Qui veut comprendre Calatrava doit commencer
par ses sculptures : « Mon travail
comme sculpteur est fondamental pour comprendre mon travail comme
architecte. J’essaie d’abattre les
frontières entre l’architecture et la sculpture, et d’entrevoir l’architecture
comme un art. »
Une bonne entrée en matière était l’expo
« SANTIAGO CALATRAVA ARCHITECTE, SCULPTEUR, CÉRAMISTE » de 2010 au
Curtius de Liège. Des dessins, sculptures, mobiles, mobiliers, maquettes,
céramiques etc.
Cette expo suivait l’expo ‘Sculpture into Architecture’ au Moma en 1993 qui était en quelque sorte la consécration de Calatrava en tant qu’artiste.
C’était la première fois que le Moma invitait un artiste avec un tel profil, à
cheval entre architecture et sculpture.
Cliquez ici pour "Calatrava Sculptures in Movement" Images pris lors de l’expo au Palazzo strozzi à Florence (2000)
On pouvait y découvrir un torse d’homme se tournant (un "torse tors", en somme), une colonne tordue en neuf tronçons, qui est
devenue l’étonnante - et non moins torse - tour suédoise à Malmö, achevée en
2005.
entrée métro Alameda |
On pouvait y voir aussi plusieurs sculptures
mobiles, des grands carrés (1,83x1,83m) traversés de deux courbes, qui ondoient
et murmurent. Il a intégré l’idée de mouvement dans plusieurs de ses bâtiments.
Un de ses premiers projets a été l'entrepôt de Coesfeld (1983-85), où les
portes se replient pour former des auvents. Son mobile le plus discret est
certainement l’entrée du métro Alameda de Valence, où les structures se confondent avec le sol quand elles ne sont pas
en usage.
L'hémisphère de Valence a une paupière gigantesque qui s'ouvre et se
ferme. Au Musée d'Art de Milwaukee un immense
pare-soleil suggère l'envol d'un oiseau.
Cliquez ici pour "Wave" Sculpture by Santiago Calatrava at SMU in Dallas
Et si on l’avait laissé faire, le Reichstag à Berlin aurait eu une coupole
mobile. Calatrava a été très déçu d’être écarté et a accusé – à juste titre -
Norman Foster de plagiat quand l’architecte britannique a été obligé par Helmut
Kohl d’ajouter un dôme vitré dans son projet gagnant.
Pour ses ponts, il abandonne souvent le
principe de symétrie au profit d'une composition dynamique. Ses ponts à arche
inclinée, comme à Liège suggèrent un mouvement en suspens plutôt qu’une structure
fixe et
stable. Le pylône incliné du pont Alamillo de Séville équilibre par son
seul poids la traction exercée par le tablier sur les haubans
Pont Alamillo Seville |
Le BBC avait présenté – à juste titre - sa
gare Liège-Guillemins comme “his latest sculpture”. C’est du Magritte: ceci
n’est pas une gare, c’est une œuvre d’art! Il le dit lui-même: "Quand vous
êtes à l’intérieur de la gare, vous ne regardez plus la forme, vous êtes dans
l’espace, vous avez pénétré la sculpture."
Ses ponts et bâtiments aux formes courbes,
complexes et aériennes sont avant tout des sculptures géantes.
Calatrava ground zero NY |
Il faut
donc d’abord voir Calatrava comme un artiste-sculpteur. Le citymarketing a
permis à l’ingénieur Calatrava de gagner
royalement sa vie en réalisant des sculptures sous forme de bâtiments.
Pour comprendre sa démarche il y a aussi le
film ‘CALATRAVA - Dieu ne joue pas aux dés’ réalisé en 2000 par Catherine Adda. Ce film a eu le prix du jury au Festival du
film d'art de Montréal et prix de la meilleure réalisation au MIPA (Muestra
Internacional de patrimonio arquitectonico) de Madrid en 2001. Le film effectue
un aller-retour entre les édifices construits et les entretiens avec l'artiste.
