mardi 16 décembre 2014

Balade santé MPLP sur les traces des évêques, de la gare à l’Esplanade Saint Léonard

Depuis presqu’un an maintenant Médecine pour le Peuple organise chaque deuxième dimanche du mois une balades-santé.  Le départ est chaque fois à 10h à la maison médicale. Nous allons alors en covoiturage vers le point de départ.
Notre prochaine balade santé du 11 janvier ira jusqu’à l’Esplanade Saint Léonard ; pour le retour nous prenons le TEC. Le trajet est plat et accessible aux buggys.
Notre point de départ sera la gare de Herstal, ou, si vous préférez le Miguel Hernandez, qui s’appelait avant le Garcia Lorca. Va savoir pourquoi on a changé un nom qui a marqué toute une génération. Nous retrouverons d’ailleurs la génération Lorca au bout de nos peines, avec une phrase de Lorca au pied des coteaux : "Dans le drapeau de la liberté, j'ai brodé le plus grand amour de ma vie".   

Le chemin de l’évêque.

J’ai baptisé cette balade ‘le chemin de l’évêque’. Ce qui contrarie un peu mon ami Walthère pour qui la seule référence à l’évêque sur notre trajet  est la rue Bois de l’évêque. Et le chemin que nous suivrons longe le chemin de fer, de la gare de Herstal à l’Esplanade Saint Léonard, et a été tracé en vers 1860 par ses bâtisseurs.
Ceci dit,  mon chemin de l’évêque a quand même une base historique, certes mince. D’abord parce que la grande route, le Réal chemin (réal= royal) menant de Liège à Maastricht, se situait "Derrière Coronmeuse" au dessus des jardins qui faisaient face au fleuve et non pas le long de la place. Donc plus ou moins sur une partie de notre trajet. Le prince-évêque JT de BAVIERE fit rectifier le chemin royal en 1752 créant ainsi le quai de Coronmeuse.
Comme la grande route le long de la Meuse était sujette aux inondations, on peut supposer que nos princes avaient tracé un chemin à sec un peu plus haut dans la vallée.
Et il leur fallait ce chemin parce qu’ils avaient beaucoup de terres à Herstal. La ferme dite de la Charlemagnerie s’appelait pendant des siècles la ferme du séminaire. La cité de la Préalle que j’habite a été construite en 1928 sur les terres de l’Evêché, ainsi que les ‘sept bonniers’ où se trouve notre maison médicale. Ces terrains appartenant au Prince-évêque, au chapitre de Saint Pierre et aux Etats de Liège ont été acquis par le citoyen Behr en l’an VI lors des ventes des biens nationaux. On qualifiait des gens qui achetaient ces biens comme la bande noire. Ils étaient en 1880 la propriété de la famille Brixhe et ont été rachetés par le charbonnage de Bonne Espérance pour un raccordement au chemin de fer et une autre partie, en 1889, par la FN (Collart-Sacré, La Libre seigneurie de Herstal, éd. Thone, 1927, tII p88). L’évêque avait aussi une carrière où se trouve aujourd’hui notre rue de la Carrière.

