables de cette commune il serait juste et logique que nous
soyons reprédsentés au sein de conseil consultatif des Immigrés (CCCI). La
plupart d’entre nous habitons cette commune depuis dix et vingt ans, nous nous
y sommes mariés et parfois nous avons construit notre logement à Herstal. Serons-nous donc toujours des marginaux ?
En 1987 le «Deportivo» (club
sportif) s’installe dans la rue Jonruelle – Liège. En 1996 Le club Federico
Garcia Lorca de Herstal devient le club Miguel Hernandez. Avec la fermeture du club
F.G.Lorca situé au n° 151 de la rue Saint-Léonard à Liège, en 2008, s’achève la
longue histoire de la vie des clubs Federico Garcia Lorca en région liégeoise.
Le flambeau est repris par "le
collectif Generación Lorca". C’est ce collectif qui a œuvré pour installer la phrase de Lorca au pied des coteaux :
"Dans le drapeau de la liberté, j'ai
brodé le plus grand amour de ma vie".
Si le temps le permet nous passerons un quart d’heure en présence de Lorca
avec le comédien Ruben Otero.Saroléa et les Demoiselles de Herstal.
Ceci n'est pas une gare... |
La nouvelle place devant la gare s’appelle Les Demoiselles de Herstal, en souvenir de l’histoire motocycliste de Herstal, avec
Saroléa, Gillet, Bovy ou Brondoit.
Nous passons devant la gare, ou plutôt un PANG
(point d’arrêt non gardé). Cette gare (en fait un abri pour un distributeur de
billets) se retrouve au premier emplacement de la ligne ouverte en 1865 par la
Compagnie du chemin de fer Liégeois-Limbourgeois. Cette ligne desservait la FN et les Acec, la sucrerie de Liers, ainsi que les
Charbonnages d'Abhooz et Bonne-Foi, la Bonne Espérance, la Batterie, Bonne-Fin
et Violette et les Charbonnages de la Grande Bacnure.
photo Pierre Maes |
Nous suivons le nouveau piétonnier qui longe
les voies. On a une belle vue sur l’arrière des bâtiments
industriels de Saroléa. En 1892 on y commence le montage des bicyclettes Royale Saroléa. Puis Saroléa
produit en 1901 des vélos où l'on a monté un moteur à pétrole quatre temps de
247 cm3. Pour l'Exposition universelle de Liège en 1905, Saroléa sort deux
modèles avec un moteur révolutionnaire bi-cylindres en V. Léopold II en
possèdera une. Les motos gagnent Paris-Nice et
Paris-Liège.
Le
bâtiment de 15 000 m² sur trois étages date de 1928. Cette usine était capable
de produire 75 motos par jour. Saroléa produit tout elle-même, les roues, les
moyeux, les moteurs, les boîtes de vitesses, les cadres... L’usine ferme en
1963.
Le tandem Saroléa/Gillet approvisionnera
encore l'armée belge en pièces de rechange pour motos jusqu'en 1973, date de la
disparition définitive des activités. De 1901 à 1963, Saroléa a construit 100.000
motos, la production actuelle d'une marque japonaise... en un mois! Depuis
1998, l'AIGS asbl s’ y installe. Outre les nombreux services d'aide aux
personnes il y a des expositions et des balades. Pour voir des Demoiselles de
Herstal, il faut aller au musée du cycle à Ampsin ou le Musée du Circuit
Spa-Francorchamps à Stavelot.
Les bornes de puits de l’ancien charbonnage de Belle-Vue
A hauteur de la Marée, on est sur le terrain
de l’ancien charbonnage de Belle-Vue. A 4 mètres du sentier, deux puits de mine
du charbonnage, marqués par une borne. Il serait heureux de conserver l’accès à
ces témoins de notre histoire. Sur la borne récemment rénovée les
chiffres 202002 – 202, le n° de la Concession de Belle-Vue et Bien-Venue. Ces
concessions existent toujours au niveau juridique. L’abrégé BV-BV + 002 indique
le n° du puits. Dans tous les charbonnages modernes il y avait au moins 2
puits, utilisés tant pour la translation du personnel que pour la remonte du
charbon. Mais le puits n°1 - puits principal - servait toujours de puits
d’entrée d’air et le puits n°2 - puits secondaire - de retour d’air.
L’air, servant à l’aérage des galeries et des tailles du fonds de la mine était
aspiré et refoulé par des ventilateurs et acheminé dans tous les recoins de la
mine par un circuit de porte ouvertes et fermées. L’aération avait pour
but d’amener de l’air frais là où travaillent les ouvriers mineurs, mais aussi
d’éliminer l’air vicié par le CO2 et par le grisou qui se dégageait des
couches de charbon, en plus ou moins grande quantité suivant le charbonnage.
Nous prenons le tunnel cyclo pédestre
construit par Infrabel pour remplacer plusieurs passages à niveau non sécurisés.