L'architecte explique son "architecture
organique". La main de l'architecte trace les croquis, les dessins qui
servent de point de départ à l'ouvrage. Tous sont liés à l'observation du corps
humain ou à celle de la nature, arbres ou feuilles : des halls comme des
forêts, des ponts comme des bras tendus, des arches comme des corps en
extension, des toits qui s'ouvrent et se ferment tels des fleurs. Comme un
enfant, il tente de donner un équilibre à de petites formes en bois sculptées
et sourit devant l'équilibre enfin trouvé. Calatrava se réfère au vivant pour
imaginer des structures spatiales et abstraites.
La même REALISATRICE a fait un film sur sagare de Saint-Exupéry TGV (Gare de Satolas). Le film s’appelle à juste titre « un
monument à la campagne ». Certains voient dans cette gare une immense
raie manta qui flâne nonchalamment dans le ciel ou encore un oiseau qui couve
et protège de ses immenses ailes les voyageurs. Mais, pour Calatrava, c’est unœil : «et cela est important, parce que
si Raphael n’avait pas eu de bras, il ne serait jamais devenu peintre mais il
aurait fait un bon architecte parce que celui-ci travaille avec l’œil ».
Et puis, pour justifier la non-fonctionnalité,
un argument écologique fait toujours l’affaire : « L’aile est tourné vers le sud et l’angle du toit est déterminé
par l’inclination du soleil lors du solstice afin de na pas pénétrer à
l’intérieur entre juin et Novembre afin de limiter les dépenses pour la clim ».
Ceci dit, si cette gare se trouve à la
campagne, ce n’est pas à cause de Calatrava ; c’est la SNCF qui implante
par défaut ses gares TGV à dix-vingt kilomètres des centre-villes. La ville qui
veut sa gare TGV au cœur de l’agglomération, comme Lille, doit prendre en
charge les surcoûts…
La continuation naturelle de celui de
Gaudí
Dürer Saint Jérôme- memento mori |
Lors d’une expo au Royal Institute of British
Architects il avait mis un petit squelette de chien à côté du projet pour
Valencia, pour montrer son intérêt pour les structures naturelles. Et aussi –
sans prétention – un mémento mori ?
Et comme Gaudí, il utilise des trencadís,
cette mosaïque traditionnelle de carreaux cassés, mais en monocouleur. Seulement,
les trencadis de Calatrava tiennent moins bien et les surfaces de Gaudi sont
plus difficiles à reparer que les bancs de Gaudi dans le parc Guel…
Son architecture organique reprend des formes
trouvées dans la nature, comme Gaudi.
Sagrada familia Gaudi |
Mallorca - sculpture Calatrava |
On retrouve les piliers sous forme de squelette de Gaudí dans les
schémas de Calatrava de 1991 pour la
Saint John - NY - projet Calatrava |
Donc comme Gaudi Calatrava teste ses idées dans des sculptures et
trace à main levé des esquisses. Attention : Gaudi a une formation solide
d’architecte. Et Calatrava aussi est et il pense comme mathématicien et
ingénieur : sa thèse de doctorat a porté sur «l'aptitude au pliage de cadres de l'espace". C’est un sujet
très abstrait.
La seule autre référence que Calatrava cite
lui-même est Eugène Freyssinet « qui a
inventé la précontrainte de micro-béton pour faire des ailes d’avions. Il n’y est probablement jamais arrivé, mais
il a travaillé sur le problème. Dans les
années '20 et '30 les gens osaient et espéraient beaucoup de ce matériau ».
Finsterlin maison de verre |
Calatrava reste en
dessous de la réalité: ces ailes ont volé, sous la forme d’une bombe volante,
il est vrai !
Bien sûr, certains vont lui trouver d’autres
sources d’inspiration. Voici par exemple la maison de verre de l’expressioniste Hermann Finsterlin, de 1924. Il y aurait matière à faire un procès pour copiage
à Calatrava…
D’autres trouvent que le Federal Science
Pavilion de Minoru Yamasaki à la Seattle World's Fair se retrouve à peine
modifié dans plusieurs projets de Calatrava. Les nervures radiales en béton et les arcs paraboliques
viennent de Pier Luigi Nervi.
D’autres citent encore Brancusi.
Un design facilement reconnaissable pour construire une image de marque
L’ideologie (et le business) du ‘branding’, la création de son image de marque,
a poussé Calatrava vers un design facilement reconnaissable et traçable.