La Compagnie du chemin de fer Liégeois-Limbourgeois

La gare de Herstal est (encore) desservie en semaine par de trois à quatre trains dans chaque sens par heure, ce qui représente environ 160 dessertes journalières. Il faut environ cinq minutes pour accéder au centre-ville de Liège par le train. Le plan de mobilité de la Ville de Herstal attache à juste titre beaucoup d’importance à cette ligne qui suit d’ailleurs le trajet du tram. Suite au plan IC-IR de sinistre mémoire la gare du Palais n’étant plus desservie que par 5 trains par heure, laissant la part belle à la liaison Guillemins – Saint Lambert par bus. Conséquence : les lignes 1, 4, 25, 27, 48 saturent… ce qui a servi comme justification pour le tram. Depuis 2013, le guichet de Herstal est définitivement fermé et la nouvelle gare sera un point d'arrêt non géré (PANG), équipée d'un automate pour l'achat de titres de transport.
La ligne 34 relie encore aujourd’hui Liège, Hasselt et Anvers. Il y a aussi des relations horaires limitées à Liège-Palais, Herstal ou Liers, d’où part d’ailleurs un train international avec terminus Lille-Flandres….
La ligne est mise en service le 1er mai 1865 par la Compagnie du chemin de fer Liégeois-Limbourgeois. Mais la gare que nous connaissons a été ouverte en 1914. Des mauvaises langues disent que les premiers à débarquer étaient des casques à pointe allemands, et qu’ils avaient même en bon allemand payé leur ticket avant d’embarquer….
Cette ligne desservait la FN et les Acec, la sucrerie de Liers, ainsi que les Charbonnages d'Abhooz et Bonne-Foi dont le dernier siège d'exploitation à Milmort a fermé en 1962, ainsi que celles de la Bonne Espérance, Batterie, Bonne-Fin et Violette et les Charbonnages de la Grande Bacnure.
La Compagnie du chemin de fer Liégeois-Limbourgeois a été créée par un arrêté royal du 10 décembre 1862. La ligne a été inaugurée onze ans plus tard, en 1873. Le projet était vaste et prévoyait l'exploitation
1. d 'un chemin de fer de Tongres à Ans, passant par Glons, avec un embranchement vers Liège, et passant par Herstal et le faubourg Vivegnis, avec un embranchement vers les houillères du nord de Liège. L'établissement du premier de ces embranchements est obligatoire, celui du second facultatif.
2. Un chemin de fer de Hasselt à Eyndhoven.
C. Un chemin de fer de Tongres au chemin de fer de Hasselt à Maestricht.
La ligne a joué plus tard un rôle important pour relier le bassin minier limbourgeois et le bassin industriel liégeois.
En 1865 la Société St Léonard construisit 3 locomotives pour le chemin de fer Liégeois-Limbourgeois. Cette société n’a jamais été reliée directement au chemin de fer. Pourtant, elle se trouvait à un kilomètre de la gare de Vivegnis qui était la gare terminus pour la Compagnie privée. Plus tard, le faisceau de garage de Vivegnis fut réimplanté à Liers, qui devint donc la tête de ligne, mais qui perdra bientôt ce statut au profit de Kinkempois.
L'État-Belge rachètera le réseau en 1896 seulement.
La ligne est reliée aux autres gares de la cité ardente en 1877.
Pour boucler la « petite ceinture » liégeoise il a fallu quatre tunnels : St Gilles (645 m.), St Martin (735 m.), Pierreuse (847 m.) et le petit souterrain du Baneux (57 m.) qui fut mis à ciel ouvert lors de la mise au gabarit électrique. Ces travaux furent achevés en 1877.  Jonfosse a eu une belle gare. La gare du Palais, notre gare centrale, a dû se contenter d’une baraque jusqu’en 1905, quand elle est dotée d’un bâtiment de style néo-gothique en harmonie avec le palais des Princes-Evêques. Elle sera détruite dans les années 70, lors de la vague de démolitions frénétique dans le cadre de l’inénarrable réaménagement de la place Saint-Lambert.
La gare de Vivegnis sera exploitée jusqu’au 29 janvier 1972. Les seuls vestiges sont les escaliers d'accès au passage souterrain menant au quai central. On promet depuis des années une passerelle. A son heure de gloire, Vivegnis desservait le charbonnage du Baneux.
Mais on ne fera pas le trajet en train, mais bien pedibus. Revenons donc à notre point de départ, la gare de Herstal.

