jeudi 21 janvier 2010

Ferrer, Gaudi et le nationalisme Catalan

Je publie ceci à l'occasion d'une exposition Francisco Ferrer à Seraing
Le nationalisme Catalan est un produit de la bourgeoisie Catalane. Gaudi est produit de ce le nationalisme Catalan, et Ferrer en est une victime.
On appelait les Barcelonais aisés les “Indiens”, parce qu’ils avaient gagné leur fortune à Cuba et Puerto Rico. Cette bourgeoisie ne reprend pas seulement la doctrine corporatiste de l’Eglise catholique. Elle est aussi nostalgique de l’esclavagisme.
Le mécène de Gaudi était Eugeni Guell, armateur, magnat du textile et aussi agent immobilier. Joan, le père d’Eugeni Guell, était président du Cercle Espagnol d'Outre mer de Barcelone, qui avait comme objectif de défendre l’esclavagisme contre les abolitionnistes. En 1868 commençait, avec une guerre de dix ans pour l’indépendance de Cuba, une laide époque pour les “Indiens”. En 1871 Joan Guell écrit la brochure “rebellion cubana”, où il dit que l’esclavagisme est la seule manière pour éviter l’émergence d’un sentiment national cubain.
En 1895-1898 une nouvelle guerre aboutit à l’indépendance de Cuba.
Gaudi a pu faire ce qu’il voulait par ses liens avec Eugeni Guell. Le comptable de Guell disait: “je remplis les poches de Guell et Gaudi les vide”. Gaudi de son côté a dit: “un proverbe oriental dit que, pour connaitre un homme, on doit le manger avec beaucoup de sel. Mais il y a un moyen plus direct et rapide, et cela consiste à digérer leur argent. Les architectes dépensent l’argent des autres et ont par ce biais une certaine connaissance de la psychologie de leurs clients”.
Gaudi a été l’architecte attitré du comte Guell, un des piliers du nationalisme catalan réactionnaire.
La ‘Semana Trágica de Barcelona’
La bourgeoisie de Barcelona s’accroche donc à un corporatisme étroit pour assurer l’exploitation de leurs travailleurs. Peine perdue: en 1909 éclate la semaine tragique de Barcelona (‘Semana Trágica de Barcelona’) qui a commencé en protestant contre l’envoi de réservistes pour la guerre au Maroc et qui a terminé dans une révolte généralisée et une grève générale en 1917.
Cette révolte a été matée par des mesures répressives dures et parfois illégales: la “loi sur les évasions” a été utilisée pour tuer des activistes qui avaient été arrêtés par la police ou l’armée. Francisco Ferrer y Guardia était un libre penseur très connu. Ferrer avait fondé en 1901, à Barcelona, l`Escuela Moderna'. En 1906 cette école avait été fermée et Ferrer a été obligé de s’exiler en Belgique, quand est apparu que Mateo Morral, un bon ami et collaborateur de Ferrer, avait organisé un attenta à la bombe mortel contre le roi espagnol, Alfonso XIII. En 1909 Ferrer est retourné à Barcelona, où il a été arrêté lors de la semaine tragique et condamné à mort.
La Colonia Guell: le corporatisme coulé en pierre
En Wallonie on l’appellerait “phalanstère”: des maisons ouvrières construites autour d’une usine. Mais une colonie est encore plus forte point de vue social. Gaudi et son assistent Berenguer ont construit la Colonia Guell. La crypte est l’œuvre de Gaudi. Cette Colonia Guell est intéressante pour la doctrine sociale sous-jacente. Cette kolonie est construite autour de l’usine de velours de Guell, à Santa Coloma de Cervello. Cette usine était mue au vapeur, et était donc beaucoup plus grande que les petites usines basé sur un moulin à eau. Mais cette concentration ouvrière était donc beaucoup plus sensible à une agitation sociale. Le nom “colonie” est vraiment un programma: les ouvriers devaient être encadrés dans un village qui devait être le plus possible isolé du monde extérieur pervers. Cette colonie avait tout pour que les habitants ne doivent pas chercher à l’extérieur: une caisse d’épargne, fanfare, une coopérative, un athénée … En 1917 la Colonie Guell sort une brochure expliquant ses principes. La troupe de théâtre par exemple “a comme but de distraire le peuple les jours fériés, et ainsi dans la mesure du possible d’éviter que les familles sortent de la colonie. Dans la colonie Guell il y a toujours une fraternisation entre capital et travail. Tous les Catalans peuvent être assurés que malgré les efforts sataniques fournis par les faux sauveteurs de la classe ouvrière la charité reste l’héritage avec la plus grande valeur en Catalogne ”. Laguarda, évêque de Barcelona, conseille à E. Guell de "construire tout autour de la colonie un mur très haut et très épais pour que les doctrines socialistes n’y pénètrent jamais”.
En 1910 la visite à la colonie Guell était un des points forts de la Semaine Sociale Espagnole, organisée spécialement à Barcelona après cette semaine ‘Tragique’.
Quelques citations pour démontrer comment Gaudi adhérait aux idées sociales de son mécène: “Les soviets sont un phénomène nordique. Ils ont voulu collectiviser le capital– communisme- et l’ont ainsi enlevé sa responsabilité. Mais l’absence de responsabilité amène la destruction du capital et des abus secrets”. Et aussi: “La démocratie est la domination de l’inconscience et la stupidité. Elle a voulu que tout le monde participait à la même misère”.
Si Ferrer avait son école moderne, la Colonia Güell avait la sienne aussi. L'ambition éducative des fondateurs de la Colonia Güell s'est concentrée sur l'école, qui a fonctionné dès avant 1910. Elle recevait au départ les garçons et les filles mais très rapidement celles-ci furent confiées aux sœurs carmélites qui avaient un couvent dans la colonie même. Il s'agissait d'un enseignement catalan, et même assez catalaniste. Un écrivain en vogue, Josep Pin i Soler écrivit des "Règles morales et de bonne éducation" où étaient détaillés les critères de la politesse et de l'urbanité, tout en faisant l'éloge des divers métiers que les élèves allaient avoir à exercer plus tard: ainsi préparait-on psychologiquement les futurs ouvriers. Quant aux filles leur enseignement se bornait aux travaux domestiques et manuels. Des cours du soir étaient également proposés.
La “Sagrada Familia”
Le nom complet de la “Sagrada Familia” est “ Temple Expiatori de la Sagrada Família”. Le terme “ expiation” concerne l’évolution sociale. Paris a levé une taxe pour construire Montmartre, comme expiation pour la Commune de Parijs. La bourgeoisie Catalane visait aussi une purification sociale. Si Gaudi apprend qu’il reste de l’argent en caisse après l’achèvement de la Basilique Du Sacré Cœur Montmartre dite du Vœu national, il dit: “avec moi, ça ne sera pas le cas”. Pour être précis, je signale que la Sagrada Familia ne peut pas être liée directement avec la semaine tragique. Gaudi a commencé déjà en 1899 les deux tours de la nativité.

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