Au départ Infrabel avait mis des escaliers au lieu d'une rampe comme le
prévoyait le permis. En fait, Infrabel aurait pu dégager un passage sous voie comblée
qui servait à transférer les inertes de la paire de Belle Vue vers le terril.
Tout au début de la Ruelle des Renards, la maisonnette marquée au fronton
‘1923’ abritait le treuil de la mise à terril.
Cette ruelle est un tronçon du Sentier des
Terrils, 300 km, de Bernissart à Blegny-Mine.
Le Ravel Rail
Infrabel nous a aussi asphalté (et sécurisé)
un Ravel Rail que nous suivons le long de la voie. Ce projet intéressant est
une compensation pour la suppression de deux passages à niveau.
Nous avons sur notre droite plusieurs départs
de sentiers, qui menaient vers des jardins. Le dernier (assez raide) permet l’accès à un sentier qui longe
le Bernalmont et qui débouche dans la rue des Petites Roches. Si tout va bien
c’est pour notre balade de septembre.
Juste après le treillis anti-éboulement une
veine de charbon apparente, ou plutôt une veinette qui a quand même un nom: «
Beguine » (parce que stérile, non exploitable). Une deuxième, «Halballerie», est cachée sous le treillis. A
la Bacnure cette veine a été exploitée à moins 227 m. ! Ces veines en
affleurement, donc visible en surface, ont été repérées lors de la construction
de la tranchée du chemin de fer.
Les terres de l’Evêque
La rue Bois de l’évêque servait aux princes-évêque
pour visiter leurs nombreuses terres à Herstal. La ferme dite de la
Charlemagnerie s’appelait pendant des siècles la ferme du séminaire. La cité de
la Préalle que j’habite a été construite en 1928 sur les terres de l’Evêché, qui
y avait aussi une carrière d’où rue de la Carrière) ainsi que les ‘sept
bonniers’ où se trouve notre maison médicale et le site de la FN.
Au dessus de la rue du Bois de l’évêque se
trouvait une passerelle, là où il y a aujourd’hui une cabine électrique. Dans
le fond d’un des jardins débouche un tunnel qui reliait la paire de Bernalmont,
derrière Coronmeuse, et les sièges de Cloes et de la Petite Bacnure. Un
branchement arrivait au pied du terril de Bernalmont.
Nous longeons le chemin de fer via la rue des Vignes et le Boulevard Solvay,
sous-produit de l’expo de 1905. Au dessus de nous le parc des Vignes très
délabré. Le 11 décembre 2006 des jardiniers de la Ville de Liège y découvrent un sac de
sport rempli des ossements d’un bébé. Très vite on fait le rapprochement avec
la disparition signalée le 25 septembre 2005 par Angela Baptista Santos Freitas
de son enfant soi-disant enlevé par son mari. Nous restons dans le horreurs, avec au pied du Thier-à Liège, au Pont des Bayards, cinq coquelicots géants en acier, plantés là où en 2006 ont été retrouvés les corps sans vie de Nathalie et Stacy. L’œuvre est d'Alexandra Gadina, à l’époque étudiante à l'Académie des Beaux-Arts de Liège.
Nous prenons l’Impasse Marcors qui n’est pas
impasse pour le piéton. Nous débouchons sur la paire du Charbonnage du Bâneux,
mentionnée déjà en 1585, une des mines les plus anciennes de Liège. Le
charbonnage de Bâneux a été fermé en 1942. Son puits atteignait 350 m de
profondeur. Une galerie part d’ici vers le charbonnage de Batterie au Thier à
Liège, où nous sommes passés lors de notre balade de mars. Dans les galeries abandonnées de Bâneux on a
fait des recherches pour les petites victimes d’Ait Oud, Stacy et Nathalie.
Elles ont été retrouvées dans un caniveau, le long du chemin de fer, quelques
centaines de mètres plus bas … On a vu le monument en acier Corten aux Bayards.
La Gare de Vivegnis
En dessous de nous la gare de Vivegnis, où l’on débarquait les travailleurs
italiens dans une gare de marchandises. La marchandise, c'était eux, vendus
pour un sac de charbon. La fin des hostilités entraîne la fin de la mise au
travail de 32271 prisonniers de guerre allemands, qui sont libérés entre mai et
octobre 1947. Pour les remplacer la Belgique signe en juin 1946 le protocole ‘bras
contre charbon’ avec l'Italie... A .
MORELLI raconte qu’ à Vivegnis la main d'oeuvre est ‘rangé’ par numéro de puits
et arrive à destination sur les camions non bâchés, crasseux, qui venaient de
transporter du charbon. Dans la deuxième moitié de 1946, un millier d'Italiens
arrivent ainsi chaque jeudi dans les mines belges. La gare de Vivegnis sera
exploitée jusqu’au 29 janvier 1972. On promet depuis des années une passerelle.
Les Coteaux de la Citadelle
Nous prenons le chemin sur notre droite qui
fait partie des Coteaux de la Citadelle: 80
hectares de jardins et de bois en plein centre ville ! Trois étoiles
toutes fraîches au Michelin.