De Herstal aux Bayards

Les deux sentiers qui montent de la gare vers l’emplacement des usines Pieper font partie d’un projet intéressant low budget de parc paysager sur. En 1940 cette usine faisait des mitrailleuses pour la Luftwaffe. L’usine fondée en 1920 tombe en faillite en 1953.
Un peu plus loin le sentier des Renards, un tronçon du Sentier des Terrils, 300 km, de Bernissart à Blegny-Mine.
De l’autre côté du chemin de fer, où se situe maintenant « La Marée », se trouvait la paire de Belle-
photo geoview
Vue et Bienvenue, qui avait un passage comblée sous voie qui servait à transférer les inertes de Belle Vue vers le terril. Tout au début de la Ruelle des Renards, la maisonnette marquée au fronton ‘1923’ abritait le treuil de la mise à terril.
Infrabel y a construit un tunnel cyclo pédestre ; au lieu d'avoir une rampe comme le prévoyait le permis, elle nous a mis 3 escaliers de 20 marches. Mais Infrabel nous a aussi asphalté (et sécurisé) un Ravel Rail que nous suivons le long de la voie. Ce projet intéressant est une compensation pour la suppression de deux passages à niveau.
Nous avons sur notre droite plusieurs départs de sentiers, qui menaient vers des jardins. Il manque à partir de des jardins abandonnés une cinquantaine de mètres pour accéder à un sentier qui longe le Bernalmont et qui débouche dans la rue des Petites Roches.
Juste après le treillis anti-éboulement une veine de charbon apparente, ou plutôt une veinette qui a quand même un nom: « Beguine » (parce que stérile, non exploitable). Une deuxième,  «Halballerie», est cachée sous le treillis. Cette veine a été exploitée par la Bacnure où elle se retrouvait à moins 227 m. ! Ces veines en affleurement, donc visible en surface, ont été repérées lors de la construction de la tranchée du chemin de fer.
Au dessus de la rue du Bois de l’évêque se trouvait une passerelle, là où il y a aujourd’hui une cabine électrique. Dans le fond d’un des jardins débouche un tunnel qui reliait la paire de Bernalmont, derrière Coronmeuse, et les sièges de Cloes et de la Petite Bacnure. Un branchement arrivait au pied du terril de Bernalmont.
L'église Saint-Georges, rue Jolivet à Liège, a servi de local de réunion lors des premières années pionnières du PTB.
Au pied du Thier-à Liège, au Pont des Bayards, cinq coquelicots géants en acier, plantés là où en 2006 ont été retrouvés les corps sans vie de Nathalie et Stacy. L’œuvre est d'Alexandra Gadina, à l’époque étudiante à l'Académie des Beaux-Arts de Liège.
A Vivegnis, non seulement on débarquait les travailleurs italiens dans une gare de marchandises. La marchandise, c'était eux, vendus pour un sac de charbon. En 1945, le premier ministre socialiste Achille Van Acker,  dénommé Achille Charbon, décrète la mobilisation civile. Les employeurs qui occuperaient les travailleurs des charbonnages mobilisés civilement sont sanctionnés. Achille Charbon traite les grévistes de février 1945 de traîtres à la nation. En mai ‘45 il décrète pour une durée de 3 mois la mobilisation générale pour tout le monde et l'interdiction de grève. Mais cela ne suffit pas. La fin des hostilités entraîne la fin de la mise au travail de 32271 prisonniers de guerre allemands, qui sont libérés entre mai et octobre 1947. C'est dans ce contexte que s'inscrit le protocole de juin 1946 (bras contre charbon) entre la Belgique et l'Italie...
A . MORELLI raconte qu’ à Vivegnis les trains ne les débarquent pas sur les quais, réservés aux voyageurs, mais dans les zones prévues pour le déchargement des marchandises où ils sont ‘rangés’ par numéro de puits. Finalement la main d'oeuvre arrive à destination sur les camions non bâchés, crasseux, qui venaient de transporter du charbon. Dans la deuxième moitié de 1946, un millier d'Italiens arrivent ainsi chaque jeudi dans les mines belges
On crée pour ces Italiens ‘Le Sole d'Italia’. Le numéro du 10 avril 1948 reproduit en première page une affiche représentant un homme assis se tenant la tête, avec le commentaire suivant : "aucun doute, Travailleur ! Dans l'isoloir, Staline ne te voit pas, mais Dieu te voit ! " Un autre extrait de l'antimarxisme fougueux du Sole: "Le fondateur du socialisme moderne, Marx, était allemand et juif. S'il était né un siècle plus tard, il aurait fait partie du nombre de Juifs qui ont été exterminés à Buchenwald. Au contraire, la Prusse de ce temps-là, se contenta de l'expulser" (24 mars 1951).
cage aeration Baneux
Le Charbonnage du Bâneux dont nous voyons la « paire », mentionnée déjà en 1585, est une des mines les plus anciennes de Liège. Le charbonnage de Bâneux a été fermé en 1942. Son puits atteignait 350 m de profondeur.
Une galerie part vers le charbonnage de Batterie au Thier à Liège. Dans les galeries abandonnées de Bâneux on a fait des recherches pour les petites victimes d’Ait Oud, Stacy et Nathalie. Elles ont été retrouvées dans un caniveau, le long du chemin de fer, quelques centaines de mètres plus bas … On a vu le monument en acier Corten aux Bayards.
Le chemin sur notre droite mène aux Coteaux dela Citadelle : 80 hectares de jardins et de bois en plein centre ville ! Trois étoiles toutes fraîches au Michelin.
Au début de la rue Bâneux, le potager de « la Cité s’invente » http://www.lacitesinvente.be/  un écocentre consacré à la démonstration et à l’information dans les domaines de la protection de l’environnement et du développement durable. La CITE est l’acronyme de Centre d’Initiatives et de Traitement de l’Environnement. La CITE s’invente crée une passerelle vers la verdure des coteaux, une passerelle entre culture et nature.
Dans le faubourg de Saint Leonard un paquet d’usines se sont’installées dans les anciens couvents vendus en 1799 comme bien national. Le couvent des Récollectines est acheté par John Cockerill qui y installe une linière où 1.000 personnes travaillaient La fonderie de canons (aujourd'hui l'Athénée Liège 2) est construite en 1803 par Napoléon dans l'ancien prieuré de Saint-Léonard. Les frères
Ponce­let fondent la Société Saint-Léonard qui s’installe en 1826 dans  l’ex-couvent des Carmélites, située à l’emplacement de la Braise. Cette usine construira en 1839 sa première locomotive.
Au pied des coteaux  une phrase de Lorca: "Dans le drapeau de la liberté, j'ai brodé le plus grand amour de ma vie". Un projet conçu par le « Collectif Génération Lorca », en collaboration avec les deux architectes de l’esplanade, Aloys Beguin et Brigitte Massart. Pour nos deux architectes c’est en quelque sorte la cerise sur le gâteau de ‘leur’ Esplanade, pour laquelle ils ont aussi conçu les poubelles et la Méridienne : gravé dans un bandeau d’inox un poème de Savitzkaya évoque les remparts, les charbonnages, les luttes et la multi culturalité.
Pour les amateurs, un petit tour sur la Batte. Et pour tous un retour en bus de la TEC.