Certains trouvent ses projets ennuyeux et repetitifs. N’exagerons
pas : Mies van der Rohe disait déjà qu’on ne devait pas réinventer chaque
lundi matin une nouvelle architecture. Les arcs et le style de Calatrava sont
Pfalzkeller Gallery: copie Calatrava? |
Et il se copie
lui-même : les parallèles entre Milwaukee et WTC transportation hub, entre les operas de Tenerife et Valencia sont flagrants.
Mais je trouve que
tout en visant un ‘branding’, Calatrava montre quand même une grande créativité
qui continue à m’épater.
Un artiste qui réussit des prouesses technologiques
Milwaukee museum |
Calatrava ne fournit pas des plans
finis ; souvent c’est une esquisse artistique. Mais il sait ce qu’il veut
et c’est basé sur des solides connaissances technologiques. Un témoignage des
ingénieurs de Milwaukee est édifiant. Les gestionnaires du musée de Milwaukee voulaient plus de visibilité. Ils étaient un
peu radins et cherchaient une étoile montante qui n’était pas encore à son
zénith. Ce n’est donc pas qu’ils voulaient à tout prix Calatrava: ils ont analysé 73 propositions. Calatrava leur a fait un brise soleil, parfaitement inutile, mais
spectaculaire.
Le rapport des ingénieurs de Milwaukee qui ont
réalisé la structure est édifiant pour la manière de travailler de Calatrava.
C’est un artiste, pas un ingénieur : "il faisait des esquisses et aquarelles
lourdement tracées au crayon qui nous
évoquaient l’esprit de la situation qu’il souhaitait. Nous devrions lire
entre les lignes et essayer de traduire cela en plans de construction." John Kissinger, de
la firme Graef & Associates, dit que les ingénieurs de Calatrava
fournissaient des "calculs à la
grosse louche." 25% de la
capacité informatique du bureau Kahler - 130 personnes - a travaillé sur ces
dessins pleins de courbes et des formes organiques inaccoutumées pour la
plupart de nos architectes. Pour Dick Poklar de Super Sky International, le sol
"est pratiquement la seule chose qui
est droite." Le verre a été fabriqué en Espagne parce qu’on ne
trouvait pas de fournisseur aux Etats Unis. La pièce-clé du brise soleil était
le mât. "Calatrava essayait
continuellement à réduire les structures en béton pour ce mât. Il essayait
d’aller aussi loin que possible structurellement avec cet élément, sachant que
ça allait marcher. Il comprenait
jusqu’où il pouvait aller avec le béton, et cela était toujours plus loin
que la plupart des ingénieurs croyaient possible."
Calatrava a expliqué devant les étudiants du
MIT qu’il s’est inspiré beaucoup d’Eugène Freyssinet qui a fait des ailes
d’avion en béton. BREGUET a fait voler un engin avec des ailes en béton
précontraint (en fait une bombe planante, le Breguet 910, qui devait pouvoir
être chargé d’une tonne de mélinite).
Comme son précurseur Freyssinet, Calatrava
maitrise ses matériaux et cherche effectivement à atteindre les limites du
techniquement possible.
Calatrava a fait des ponts spectaculaires.
Mais il n’est pas le premier à avoir expérimenté avec les arcs
soutenant un pont.
Le Royal Albert Bridge en Cornouailles de 1859 a un modèle unique avec ses deux
travées formant deux lentilles juxtaposées. On a construit des ponts avec un
arc par-dessus, avec le tablier suspendu à l’arc ; les ponts en arc par-dessous, avec le tablier
porté par l’arc ; les ponts bow-string. Mais je crois que Calatrava est le
premier à voir incliné l’arc de manière non symétrique. C’est l’œuf de
Colombe : il n’y a aucune loi de la gravité qui dit qu’un arc doit être à
la verticale. C’est certes un peu plus difficile à exécuter, mais c’est surtout
de la matière grise : un travail de calcul. Selon Calatrava, le surprix
est en dessous de 10%...
Royal Albert Bridge |
La
beauté des sculptures géantes de Calatrava est intimement liée à sa maitrise de
ses matériaux préférés: l’acier et son béton blanc.
Lors d’une conférence au MIT il explique que « pour l’architecture, les matériaux sont fondamentaux. Celui qui veut saisir l’architecture doit comprendre ce que c’est le béton, l’acier. Comment le mettre en œuvre, quelles formes peut-on créer? Peut-on passer d’une forme à l’autre utilisant le même matériau? L’évolution de la technologie de l’acier n’est pas tellement liée à la qualité, mais à la manière d’assembler».