Du point de vue nous avons une belle vue sur
le faubourg de Saint Leonard qui était au 19ième siècle un zoning
industriel au cœur de la ville. Un paquet d’usines se sont installées dans les
anciens couvents vendus en 1799 comme bien national. Le couvent des
Récollectines est acheté par John Cockerill qui y installe une linière où 1.000
personnes travaillaient La fonderie de canons (aujourd'hui l'Athénée Liège 2) est
construite en 1803 par Napoléon dans l'ancien prieuré de Saint-Léonard. Les
frères Poncelet fondent la
Société Saint-Léonard qui s’installe en 1826 dans l’ex-couvent des Carmélites,
située à l’emplacement de la Braise. Cette usine construira en 1839 sa
première locomotive.
loco St Léonard à l'Usine de Rumelange vers 1910 photo Schlim |
Au dessus nous retrouvons le sentier des
terrils que nous avons croisé à Herstal. Nous descendons par les 600 degrés qui
longeaient le mur qui reliait les fortifications de Saint Léonard à la
Citadelle.
Au pied des coteaux une phrase de Lorca: "Dans le drapeau de la liberté, j'ai brodé le plus grand amour de ma vie".
Un projet conçu par le « Collectif Génération Lorca », en collaboration avec les deux architectes
de l’esplanade, Aloys Beguin et Brigitte Massart. Pour nos deux architectes
c’est en quelque sorte la cerise sur le gâteau de ‘leur’ Esplanade, pour
laquelle ils ont aussi conçu les poubelles et la Méridienne : gravé dans
un bandeau d’inox un poème de Savitzkaya évoque les remparts, les charbonnages,
les luttes et la multi culturalité.
Pour les amateurs, un petit tour sur la Batte.
Et pour tous un retour en bus de la TEC. Avec pour les amateurs un petit repas
espagnol au Miguel Hernandez de Herstal….
Programme des commémorations de la guerre d’Espagne
Notre balade-santé s’est inscrite dans un programme
très fourni de commémorations à Herstal. Maite Molina Mármol, prof à l’Ulg, a fait une conférence sur l’histoire des clubs Garcia Lorca au centre culturel de
Herstal. Elle a publié un article sur la présence
espagnole en Belgique dans ANALYSE DE L’IHOES N°141- 6 JUILLET 2015
Elle a présenté aussi une Histoire del'Espagne (1931-1981) avec Ángeles Muñoz et Anne Morelli à la cité miroir en
2015
‘Los ninos de la guerra’, avec
témoignages vidéo ; une expo photos de l’association Generacion Lorca. Et une petite expo (12 panneaux) de l’ihoes ‘en cara a espana’.
A la maison de la laïcité il y a eu une expo 'No Pasaran', et une projection du film « Levés avant le jour »
Et pour terminer, il y a eu Aux
Loisirs un Concert du groupe musical Ialma . Ecoutez moi ceci : ça me
plait https://www.youtube.com/watch?v=s8sf7FEXjtA
Le coup de corne et la mort
J’ai voulu conclure ce blog avec un extrait du
poème le plus connu de Garcia Lorca, son Llanto por Ignacio Sanchez Mejias, chant
funèbre pour un toreador. Un poème que je connaissais par cœur à 16 ans….
L’ illustre torero Ignacio Sanchez Mejias, écrivain passionné de littérature et de musique, était un ami proche de Lorca. Il s’était déjà retiré de l'arène, lorsqu’en
1934, âgé de quarante-trois ans, peut-être pour retrouver les sensations que
donnent le défi de la mort, peut-être pour des raisons matérielles, il retourne
à l'arène. Il doit perdre quinze kilos pour revêtir son costume de lumière. Il
ne restait que trois contrats au toréador-poète, avant de renoncer
définitivement à la corrida. Mais l'ombre de la "faria" planait;
Domingo Ortega blessé, lui demande de le remplacer. Ignacio accepte. La corne
du taureau transperce sa cuisse et il meurt. En 1962, August Puig crée "69
images sur le poème que l’on peut lire en espagnol été en français.
Aujourd’hui les mœurs ont changé et certains
diraient qu’il l’a cherché…
Ecoutez moi ça en espagnol: ‘LA
COGIDA Y LA MUERTE’. https://www.youtube.com/watch?v=MFFCoxJU0Gc
A cinq heures du soir.
Il était juste cinq heures du soir.
Un enfant apporta le blanc linceul
à cinq heures du soir.
Le panier de chaux déjà prêt
à cinq heures du soir.
Et le reste n'était que mort, rien que mort
à cinq heures du soir.
à cinq heures du soir.
Et la cuisse avec la corne désolée
à cinq heures du soir.
Le glas commença à sonner
à cinq heures du soir.
Dans les recoins, des groupes de silence
à cinq heures du soir.
Et le taureau seul, le coeur offert!
A cinq heures du soir.
Mes blogs en rapport avec cette balade
http://hachhachhh.blogspot.be/2014/03/sur-lesplanade-saint-leonard-grave-dans.html
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