Une recommandation pour rester en bonne santé : une alimentation équilibrée et une pratique sportive régulière.

 «La santé reste considérée comme l’absence de maladie et pas suffisamment comme un capital à entretenir », assure Martin Wauthy, de Solidaris. Par contre, les citoyens perçoivent parfaitement les recommandations qui leur permettront de rester en bonne santé : une alimentation équilibrée et une pratique sportive régulière. Quant aux causes du bien-être, « le contact avec la nature, le jardinage, la promenade  » arrivent en troisième position, bien avant le fait d’être en bonne santé par exemple. Pour le chercheur Éric Lambin de l’UCL, pionnier de l’étude des interactions entre l’activité humaine et l’environnement,  «les éléments naturels procurent une fascination douce, suffisante pour que les problèmes de votre vie quotidienne ne ressurgissent pas ». Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), il ne faut que 30 minutes d’exercice physique d’intensité modérée cinq jours par semaine pour améliorer son état de santé et rester en forme (ls 18/11/2014).

Et le mot de la fin est pour Raymond Devos : « Mon pied droit est jaloux de mon pied gauche. Quand l'un avance, l'autre veut le dépasser. Et moi, comme un imbécile, je marche ! »

Bibliographie      

http://www.saint-leonard.be/sites/default/files/pdf/projet_de_quartier.pdf UNE PASSERELLE aboutissant sur l'ancienne paire du charbonnage du Bâneux sera conçue dans un esprit « forestier » (ne me demande pas ce que c’est…) en connivence avec l'espace naturel vers lequel elle mène.
Cyrin van der Elst (entrepreneur des chemins de fer), De l'avenir des chemins de fer Liégeois-Limbourgeois, 1866 (intégral).
L'APPEL A LA MAIN D'OEUVRE ITALIENNE POUR LES CHARBONNAGES ET SA PRISE EN CHARGE A SON ARRIVEE EN BELGIQUE DANS L'IMMEDIAT APRES-GUERRE
PAR A . MORELLI
Témoignages de Nestore ROTELLA La Stazione di Vivegnis in L'Incontro, 15.7.82. et interview d'E. ANSELMI, directeur du "Sole d'Italie", le 27 janvier 1978 par Francesca Marinaro.
Le plan et la description du camp de Sclessin (Ougrée) qui comportait 60%
d'Italiens et des "personnes déplacées" figure dans RENE CLEMENS, GABRIELLE
VOSSE-SMAL, PAUL MENON, L'assimilation culturelle des immigrés en Belgique
- Italiens et Polonais dans la région liégeoise, Liège, 1953, pp. 163 sqq.
Mes blogs en rapport avec cette balade
http://hachhachhh.blogspot.be/2014/03/sur-lesplanade-saint-leonard-grave-dans.html


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