Lors d’une conférence au MIT il explique que « pour l’architecture, les matériaux sont fondamentaux. Celui qui veut saisir l’architecture doit comprendre ce que c’est le béton, l’acier. Comment le mettre en œuvre, quelles formes peut-on créer? Peut-on passer d’une forme à l’autre utilisant le même matériau? L’évolution de la technologie de l’acier n’est pas tellement liée à la qualité, mais à la manière d’assembler».
Calatrava arrive à
résoudre de défis techniques ardus. On a construit la coiffe des Guillemins
sans interrompre le trafic ferroviaire. Il est vrai que c’est le liégeois Greisch
qui a fait les calculs, mais c’est quand même le bureau Calatrava qui
supervisait tout. Une trentaine d'ouvriers galiciens ont
assemblé les 39 arcs - 3.600 tonnes - au-dessus du premier quai, puis poussés
par d'énormes vérins sur des palées de glissement en téflon .
puente Alameda (peineta) Valencia |
Il utilise l’acier d’une nouvelle manière, en
se servant de technologies nouvelles. Son béton blanc aussi est une image de
marque. Pour la gare des Guillemins, une centrale à béton lui a été réservée
pour garantir la pureté du blanc. Et en effet, si on compare le gris de la gare
d’Oriente à Lisbonne de
1993 avec le blanc des Guillemins, il y a
incontestablement un plus esthétique. Pour la gare de Satolas aussi il a exigé
ce béton blanc fait avec du ciment blanc, un gravier clair et un sable
légèrement gris. Pour l’Auditorium de Ténérife, il aurait fallu transporter
depuis la Péninsule les matériaux pour son béton. Alors il a choisi pour des
trencadis blancs.Comparons avec l’attitude de Le Corbusier,
très déçu du béton brut de sa Cité Radieuse à Marseille. Corbu a résolu le
problème en construisant toute une théorie sur les charmes du béton ‘brut de
décoffrage’. Autrement dit, il a contourné la difficulté avec des belles
phrases…
Gare Oriente Lisbonne |
Rejet du fonctionnalisme
Calatrava rejette le fonctionnalisme qui a regné
en maître jusqu’aux sixties.. En architecture, le fonctionnalisme est un
principe selon lequel la forme des bâtiments doit être exclusivement
l'expression de leur usage. La forme suit la fonction : la taille d’un
bâtiment, sa masse, sa grammaire spatiale et toutes les autres caractéristiques
de son apparence doivent dériver uniquement de sa fonction. Si les tous les
aspects fonctionnels sont respectés, la beauté architecturale en découlera
naturellement et nécessairement. Le Corbusier et de l’Allemand Ludwig Mies van
der Rohe se disaient fonctionnalistes, Le Corbusier parla de « machines à
habiter ».
Ses préférences pour les effets de bravoure au
dépens de la fonction se montrent dans la disparité entre la superstructure
extravagant de Miwaukee qui couvre juste un petit lobby, et les galeries d’exposition
dans la boite en béton en dessous, comme une arrière pensée ennuyeuse....
Au Musée des sciences Prince Philippe à
Valence on a l’impression qu’on a réfléchi à ce qu’on allait exposer après la
réception du bâtiment. Les volumes vides sont énormes. A l’extérieur on dirait
deux tremplins avec une galerie non couverte qui ne sert à rien puisque l’accès
est bloqué.
La pureté de l’œil du planétarium est obtenue
en poussant les visiteurs au sous-sol dans un couloir bas et déprimant avec un
éclairage artificiel.
Guggenheim NY |
Les 147 appartements Turning Torso ont tous des
fenêtres inclinées et des murs courbes. Il n’y a presque pas de pièces
rectangulaires. Les livings sont en forme de coin, ou ont un contour en W. Certaines
fenêtres de la hauteur du mur ont presque l'angle d'un pare-brise de voiture. Certains
se sentent carrément désorientés en regardant vers l’extérieur.
Pour l’opéra de Valence, il y avait évidemment
la nécessité de construire un grand volume pour l’auditoire.
Pour Calatrava,
cette contrainte était un peu trop rigide pour ses géométries variables. Il a
alors caché cela sous une série de toits volants qui donnent au bâtiment
l'aspect d'un casque de samouraï. Il justifie cela fonctionnellement par un
auditorium secondaire en plein air qui fournit
2500 sièges supplémentaires à la salle principale.
Palau Arts (Opéra) Valencia |
On peut se demander pourquoi une gare de métro
come Ground Zéro doit ressembler à un oiseau, si ce n’est pour encourage les
gens à fuir ce quartier maussade de Manhattan?
Folies des grandeurs
Calatrava est
frappé d‘une certaine folie des grandeurs. Son pylône del Alamillo est le point
le plus haut de Séville, au-dessus de La Giralda. Son Turning Törso à Malmö est
l’édifice le plus haut de la ville (et le plus coûteux de toute la Suède). Idem
pour son Pont Assut de l’Or, pour les 610 mètres de la Chicago Spire...
A Oviedo il a néanmoins
dû abandonner ses trois tours de 133 mètres; l’UNESCO avait menacé de retirer la ville de la liste du Patrimoine Mondial. ALiège aussi il a dû abandonner son opposition à la construction d’une tour de
27 étages, 118 mètres de haut, à 400 mètres de ‘sa’ gare. Infrabel a croisé le
fer devant le conseil d’Etat qui a jugé que rien ne démontre que l’érection de
la tour nuirait à la mission de la SNCB qui est de « construire des gares et leurs dépendances en dotant celles-ci d’une
forte visibilité. »
Des dépassement des budgets et malfaçons
Calatrava a accumulé une liste inhabituellement longue de projets marqués par
des dépassements de coûts, des retards et des litiges. Attention : avec ça
aussi il est à 100% dans les pas de Gaudi qui a vidé complètement les caisses
de la fabrique d’église du Sagrada Familia, tout en laissant un bâtiment
inachevé…
Guillemins |
En 2007, l’architecte a débuté à Rome le chantier de la Cité du sport, un projet composé de deux voiles jumelles et d’une tour, destinée à accueillir
en 2009 les Championnats du monde de natation. L’impossibilité de terminer les
travaux à temps pour la compétition fut bientôt évidente tandis que les coûts
du projet augmentaient de plus en plus. En juillet 2012 un bloggeur curieux
retrouve le site abandonné: »ce que nous appelions d’un nom charmant "piscine de Calatrava »
était , en fait une des deux voiles conçues pour les Championnats du monde de
natation 2009 à Rome. Le bâtiment aurait dû fermer un boulevard qui référait au Circus Maximus.
La compétition a dû s’organiser au Foro
Italico et à d'autres piscines construites à la hâte, certaines creusées dans des
courts de tennis. On a essayé de relancer le bâtiment de Calatrava à l’occasion
de la candidature de Rome pour les jeux Olympiques de 2020. Mais la crise
financière mondiale est intervenue, et fin 2011 Mario Monti torpillé la
candidature olympique de Rome en refusant le soutien de l'Etat ,
Rome- piscine inachevée |
Le journal la
Repubblica l’appelle "une cathédrale dans le désert », «l’emblème de la
défaite ».
A Haarlemmermeer, ses trois ponts ont coûté
deux fois le montant prévu au budget et des millions d'autres dans l'entretien
depuis leur ouverture en 2004.
La nouvelle gare à Ground zero devrait ouvrir
en 2015, mais est déjà six ans en retard et coûtera 4 milliards de dollars,
deux fois le budget initial. Plusieurs personnes impliquées dans la
construction de cette gare au World Trade Center ont déclaré que les dessins de
M. Calatrava étaient problématiques, extrêmement difficiles à réaliser. L’architecte
a exigé de caser tous les éléments mécaniques de la gare, comme la ventilation,
dans les bâtiments environnants ce qui a compliqué la construction et a causé
des efforts de coordination démesurés.
A Valencia, on se rend compte le 8 janvier 2014 qu’il
faut remplacer tous carreaux de céramique (trencadis) qui couvrent le Palau de
les Arts Reina Sofia: trois millions d'euros, dont 1,1 millions déjà dépensés
pour des réparations d'urgence en décembre 2013. Selon le ministre de
l'Economie Max Buch 60 % de la surface est affecté. La surface gonfle et il
faut démonter entièrement les trencadis avant le prochain spectacle du 23 février.
L'annulation de " Manon Lescaut " en décembre a déjà coûté 623.000 €.
Calatrava a proposé une solution " à l'amiable " pour ce problème. De ses quatre salles, une ne sera jamais ouverte. Dans la grande salle on a dû
retirer 200 places pour manque de visibilité. En 2005 on a déjà postposé le
vernissage mais malgré ça le mécanisme
qui déplace la plate-forme de la scène est tombé en panne lors de l’ouverture postposée
en 2006. Et puis, en dessous du bâtiment il y a les fondations d’un énorme mât
de télécommunications qui a été abandonné. «C'est
comme construire une cathédrale sur les fondations d'une autre, comme on l'a
souvent fait dans le passé», a réagi Calatrava. Vu comme ça...
Oviedo palais congrès |
Durant la construction du Palais des congrès d'Oviedo, en 2006, le toit s'est effondré et l'architecte a été condamné à
payer 3,5 millions d'euros à l'assureur. A l’entrée de ce palais il y a un genre de grand
viseur mécanique, mobile, qui n’a jamais
bougé suite à des problèmes hydrauliques.
Santiago Calatrava n’a pas été capable de
réparer en 12 ans un toit qui fuite, selon Domecq, propriétaire des celliers d’Ysios en Rioja. Il demande au
tribunal €2 millions pour remettre un nouveau toit au-dessus du
toit ondulant. Il veut un autre architecte ; il ne veut plus que Calatrava
s’en occupe.
Cellier Ysios |
A Bilbao, Aena, l'autorité aéroportuaire espagnole, trouve qu’il est difficile d’augmenter la capacité du
terminal, parce que le concept est trop fermé. Ca ils auraient pu le savoir
depuis le début. Aena a dû modifier en 2005-2006 la zone des arrivées: après le
dédouanement, le passagers se trouvaient directement à l'extérieur, exposés aux
éléments. Aena a dû construire – à ses frais - un abri en verre pour remédier à
ce problème. Calatrava a justifié son projet en invoquant l'existence d’une
galerie d'observation au-dessus de la zone de récupération des bagages.
A Reggio Emilia, Santiago Calatrava a
construit une gare TGV (train à grande vitesse) avec un toit tout en ondes.
Très aquatique, en effet ! On aurait pu deviner. Le jour après l’inauguration du 8 juin 2013, était un jour pluvieux. Voyons,
une gare n’est pas faite pour ça… L’eau s’est infiltré sur les premiers
passagers. Selon le 'Ferrovie dello Stato',
l’entreprise qui gère la gare, la pose de l’imperméabilisation n’était pas
encore terminée et le problème serait incessamment résolu.
Les planchers en carreaux de cristal
Un de ses dada est ses carreaux en cristal
qu’il utilise un peu partout, aussi aux Guillemins. Attention : Calatrava
n’invente rien. Le Val Saint Lambert en fabriquait dans les années 30 et était
d’ailleurs un des plus gros annonceurs du journal d’architecture L’Equerre. Le
grand hall des piscines de la Sauvenière était magnifiquement éclairé par une
grande verrière en béton translucide réalisé par les
cristalleries du Val‑Saint‑Lambert. Apparemment, cette verrière posait les mêmes
problèmes d’étanchéité qu’à Calatrava, puisque mon ami Louis Vaesen qui a travaillé
à l’entretien de ce bâtiment croyait que le toit était en roofing. On a
simplement résolu les problèmes d’étanchéité en posant un roofing.
Le majeur de Bilbao,
Iñaki Azkuna, declarait "qu’il avait
marre de la dictature de Calatrava." Il y a de quoi. En 2006, le prestigieux architecte japonais Arata Isozaki avait
construit un nouvel ensemble près du Zubi Zuri. La mairie avait demandeé
de construire une passerelle reliée au pont de Calatrava ce qui nécessita le
retrait d’une section de parapet.
Calatrava a engagé une action en
justice pour atteinte à son droit moral à l’intégrité de
son œuvre. Il a exigé la remise du pont dans son état original, la démolition
de la passerelle, et 250 000 euros pour préjudice moral. Subsidiairement,
si le pont ne pouvait pas être remis en état, il réclamait 3 millions d’euros
de dommages et intérêts. La Mairie de Bilbao a dû casquer 30.000 euros pour calmer les dommages moraux
occasionnés à l’Artiste. Calatrava a donné les 30.000€ à des oeuvres
caritatives.
Zubi Zurri tapissé |
Son pont de la Constitution à Venise a
été inauguré le 11 septembre 2008 à 23h44... pour éviter les manifestations des
opposants après des années de travaux s'étirant en longueur (le projet avait
été lancé en 1999, alors que le pont antique du Rialto a été construit en deux
ans, il y a plus de quatre siècles). Les marches du pont de profondeur variable
causent de nombreuses chutes de la
part de ses utilisateurs tentés de regarder la vue qu'il offre sur Venise
lorsqu'on l'emprunte. Comme les volées des marches ne sont pas régulières,
on en manque une et l'on tombe. Les saillies des marches en verre se cassent
très facilement sous l’impact des valises des touristes qui traversent le Grand
Canal. On a alors interdit des valises ou autres chariots à roulettes avec un
poids supérieur à 20 kilos et/ou d'un mètre cube maximum. Il suffisait d’y
penser… Changer une seule marche coûte entre 4 et 7.000€. Les deux grandes
plaques centrales ont été remplacées par des feuilles d’acier antidérapant. Ces
réaménagements ont coûté 90.000€ à Venise.
Venise pont de la Constitution |
Pour les handicapés le vaporetto |
Il est vrai que tout ce qui se prévaut à Venise d'un début d'autorité avait
tout fait pour modifier le projet initial. Le projet a malgré tout résisté,
mais au prix de modifications qui ont plombé sa facture : d'un devis
initial de 4,50 millions €, il coûte aujourd'hui 20 millions d'euros.
Le plus épineux a été l'installation d'une nacelle pour handicapés. Le projet
initial n'en comportait pas. Calatrava avait jugé qu'elle était inutile, les
vaporetti acheminant sans encombre fauteuils et chaises roulantes entre les
parkings et la gare. C'était mal connaître les diverses associations qui
exigent des structures spécifiques pour tout projet financé par l'État. On a
installé une nacelle. Selon le directeur de la revue Mobilità, il faut dix-sept
minutes à cette nacelle pour franchir le pont. Je suppose que les handicapés
prennent quand même les vaporetti…
Voilà un petit bilan des douze travaux de
Calatrava. Attention : j’ai personnalisé un peu le problème, mais les premiers
à blâmer sont les gens et les institutions qui l’ont engagé. Concernant Valencia il a pu déclarer sans
mentir qu’il a eu à faire “à cinq
gouverneurs différents et que personne n’a mis en cause le projet. Je suis sûr
que les gens sont heureux ».
Je n’ai pas abordé les problèmes
urbanistiques. J’ai abordé un peu les problèmes urbanistiques de la Turia et du
huerta de Valencia dans mon blog (en néerlandais http://huberthedebouw.blogspot.be/2013/12/de-turia-een-groene-stroom-door-valencia.html). Ca mérite sûrement un approfondissement,
mais ça dépasse largement l’individu Calatrava. Ce que je compte encore faire à
la première occasion est un blog à part sur sa gare à Liège Guillemins…
L'Espagne aussi a son affaire Depardieu.
Sources
http://es.trekearth.com/themes.php?thid=10802
81 belles photos
mon blog « Le city marketing a mis
Valence sur la carte du monde... des villes les plus endettées »
en néerlandais- in het nederlands
sur Gaudi
1 commentaire:
Les Guillemins à Liège : une gare sans sièges sur les quais, pour attendre les trains dans les courants d'air, sans coupe-vent pour l'hiver... avec quelques trop rares sièges autour des colonnes dans le hall, d'où on ne voit pas les écrans qui donnent l'heure et les arrivées / retards des trains !!!
Pas d'espace prévus pour garer les vélos, et il a fait enlever les racks à vélo ajoutés après coup en vertu d'un droit d'image imposé à ses "clients"... Tout pour le coup d'oeil et rien pour le premier rôle d'une gare : accueillir confortablement les voyageurs. Euh, Calatrava : il a déjà pris le train et attendu une correspondance ??? A mon avis, non !!!
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